maison de la poésie en Guerre
C’est comme ça avec Claude Guerre : une idée lancée, et ça devient un colloque sauvage, qui se construit en cours de route...
Nous l’avions annoncé d’abord sur remue.net : neuf questions posées à la poésie ivre d’oralité.
La première semaine du colloque s’est transformée l’autre soir en hommage à Daniel Znick. Claude Guerre annonce le programme de cette deuxième semaine, impromptu et riche...
Fin provisoire samedi 28 octobre par un meeting poétique. En tout cas, une participation et un rassemblement qui prouvent combien ces questions sont en partage, et témoignage de confiance en Claude Guerre pour renouveler et relancer le théâtre Molière, outil collectif d’expérience ouverte et de recherche dont nous manquons tant, quand les associations d’écrivain s’endorment.
L’occasion aussi d’annoncer le nouveau site de la Maison de la Poésie, en spip comme le nôtre, donc avec actu, ressources sonores, un site d’intervention...
Ce que nous cherchons ensemble, est-ce de la vie ou du spectacle ?
par Claude Guerre, directeur de la Maison de la Poésie, reformulation des 9 questions
Dans nos pays, la poésie s’écrit dans les livres. On la récite à l’école. Chacun porte dans sa mémoire secrète ses trésors qui parfois paraissent au grand jour. Alors, la poésie se dévoile, elle fait sa cérémonie, elle se dit. L’acte de dire la poésie n’est pas de nature. La poésie est une affaire intime. Dans le fameux for intérieur, disputent ensemble l’extraordinaire exigence, la folie lyrique, le goût du dévoilement et le goût du secret. La poésie est un bijou qu’on porte dans les grandes occasions.
Alors, comment se fait-il qu’on assiste depuis vingt ans à un renouveau de la lecture publique ? Un désir de participer à la scène théâtrale ? Une tentation de prosélytisme de la part des poètes ? Je n’y crois guère. Une intuition chez eux que, dans la grande catastrophe annoncée de la fin du monde, leur parole trouve une légitimité qui s’était enfouie dans les solitudes ? La croyance que le travail poétique transcende le chaos ? Je veux ouvrir les nouvelles saisons de la Maison de la Poésie en esquissant les lignes souterraines profondes de ce désir général d’oralité.
Quand elle monte au front, la poésie, alors tous les lieux sont bons à prendre et elle les prend : salles des fêtes et théâtres, rues, métros, marchés. Radio. Petits cirques et stades de meeting. Elle prend le micro que personne ne lui tend. Elle s’érige en jambes, la bouche grande ouverte, elle beugle, elle susurre, elle chante.
Je dis volontiers que la poésie constitue une théorie du théâtre. Sa parole nomme. Sa facture hors-fiction exalte un lieu humain pur de tous, des naturalismes. La poésie laïque dispute avec la parole religieuse, elle croise les engagements politiques, elle participe des utopies, elle fréquente assidûment l’apologie, elle tisse des rêves nouveaux d’humanisme, elle aime croiser le fer avec les autres arts de la scène, la musique au tout premier chef. Et voici la poésie et les poètes embarqués dans une pratique nouvelle. Sans connaissance des arts de la scène, sans grammaire de la représentation publique, avec leur foi seule, les voilà qui convoquent le public. Et il vient. En masse. Il existe un grand public pour la poésie, un grand désir. Nous le savons tous. Nous l’avons expérimenté. Nous le connaissons et nous ne le savons pas.
La Maison de la Poésie s’offre à être l’atelier de cette oralité que la poésie et les poètes appellent. Cet atelier va s’inventer chez nous en forme de laboratoire de recherche mais aussi en une sorte de forum de rencontre. Cet atelier concerne les poètes et les amateurs de poésie, les enfants et leurs pédagogues, les comédiens, les musiciens, les penseurs, les peintres… Sous des formes diverses, il courra en permanence dans nos murs au cours des années qui viennent.
Et voici qu’il s’ouvre aujourd’hui sous la forme d’un colloque actif, les neuf journées de l’oralité. Les poètes débattent. Ils s’adjoignent des acteurs de la scène, voix et talents exercés, musiques « questionnantes ». Avec des metteurs en scène, avec des esprits critiques, avec des animateurs de revue, des universitaires, des philosophes, nous passons à l’acte dans la liberté de la réflexion et de l’improvisation. Un public amateur actif nous rejoint le soir. Le fil de cette parole collective est enregistré par nous et publié, de façon sonore, sur notre site internet et en partenariat avec France Culture sur la Web Radio.
