Olivier Bouillon / Gué (une vie nouvelle) | |
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Lorsque nous lui avons demandé de se
présenter lui-même, après lecture d'un ensemble de poèmes auxquels
nous avions trouvé de la force, Olivier Bouillon nous a transmis le
texte suivant: |
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Ici est l’endroit, le tranchant de la main sur le sexe, ou le crachat, ou le premier coquelicot, sur l’autre femme, crachant mieux à travers le cerceau du pouce et de l’index, nommé avant, crachant mieux sur la bague que l’on retire, puis la faim, du ventre à la fringale, nommé l’endroit où je récite chacune de tes nuits, nommé l’endroit où je récite ta bouche et répète chacune de tes prunelles, où je lape de peu de mots les fleurs et l’étreinte, où je recouds chaque bouton, où je retrouve frotté contre chaque mollet nommé vivant ce jour geai, la plaie et le couteau retiré. Ce que refuse la bouche pourrira contre le tronc, ce qui persiste ne sera plus vert à mes yeux, pétrir curieux, caresser encore le couteau, l’arrogance, et ce jeu : farcir mes poumons de baisers paludéens. Préférons les fleurs aux chaises, préférons les aux friches qui ne cessent vers le bleu de mes bras pie, nommé sauf l’enfant, une tempe est une friche, du crin sur l’archet du vieil habit, soute aux effraies pétrie avec moins de douceur que d’autres chairs, avant les yeux, tête baissée, du geste au bandeau et de ses bordures, nommions autrement la pierre qui glissait sous le pas, inverses végétaux, ces cahiers où ancolies et berce du Caucase séchaient, une féerie une scie, nommions le ressassé là où cingle ce qu’aucun n’entend, mains en carence d’autres mains, façonnant l’automne sur le visage, repliant le négligeable, façonnant, repliant le charbon que nous ramassions comme baies. Façonnant, ainsi, l’ombre possède des hanches moins prononcées, repliant. Nommé le gué d’où la femme maigre plongea pierres en poches, l’étang de celle, nomme le pubis imposé, au jour le ventre contre la terre, nommé cru éloignera l’ébauche, au versent froid écœure le ventre du poignet, la craie, nommé les saillies qui nous réduiront à la simple odeur. Au noir des yeux vulve ouverte, chant bègue au-dessus du museau touffu, nomme frotté à la seule joue, même clou égratignant le crane, sinistre laminage, nommé les ravages comme aux pires journées, sans articulations, d’une manière froissée, entre peu et pierres lourdes, haillons refermés que l’on étouffe, bois vieux chariot, stupeur du chemin reverdi, celui qui ricane préfère le gel et les bouffées froides qui affublent le poumon, d’un doigt le désordre sur la joue, d’un doigt l’incertaine rougeur, pour tout animal chaque distance de la phrase vers la poitrine, nomme et sera répétée, au besoin sentir le sang lorsque ni toi ni moi ne parlons, nomme ces régals familiers. Effleurent n’importe qu’elle allure. Dire ce coin de ciel est avalé par un baiser dire ces feuilles sèchent par timidité toujours ramener des écorchures d’entre les murets de schiste, à baiser l’humus près des baraques, à baiser l’élégance trouée, d’autres sèves ou d’autres sangs, à baiser le repli de l’œil et posséder l’élan, à baiser le sel et à mieux le détester, à forger la simple boursouflure, de mes salives, de mes peaux, de ma poitrine, de ces copeaux crevés, de l’animal saoul en contrebas de l’oreille, puis le haut langage sur la nuque, poitrine racornie à nouveau nommée, face à mes longes vagir, terreau nourri d’ongles rongés à nouveau nommé, et l’herbe, la sauvagerie couche l’herbe avant même le passage des porcs, nomme acre et de mon front je forcerai tes hanches, pudiquement la semence, ce chemin que je possédais, pire mon ventre blanchira, le baiser la chevelure le fardeau n’est plus sur la paupière, le clapotis nommé dont ma langue s’abreuve, fus trèfle, fus mai sans jeter le tricot de laine, fus l’obstinée, enfant au motif de sa longue natte, fus la jeune mémoire, une peau de tartan, au déclin de l’œil j’ai extrait du rire