Benoît Artige | Figures libres, Vincent Van Gogh

Il est venu la chercher dans sa cotte de travail maculée de taches ; elle se précipite vers lui, bras ouverts, cartable au dos, comme une minuscule Didon se jetant sans hésiter dans un brasier aux flammes droites. Car il brûle et ce n’est pas seulement en raison de ses cheveux roux, mais aussi, sous la peau très blanche, de ce réseau violacé de conduits souterrains sur le point d’exploser. Elle, elle n’est pas rousse ― n’est pas roux qui veut ― mais d’un blond paille, presque blanc. Il la hisse sur ses épaules et s’enfuit en galopant ; elle hurle de frayeur et de rire. Leur bonheur de se retrouver tous deux est chaque jour intact. De loin, on croirait voir un feu ardent kidnappant une aurore.