Emmanuel Laugier / Vertébral (extrait)
Aujourd'hui
c'est le jour où je commence
dans le jour où je commence pris
dans ce jour mêlé depuis le début
de ce jour
serré dans un vide
d'être
en deux
continuellement départi
y
être
bloqué
du jour où je commence
au jour où je m'arrête
il y a le long corps d'un moteur
amorcé jusqu'
dans le mouvement des jambes
il y a l'enjambement des morts le rire
enjambé de corps en long
mes membres portés d'ombres grandes
aujourd'hui
ce que je vois
lentes silhouettes noires dans le tissu
flottent
un peu de vent soulève
et disparaît aujourd'hui
ils disparaissent les mains vides
et plates
je ne serre pas la main je croise
des yeux sous des chapeaux
fuyants
aujourd'hui je ne serre pas
je passe
seulement se mettre au fond de ses membres
soi-même et marcher
quand je commence
par la boule du journal d'aujourd'hui
alors qu'il faut
dire tout autre chose qui est
qu'il faut entendre le son mat
ou le froissement
ou l'écho des pas dans le vêtement
large
amplement
l'écho suscité de silhouettes qu'elles soient
quelque soit ce qu'il me faut
ce qu'elles sont
il faut oublier entièrement
les précipiter dans le bol de nuit de tête
ou naître où je les vois
où naître avec
je commence
mon jour commence
sur la place encerclée
sur la grande place de soleil perdue dans les platanes pourissants
quelque lieu que cela soit
même décalque
même temps
de là
d'ici
où je commence
où je pendrai
tout contre l'oreille
faut-il entendre tout contre quel vent a passé
pour être ainsi au bout d'une branche
quelle passe
a fui entre le feutre des chapeaux
pour qu'ils aient à l'oreille ce que je n'ai
pas ils ne l'ont
pas encore vous ne l'avez pas
quand ils passent se croisant
demandent
si vous allez sous vos côtes comment cela
dans le temps fixe peut-être fixé en vous fait
cet en-allé ou encore
ce pli
que voilà si bien en vous dans le vêtement
exactement tel
qu'ils vous
ne vous lâchent pas
quand vous vous en allez ils vous en complimentent
et quand ils passent vous ne pouvez plus
lélan lallé-simple le
dégagement qu'en vous ils ont
déjà quand ils passent s'insinue
dans le simple revers de vos manches
le simple frôlement de tissus alors ce simple-là éveille
m'éveille
aussi quand vos mouvements collent
déjà dans le mouvement de leurs gestes
lissés les voilà encore à passer
sans que je puisse m'écarter
en ai pu même marquer le petit déplacement d'air alors
je laisse un écart de quelques milimêtres
jappuie sur
mais comment
je suis devenu si simplement
quand j'ai voulu
seulement commencer
voilà que je termine que j'attends de me terminer
alors que maintenant je devrais
ne pas
ne plus
attendre si longuement
je n'en ai pas les bras
niquoiqu'il faudrait
ne plus rien compter alors
plus rien
d'ailleurs quand je parle
je voudrais faire
que fonde l'attente rentrée au bout des mots
qui est
qui fait
une attente serrée dans les os
une autre retournée dans le dos
et encore suivre
sans yeux pour la voir droit en face
sans yeux pour
mais pour le moins insistante
une insistance de nerf coincé dans le dos
le long de la jambe en long
quand je déplie
alors ne plus tenir
je ne tiens vraiment plus
je refais mon corps
de part en part
recommence :
. j'avais 4
2 bras 2 jambes
et le reste autour
je traverse
j'ouvre un sas je croise
chapeaux mous et feutres lisses
me rappellent
pourtant
je ne me retourne plus
le son est si séduisant
dans l'attente soulevée sa promesse
que se retourner même
quand j'ai pu déjà le dire
mais comment
aujourd'hui
dans le non d'un pas fait dans le noir
faire
au moins faire
un dégagement
aujourd'hui le 7
demain l'autre jour
plié
en arrière revenu
sac au bout des mains rauque
au fond de quel jour
finissant au bout de quelle
journée suis-je parti
de quand depuis quand ai-je pu passer
la peau dans l'autre jour pliée
dans l'autre jour depuis
hier je fus déjà parti quand
rouvert aujourd'hui-même il faut
il faut un long dégagement
or
quand je ne comptais plus sur eux
ils se mirent à compter
mais j'y étais si indifférent
que voilà qu'ils se mirent à compter
que je dus
commencer par eux qui sont
qu'il faut
compter
faire comme si
en faisant semblant de ne pas
de les compter
comme des pans dombres
glissent le long des jambes
n'appartiennent plus à des corps
mais rouvrent
renversesurlaface etplaquedaujourd'hui sansespace
à compter
revient par en dessous
à l'envers
à compter
l'air du corps qu'ils eurent abandonnèrent
parce que je cherche
à l'intérieur du sommeil que je ne dors pas
qu'il me faut dire
ramener
qu'il me faut ne pas mais
dire celui qu'ils dorment
quand les chapeaux enfoncés sur les têtes
laissent
au fond du corps ensommeillé de sangles une
aura sombre d'airs tendus
et sûrs / et magnétisent /
là où je ne peux plus ne peux pas
dire
et davantage
encore que ce fut
d'abord
des grincements de dents
durement serrés la nuit
qu'ils serrent encore de peur qu'elles ne tombent
la nuit
dans le sommeil quand elles tomberont
qu'ils serrent dans un bruit insistant de lime
et continuelle j'attends
l'oreille contre la porte
je suis j'essaye
de passer à travers
de nonchalamment voler quand sous mes ongles
dans l'espace qu'ils occupent
il y a
déjà
le noir en sommeil
le leur
mêlé de bourre de feutre de peluches
de cabans aux grands cols jetés
en arrière nonchalamment relevés
quand j'essayais de les compter
le noir était déjà sous mes ongles
quand j'avais compté je les avais
compté
nuls
dos contre dos
comme dans le sommeil combien et sans image
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