ma verge striée, je te pardonne l’innocence, je rabattrai l’arbre, mes bras souples raconteront. Nomme fiable jusqu’à rompre, rien d’ajusté, au centre fièvres narines os, hanches montrées depuis ces lignes aux mots rares, à mesure c’est sur la peau que la mémoire résonne, tant de fatigue et rien d’autre, nommé ivre, interrogeant, menais grande ruine de mieux en mieux tourbe puant l’urine forte aux rudiments du passage de certains animaux la terre ne m’échappait plus. Nommer sans avaler le ciel, à tisser le fagot tant que peux à recoudre la légère entaille et le pansement de cerfeuil, parcourant encore, à l’ortie l’amère douceur et la simple attention, au blé coupé la tige creuse, en mémoire ni autre ni homme ni flou qui ne cesse ni solitude ni homme ni autre ni la morsure que tu lisses sur la nuque raisonnable ni la beauté ni la piqûre recrachée, affleurent plus proche du vertige éventré n’ont du désastre que récit et fleurs coupées. La petite main sur le col, de ta compagnie retirée, à porté de fusil j’aperçois le chat mort que nous avions hissé à mi-hauteur de châtaignier, fidélité de pitre. Dis puis tais, ouvre et referme le visage, dis puis tais, la main, mieux que d’autres, la tresse autour des chairs retombe comme une défaite mime l’objet lâche le baiser déchiré mieux le poser sur la peau que l’on désire, dis puis tais. Ce sont ces voix qui nous tenaillent. Le pouce à l’index écarte le sourire. De la vase, voilà les lèvres qui s’agitent nomme la langue qui grogne, ici est l’endroit vivions parlions près des friches ce matelas crevé loin des autres ce sommier mes mains l’image glissée à l’intérieur d’un tiroir récite ceux que la vieillesse fait taire récite vide les corps qui s’inclinent plus rien d’autre avant la chute des genoux rien d’autre des autres ne bercera le flou du vêtement feutre et désuétude chacun sait la présence qu’il faut rogner, jusqu’au sang la rendre et l’oublier, dans chaque bras les crocs troublent puisque ici n’est pas l’endroit. Trop de salive sur le seul dialogue couteau couteau à peine la moisson. Ici est l’endroit souffle comme peu. Jaune il faut couper, ce récit, toujours les mots difficiles. Nomme main immense devant le visage, ce jour dénoué, bouture sur la paupière et ton cœur, ni remède ni pupille ni chevilles ni intérieur dont je ne me nourrisse pas, à l’arraché moitié moins qu’un poing, tanin sur les pommettes puis le chiffre contagieux de la maison léguée tuile après tuile, la nudité des mauvaises herbes, une semence imprègne le tissu et cingle la paume murmure le corps sentinelle phalange dans la flaque proche de la simple chaise là où parler résonne au reflet du récit sans nom, entre les miaulements tombé de l’arbre. Vieille, ici est l’endroit. Mal au dos plus insupportable que jamais plier les genoux jusqu’au sol et revenir les doigts noirs, bonne saleté, voici la terre, mais s’en tenir à la lune, à l’ossature plus douloureuse, mesurant la veille qui se corde au flanc de soi, vers une folie, à l’usure cette manière d’enterrement, blanchir la tête loin de la blessure, à portée de chiens la mâchoire bat tristement, l’ordure de celle d’une rature le couteau du peu de sang le lac. Au-dessus de la main je cache l’œil mais c’est l’oreille qu’il me faut taire, nettoyons le sang tordons le fer jusqu’au jour forgeons de nouveaux cadavres. Apprenons ces anciennes vies. Dors mais dormais mieux encore. Commencé par l’endroit. Celui-là se préservait des écorchures. Vivait sans soleil ni ronces ni orties. Ecrivait. Fracassait les livres. Ainsi, se taire si la voix tremble puis refaire le signe su la vitre glacée. Ainsi partir bouche ouverte sur l’autre lucarne. Ainsi courre la solitude sur la gencive. Continué par l’enfant. Plongeait ses jambes déjà souillées d’eau noire. Restait des heures entières, jour comme nuit, assis près du lieu de peu, rabotait d’étranges formes de bois et déviait vers de plus simples fabrications. Dors mais enfant était mieux encore. Dire en corps l’excès d’une voix qui s’use plus