"Proses du fils",
d'Yves Charnet |
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On a déjà eu
l'occasion de saluer à plusieurs reprises le travail d'Yves
Charnet sur remue.net, notamment ses lettre à Pierre
Bergounioux: "On
a toujours besoin d'exemples vivants" et
lettre à Antoine Emaz: "Il
ne faut pas s'affoler".
La nouvelle publication en poche (la petite Vermillon, à La Table Ronde) de Proses du fils, amènera sans doute de nouveaux lecteurs à la suite autobiographique publiée chez le même éditeur. Denis Podalydès -on pourra se référer à un entretien réalisé pour le Matricule des Anges- en réalise la préface sensible: "les voix du double", celle de l'acteur qui a immédiatement perçu le rythme et les rimes de ces proses qui au premier coup d'oeil apparaissent pour être dites à haute voix, telles celles qu'il relève: «J'aurai, d'une obscure intuition, nommé "Bâtardise" ce réseau de hantises et d'hébétudes, ce bouquet de larmes dans le jardin désaffecté, cette ivresse du vide par la fenêtre butinée. Oui, Bâtardise, ce gel du souffle dans l'épaisseur des choses, cette butée du regard dans l' embrasure du crépuscule, cette gorge à vif raclant au fond des cours deux rimes éperdues... » |
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Et plus loin: «Maman
et moi formâmes un couple peu aisé, guère fréquenté,
auxquels la manipulation des livres fournissait l'occasion d'une distraction,
l'entame d'une parole commune, et la réparation de la perte qui défigurait
nos deux vies. Livres, coffrets sévères et mystérieux,
que Maman ne manquait jamais d'emporter avec elle, comme s'ils eussent été
des fétiches destinés, une fois enfouis sous la froide étoffe des draps, à la préserver des malins esprits de la nuit. » On comprend que Denis Podalydès conclut cette préface par : "Puisse cette nouvelle édition permettre à d'autres voix de faire entendre encore, ailleurs, autrement, cette langue souveraine". Saluée à sa partution
en 1993 par Patrick
Kéchichian, postacée par Jacques Borel, cette lettre
au père - livre, "longtemps empêché",
porté dix ans durant -a été rejointe par d'autres
ouvrages, tel Coeur furieux
ou encore Mon amour. On y retrouve rage du dire, assonance des mots
et du sens, "inhérente à l'être même, à
ses souterrains, à ses profondeurs, à tout un obscur
remuement en lui sans fin qui bouge, et non pas, ou pas seulement
, tant s'en faut, écho concerté de la "culture".
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