Villy Sorensen, Histoires étranges

tableau Geneviève Van der Wielen, La Scie


Villy Sorensen est né àFrederiksberg près de Copenhague. Nouvelliste, traducteur (Kafka, Nietzsche, Schopenhauer), critique, philosophe, il est l’une des figures majeures de la littérature danoise d’après-guerre.

Histoires étranges révèle un monde ironique et féroce où les êtres, ramenés àl’épure d’un simple trait sombre, paraissent possédés par le « vouloir-vivre » de Schopenhauer, l’individualisme moral de Kierkegaard, et sont écrasés, àla manière de Gregor Samsa, par l’absurde et l’épreuve sans cause.

Fièrement, il appuya la scie àquelques centimètres au-dessus du genou, et se mit àscier que c’en était un plaisir. Toutefois, il fut désagréablement surpris de constater qu’il y avait tant de sang dans une jambe aussi menue. Mais les deux frères s’accordèrent àconsidérer cela comme un signe de la progression avancée de l’infection, qu’il était donc grand temps de juguler. Et le grand frère sciait de plus belle, tandis que le sang, les ligaments et la chair rouge surgissaient du sillon que creusait la lame, laquelle déviait de plus en plus.

Villy Sorensen, Histoires étranges, trad. du danois par Sophie Grimal et Frédéric Gervais, Ginkgo éditeur 2005.

21 octobre 2005
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