mal, seul murmure tiendra le bourbier pour fange nourricière. Ainsi, consentirai-je à respirer les miens. Nommé pire, ces moments d’absence où l’œil découvre autrement le clou, les entrailles du baiser, la douceur d’un palais et les coupures des incisives, moi et l’autre cœur. Vers celui, ton visage ne me surprend plus, immédiate histoire contre la gencive, bafouillis de fontaine, mes chevilles sont légères et sales ; femme de taille, muette le plus souvent, je nettoie la terre et racle les pierres, j’abandonne ce brasier, ce poumon épais, là demeurent digue et vertèbre vive, retenu à outrance, lissé, égratigné, mince d’un cran sur-le-champ d’après pluie, part pille s’étouffe tourne court l’égout dans e au reflet d’une retenue. Les feuilles humides grouillent dans ma bouche. Ma salive est d’automne. Qui dort parlera qui dort recouvrera le corps rebroussera d’un seul le sommeil ignorera en quels murs la parole se fige qui dort brûlera la terre et se rendormira au creux d’un tronc. Celui là nommera le ventre recousu. Mes yeux, dehors le bétail , je renifle, recueille mes crachats et frottes en tes cheveux, au rouet, au berceau du coude, huche comme hier la créature qui a saigné, m’indiffère, ranger l’hiver viendra l’habit, sortir puis occulter, parcourir jusqu’à l’idée de feuilles, calmement défaire l’imprenable condition. Celle ci ira pire et sifflera ou inversement. Nomme sauf papiers ramassés, fange les mots trouvés, crache à la face par cœur, pire pour moi, ainsi la pluie ainsi l’objet qui enfle la poitrine, toujours garder quatre boutons sur la nouvelle étoffe, baise la brume baratte souille, je quitte ces terreux pour notre recoin, la langue que l’on mange puis le baiser que l’on prend, peu qui sépare sauf la tristesse d’une journée qui s’épuise. Le parfum de l’œillet m’écharde, du limon au commencement de chacun de mes silences j’ai la bouche débraillée, ne suis-je pas assez cru, de ta main sur mon dos ce départ en reculant, à présent je suis replié front contre terre. Je te blesserai ivre grognerai encore. Nomme celle-ci. Hume plus haut serre l’heure et serre le ventre, il faut mûrir la graine est morveuse sans cesse ce manège en gorge goût de trique forge l’œil plus à l’intérieur. Cette défroque. Ici est l’endroit jeu un jeu la distance à petits bonds un clou pour seul mémoire vole ma jeunesse mes rides s’atténueront, ma danse est guerrière mes lèvres sont absentes ta robe sale montre tes hanches l’ancienne saison, vrais arbres, petite mécanique de ta bouche lignes de mains offertes à la triste fanfare, qui parle vrai, si je pars aies à cœur de soigner le cornouiller si je pars aies à cœur de battre fort. Vieille mes mots vivent au dos de tous je crois à la curieuse rencontre ils me parviennent échardes ils filent morts-nés contre mes joues si peu rondes ils brûlent ils se déchirent et se noient dans la plus noire des encres. Celle cette souche ramassée doucement ce galop offert. Nommé la terre qui glisse de paume jusqu’à sol, de grelot à roseau dos au bruit de l’animal qui court Le doigt majeur est celui du rêveur. Nomme le coup de langue sur le genou de chaque jour. Ici ne sera plus jamais l’endroit. Nomme l’endroit. Une chierie plutôt nous finirons par nous y habituer. Coasse siffle la boue de chaque détresse nomme celle qui te ressemble, rien d’autre le murmure de ce qui reste je sais attendre je sais me taire soulier à deux mains morte aventure, d’une ligature, la caresse sur l’arête de peau, jusqu’à rompre. Proche des tourbières, marchant. A coudre mes propres vêtements. Chaque doigt de main et pied veillant au-dessus des chevaux. Toujours ces écorchures d’entre les murets de schiste ce peu de terre fertile au plus étroit du rebord des lèvres, nouvelle bataille nouvelles fleurs. Une poule sans tête est toujours sordide. Continuer à vivre même pourriture un baiser ou quelque chose de plus. Je t’entends comme je t’entends mieux respirer. Chaque année les renoncules et je reste patiente mes petites glaires se nourriront de ce rhume mal soigné. Au creux des mains je sépare la terre et je sépare les feuilles Je garde la terre mélangée au crachat je salis ce que je déteste le fusil le chien qui aboie le vêtement de pluie les traces sur les sentiers de ceux qui ne sont plus respectables je les efface ensuite un pas suffit la terre remuée par les sangliers et les arbres mutilés par les cerfs parfois l’ombre lorsque je marche mon sexe quand le sang ne coule plus les couvertures de laine protégées avec du papier marron. Nomme méchamment gaie. Le feutre de Joseph le sac en bandoulière de Samuel la torpeur d’Eugène la folie de Francesca. Nomme méchamment gaie, je trace au charbon la danse de Paco, celle de Paolo. Rien d’autre que ces prénoms dans ma bouche je guette leur chant, terriblement je trace à la craie là où tes cheveux de jeunes filles sont enterré. Chaque peau morte chaque cheveux coupés près d’un collet, sous les planchers, je cache encore des étoffes et un morceau de fer. Les morts n’ont que faire de nous. Je me souviens de tes gestes crasseux je baise tes mains je baise la terre sur tes mains un tremblement doux l’oiseau niche dans la machoire du rat celle dit, vieilles gorgées d’amertume tu avalerais la bête avant d’avoir pu empoigné le couteau. Enfant je m’enroulais dans les bras de mes parents. J’étais bien moins maigre que ce que les gens imaginent. Maintenant, vous deux, n’imaginez plus. Enfant je mangeais de la viande crue. Celle, enfant tu me donnais tes vêtements et j’habillais les épouvantails papa riait. Enfant tu courrais près du charnier tu y cueillais les renoncules. Nommé les visages dont tu parles sans cesse les mots brefs suffisent les mots crevés suffisent. J’ai du charbon sur la langue trop de jours passés épiant ces visages au garrot de toutes ces silhouettes allonger la nuque ma robe et la lourdeur de mes hanches entre terriers souches et arbres morts. Nommé étonnement beau ce que je vois est sans intérêt ce qui n’a jamais été aussi beau. Mille choses, ces longs bâtons, quelles mains creusent la gorge. Recouvre tout. Ces arbres secs coupés à un mètre de hauteur, ce dernier chien, ces femmes squelettiques ces corps pourris tout se respire ces quelques-uns uns dans la pénombre de leur chambre les rires de peu d’heures, des anatomies se dévorent des anatomies essentielles ces corps ouvriers qui arrachent la mousse de chaque pierre comme d’une autre, et le désordre de l’amie maigre, et cet autre qui portait sa fourche dans le dos à la manière d’un archer, joues haves, ces fleurs comme heures touchées, mon cœur sous ma langue et ma langue n’embrasse aucun de ceux-là. Je conjure mes peurs me nassent le vol et le bruit des envies, toujours l’esquisse toujours l’étreinte presque arrogante, ces belles choses déchirées et le cri sur l’écorce, toujours la joue de moins en moins ronde et toujours ce cri, je bouge encore salive d’avance ne rien troubler c’est bancal que de recevoir un coup de bâton ferré, à la gégène les mots que l’on déplace, la paresse une mélancolie, têtes coupées et le champ qui doit rester aussi vert et aussi vide qu’il était auparavant, c’est bancal quand la terre glisse sous des chaussures trop neuves mille autres choses résistent constamment, je murmure monotone. Mille choses. La vermine use la dentelle l’ammoniaque use la peau l’amiante tua mon père les vomissures embellissent les pires mensonges, de l’usé, il faut réjouir toutes les anciennes souches. La rude sensation la tentative simple sur la peau crue j’entends monter les voix, voici et ceci sont mes fêtes barbares je bouscule mon front idées trop fières aucune tombe ne sera sculptée pour le lièvre mort, le portrait de demain : bègue parmi les arbres. Aucune patte ne sera coupée pour satisfaire d’idiotes croyances. Pas un vêtement ne sera échangé de dos trop vite trop vive pour le regard marche encore entre les débris de tempête la fanfare est muette entendez le silence de l’archer plus rien pas même le bonheur des plumes dans les feuilles épaisses pas même le signe de présence d’une fouine ou d’un lièvre que Joseph aurait relâché, des chiens sauvages, du sperme sec, des viols toujours. Et dans la foret le plus souvent joyeusement, le seul bruit des mains sur ma robe, le seul bruit des mains sur ma robe. Toutes ces choses nommées. La langue est une truie et la bouche une porcherie. Ce que l’on veut dire n’est jamais ce que l’on dit. Ce que l’on mange n’est jamais ce que l’on chie. L’inventaire pleure les objets qui ne sont pas morts. Le corps respire et le vin assomme. Celle, regarde je m’appuie. Mes douleurs ç l’aine ont disparues. L’enfant m’emmène plus proche des chemins crotteux je bouscule férocement pierres roches branches je raconte et je ris à l’ombre ma voix salie ma bouche je couds de grandes ronces entre elles des peaux d’oranges entre elles je couds mieux les manteaux je serre mieux les couteaux mieux lorsque mes cotes redeviennent fragiles ne reste-t-il qu’un silence pour tuer ces trop courts hivers. Des pierres trouvées accompagnent le chemin pour venir chez nous, depuis peu je les éparpille je les nettoie et les disperse selon leur poids et selon ma force je reviens ensuite à chaque emplacement et dispose au mieux des boutures, je veux effacer nos humeurs et notre présence. Vieille, la lune tonne près de l’os, mains soleil contre paume, nommer d’une seule traite ; ce désordre à la verticale de la poutre, ce que tu peux nommer, folle, nomme ce tu as laissé, des trous comme des œillets le vide pour eux et l’étrangeté pour moi. Ce désordre à la verticale de la poutre. Folle. Nomme ce que tu as laissé. Des trous comme des œillets, le souffle, le vide pour eux et l ‘étrangeté pour moi. Rire en relevant légèrement le bas de la robe, belle nudité. La vraie contrainte donne un sourire idiot. Vieille, je parle de ces ombres sèches à la jointure de mes cuisses. Mon ombre est si petite. Je parle d’un rêve où la main frotte la cuisse. Je parle d’un rêve où l’enfant pisse sur des friches. Je parle du lapin de Joseph figé près de la petite fille. Je parle d’un dos. Je parle de mon amour de mon amour qui tambourine dans son cercueil. Je parle mieux, je crie mieux qu’une vieille. Se passe une main contre le bas-ventre, ces voix aux fantastiques fourrures. Nomme mal. Aussi longiligne qu’un arbre. J’étais aussi longiligne qu’un arbre. Des printemps ont passé. Des dos se sont adossé et des couteaux ont gravé les écorces. Vieille, rien de ce que tu imagines rien de ce que tu imagines. Pardonne. Rien de ce que tu imagines. Pardonnée. J’aime les mots simples et les couleurs rondes comme des couleuvres. Nomme. Je saigne parfois. Jamais obscène. Les yeux baissés. Inviter pleurer aimer ces mots étranges. Une comptine. Couper la prèle qui envahit les fraisiers. Un chien aboie mieux qu’un homme. Un lambeau de voix est meilleur qu’un coup de botte. Indicible. Indicible. Nous disparaissons doucement. Bien volé bien gagné. Des gestes avec le même caillou dans la chaussure. Vieille, pour dire gaiement les choses tristes je me moque d’être impudique. Crache en l’air et calmement laisse retomber l’humidité sur le visage. Juste vivante. Chantonner est meilleur qu’un coup de botte. Nomme le même arbre. Je parle au ventre au doigt fin le périmètre au sac l’ongle et l’étoffe aux heures silencieuses les gestes qui troussent la sueur du vêtement. Engourdir la bouche. Engourdir la cicatrice sur le visage que le sommeil précise. Je déroule le lichen et nourris la peau de ces parures d’arbres.Vieille, le dormeur brûle mieux qu’une souche. Pliera ira et lèchera les premières fleurs. Nous crachons de joie les ronces nettoient les chevilles. Nomme le petit sommeil. Nomme la rouille des robes. Les traces que l’on ordonne. Mes ancolies. Mes chiens jaunes entre veille et douleur de chevilles. Je crache sans mentir, sur le front, la peau laisse dire combien d’un mot à l’autre l’homme aux lèvres pointues nomma l’ennui, le poumon et la certitude du couteau planté. Je balafre mon terrier, je tire la jambe, je ne fixe plus la robe chevillée au buste. Je pleure ce que j’avais souhaité. Je ravive les prénoms concassés. Chaque jour je prolonge la vie de ces pensionnaires. J’aime le chemin, le ciel noir et la chute yeux ouverts. J’habite la terre. Je glisse paume jusqu’au sol. Mes lèvres martèlent. Mes lèvres n’appellent aucunes paroles. Dire est-ce retirer la racine des choses. Nomme les saisons. Plein vent froid ciel de nouveau-né, peu de gens dont l’ombre intéresse la boue sur les joues de deux amants. Et toi. Cohorte des mouches autour d’une brebis morte. Surtout se taire. Surtout se nourrir des morts. Toujours un oiseau toujours un temps pour l’ivresse. Emprunte l’automne mûris sauvagement ici les heures douces et splendides ici les pages ouvertes tachées de vin. Boire seule à hauteur d’hommes, et le sommeil à foison, lentement plus lent lentement vers une vraie colère lentement. Cinq mouches depuis ce matin et le bruit des doigts qui glissent sur le carreau. Défendre autre chose. Ici vivent des etres humains. Ici vivent des mouches et des etres humains. Ici est la saveur clandestine. Ici est la saveur de la terre mouillée. Ici est la saveur du silence si je ne réponds pas. Ici est la saveur des petits cailloux que je glisse dans ma bouche. Je pleure et je raconte. Je ne réponds pas aux livres. L’appeau en bouche je ris et le rire m’ignore. Des galets jusqu’au seuil de la maison. Des corps arrachés. Du visage aux cheveux. Je n’oublie rien de ces mains que l’on prend à la rencontre du triste. Vieille, ce que je sarcle ce que je bine ce que j’arrache, ce que j’espace ce que je plante. J’ai la bouche humide. De la neige à pleine bouche. Etions les seuls à construire ce cloaque sous les claques du vent. Avec les mains nous existions entre deux mottes de terre. Je me lève et mes pieds sont froids. J’ai égaré la parole. Cinq doigts et une seule violence. Je rogne et c’est trop laid. Je suis vivant. Vieille, encore à téter son nombril. Les seins trop lourds étourdissent. Préférer mieux les mamelles maigres. Je me souviens peu. Je rode tout contre. Le vide et la vie. Je suis redevenu l’enfant devant sa lente fanfare lancinante. Je suis chat et je rode tout contre. Il y a des ailes à mon manteau. Il y a des trous à ma mémoire. Il y a du mépris sur ma langue. De la folie chuchotée. Vieille, cesse donc. Friches et friches. Friches de la guerre nous ont ramené sans tête. Vrai. Si vivants. Toujours à questionner. Vrai. En découdre. Je frappe ma tête contre le ciel. En découdre. Entre les fleurs et les cailloux du jardin. Entre la pommette et l’œil, ces quelques rides d’enfance. Des sales mots il faut des mots sales. Les dernières traces. Le col vif d’une chemise sale. Ce soulier qui n’écoute plus le mal de pieds. Qui fer forge. L’arbre. Oui l’arbre. Muet. Le cœur de l’arbre n’est pas muet. Ce n’est plus ma langue. Le cœur de l’arbre n’est plus ta langue. Enfant-écureuil enfant-éclaireur j’étais un de ceux-là. Un enfant rapide. Un enfant pas très délicat. Vieille, affublé à la hâte tu ne prenais jamais froid l’hiver. Une herbe sauvage ne fait rien regretter. Dans ces appartements abandonnés je retrouvais les traces de tes passages . Tu chantais seul reprenais ces airs entendus je ne sais où. Des jours entiers à regarder la pluie arrondir les flaques. Des jours entiers seuls. Des jours entiers à poser les deux seaux sous l’allure des fuites. Des jours entiers à capter le silence. Des danses simples. Des gestes qui avaient la déglingue du mouvement. Les bosses la chair d’un même œil et tu frémis. Le désordre. Ta demeure. Le cœur. Sauvagerie dans mon cœur. Il pleut là bas. Il pleut sur le chant de tournesol. Ta voix est plus douce. Tes yeux puis je baisse la tête. Nous dépasser. Ou sombrer. Nomme debout. S’endurcir les mots. Plus sombres mots. Nomme le ravage sous les mèches. La part sombre, les bosses sur mes tibias dureront plus qu’un cri. Je joue loin des enfants. Connaître la marche sur les arbres. Un couloir exigu sur lequel tes pieds se hasardent. Un chant. Mon cœur bat dans peu de chaleur. Je ne sais pas. Un chant glisse sur l’ombre des branches et sur l’ombre des feuilles. Nous avons usé nos souliers ? Deux trois mois pas plus avant d’en trouver d’autres. Nomme la peur. Nomme ces idées qui pourrissent le cerveau. Mère et fille. Nous sommes vivantes. Ces obsessions te mangeront le cerveau. Nomme la peur, reste ombre. Chaque chose sera nommée. Chaque chose en dépit de tout. Pour tous ma bouche ouverte. Pour tous les racines . Ces mots ne se taisent jamais. Tout le mal. Ces seins fripés ne valent plus triplette. Gibier. Je n’irai plus embrasser les hommes jeunes. Reste les écorces. Reste les cailloux humides d’urine. Reste ma fille et toi, pauvre tête en désordre. Tout le mal sera nommé. Une chose terrible, maman. A marcher chaque nuit et revenir, comme l’on camisole le silence, cheveux défaits insiste le vent. Boire ce vin dont les ivrognes témoignent seuls. Ces ravages à être autrement . A s’allonger sur quelques souches ou quelques sacoches usées. A caresser les oreilles d’ours. A chahuter les sons qui sortent de la bouche. A marcher toutes les nuits et revenir, comme l’on ouvre le silence, cheveux défaits insiste le vent. Nomme plus doucement. Sur mes cheveux, glaise glu, cendre, quelques flammèches. Mes gestes se répètent en d’innombrables fêtes lentes. Il me plait d’être sans fardeau. Il me plait de répéter encore les mêmes gestes. Il me plait de frotter mes souliers et de ne pas faire briller le cuir. Il me plait de m’occuper de celui-ci-sans-mémoire. Parmi ces morts. Autour des vieux sourires. Entre le linge étendu. Je vois mordre les saisons. Parmi mes morts. Oh le repas frugal. Encore à brûler. Encore brûler les champs. Les nuages disent aux yeux donneront mieux plus tard. Parmis ces morts. Aller vagir ailleurs tandis que d’autres enfantent. Avant la pluie. De l’amie vêtue du manteau aux motifs noirs et blancs. J’étais effrayé. Je me souviens de ton premier baiser. Je buvais ce vin cru. Le soleil réchauffait peut-être tes lèvres. Nomme le premier baiser. Je me souviens de la première sueur. Front contre front le premier miroir un champ et la bousculade c’est si peu de savoir c’est si peu de se rafraîchir c’est si froid de se noyer. Rumine ruminé. D’un doigt la courbe de vêtement coutures et boutons. Je me penche en avant, arc-boutée sur la pauvre tête malade homme mal dessiné ivre lorsque commencera la tuerie plus jamais vivant jusqu’à devenir celui au manteau informe, pas de plus beau spectacle qu’un visage, oh, la fatigue des pierres, pas de plus bel orage que la fatigue d’un visage. Chaque voyelle maigre est un chant sur les pierres. Chaque voyelle . Chaque voyelle courre à grands traits. Loutre. Ceci est la folie d’une loutre. Regarde la colline. Rien ne nous avale. Regarde le troupeau. Depuis qu l’on nous dévore. Sève sang la respiration dans les fougères voici les haies voici les bosquets mon herbier à pleine bouche je salis les heures je pétris mai et les vieux enclos le cou plus haut que le pieu tout au long du sentier floraison et arrogance dans la gorge ce que je vole le tambour sur la paupière les petits lieus où l’on voit mieux le ciel les cloisons derrière nos sommeils drap aux coins caillouteux, plus doux, l’omoplate devenu clôture de ton bras. Nomme le silence de ces deux Murs. Entends te s mots entends tes phrases d’une pelure de mots le tranchant de la main. L’autre femme. Avant. La rouille. Le couteau retiré. Contre le tronc pourri. Crève sauf l’enfant. Avant les yeux. Le charbon comme baies. Le surplomb des entrailles. La simple odeur. Les doigts morts comme aux pires journées. Ce qui affuble le poumon. Tout animal. Sera répète. L’empire en contrebas de l’oreille. Tressé du pire. Pudiquement. Le baiser et la chevelure inverse présence que l’on rogne jusqu’au sang jusqu’à rompre sans avaler le ciel la main immense devant le visage et la nudité des mauvaises herbes de paume jusqu’à sol le petit sommeil, folie d’une loutre. Fou de ce que nous nommons. Résonne encore. |