Établissons ensemble le cahier des charges de l’oralité en poésie ! Avant de prendre la route pour l’aventure nouvelle de la Maison de la Poésie, nous posons les questions de ce travail au sens le plus noble, questions lucides et franches : est-ce que l’auteur dit son texte ? Ou bien l’acteur ? Comment se fréquentent-ils ? Quel est le travail préalable nécessaire ? Faut-il lire ? Ou bien savoir par cœur ? La bouche qui parle éructe-t-elle ? Ou bien retient-elle ses mots ? N’y a-t-il pas plus clairement encore quand on les dit des poésies dans la poésie ? Quelle place à la poésie purement orale ? Existe-t-il une poésie d’improvisation ? Que perdons-nous dans la linéarité du temps ? Que gagnons-nous dans la communion collective avec le poète ? Voici qu’un musicien se joint à nous, quelle est sa place ? Entre ? Sous ? Dans ? L’écriture ? Illustre-t-il ? Fait-t-il écho ? Le recevons-nous comme un frère ? Ou la musique n’est-elle qu’une parure de plus dans notre orgueil ? La poésie se chante-t-elle ? N’est-elle pas un chant toute seule ? La chanson, est-ce de la poésie ? Et ne parlons pas des slameurs ! Et si nous en parlions ? Et si nous les laissions parler ? Mieux : si nous nous rencontrions ? Si nous avions à nous apprendre ? Une seconde fois : existe-t-il une improvisation poétique ? De tradition dans certaine culture ? Et dans le chaos des villes modernes ? Questions d’aujourd’hui et questions de toujours : l’action de l’oralité attente-t-elle à la lecture intime solitaire ? Quel besoin de se réunir autour de la parole publique quand nous étions réunis séparément par la lecture du livre ? Désirons-nous ? Créons-nous un mystère supérieur ? Est-ce que l’épopée gagne à être mise en souffle ? L’apologie en rythme ? Est-ce que la sororité de la poésie avec la philosophie s’entend à l’oreille ? Faut-il entendre les langues de la tour de Babel, qu’est-ce que traduire ? Se méfier de la transe du seul diseur ? Avons-nous encore peur de la catharsis ? Artaud l’emporte-t-il sur Brecht ? Tout acte collectif n’est-il pas une cérémonie ? Qu’en est-il de notre goût de la transfiguration ? La poésie dans les stades ? Notre désir d’humanisme peut-il se rassasier ? Comment se réunir vraiment dans la forme marchande du spectacle vivant d’aujourd’hui ? Ce que nous cherchons ensemble, est-ce de la vie ou du spectacle ?
Claude Guerre
Mardi 24 octobre :
La question de l’amour au cœur d’un humanisme nouveau le geste généreux poétique, et la geste amoureuse, érotique, sans cesse recommencée :
mystique, érotique, humanisme
avec Zeno Bianu (poète), Guy Goffette (poète), Emilie Beauvais (actrice), Charles Dobzynski (poéte, rédacteur d’Aujourd’hui Poème), Sophie Loizeau (poète), Michel Cazenave (poète), Eloi Recoing (poète de la scène), Juliette Heymann (actrice, metteur en scène) Jean Pierre Siméon (poète), Gérard Etienne (metteur en scène)…
mercredi 25 octobre :
la question de la prophétie
la question apologétique : dévoilement, apocalypse, prophétie
avec Bernard Heidsieck (poète), Christophe Brault (acteur), Leslie Kaplan (auteur), Elias Sanbar (traducteur), Christophe Marchand-Kiss (traducteur et poète)…
jeudi 26 octobre :
la question de la musique : du hörspiel au rap, les poètes sonores, dire-chanter
avec Gérard Siracusa (musicien, compositeur), Laurent Vacher (metteur en scène), David Lescot (musicien, écrivain), Jean-Michel Espitalier (poète, revue Java), Christian Zanesi (compositeur, GRM), Jean Pierre Balpe (poète, animateur de la revue Action Poétique), Laude Ber (poète), Enzo Cormann (écrivain), Claudine Charreyre (chanteuse), Daniel Deshaies (compositeur) André Dion (compositeur) Hélène Viaux (chanteuse), Dominique Devals (chanteuse), Jean Schwarz (compositeur), Frédérique Wilf-Michaux (chanteuse) Guillaume Durieux (acteur)…
vendredi 27 octobre :
la question des langues
la poésie dans la tour de Babel cosmopolite, dire, traduire, écouter
avec Bernardo Schiavetta (poète), Jean Portante (poète), Gabriel Garran (metteur en scène), Sheamus Dagtekin (poète), Heinz Schwarzinger (traducteur), Vivian Lofiégo (poète), Henri Meschonic (traducteur, philosophe), Jean Metellus (poète), Luis Mizon (poète et animateur de la revue Confluences Poètiques), Ma rie Claire Blancquart (poète), Azadé Nichapour (poète), Myriam Montoya (poète)…
samedi 28 octobre (exceptionnellement à 17 heures ) :
meeting poétique : la place de la poésie quand on la dit dans le monde.
Avec André Velter (poète), Jacques Bonnaffé (acteur), Jacques Darras (poéte), Laure Thiery (actrice) Claude Ber (poète et Inspectrice d’Accadémie), Yves Nilly (auteur et secrétaire SACD), Christian Rist(acteur, enseignant au Conservatoire de Strasbourg), Collette Seghers (écrivain) Suzan Sontag (centre culturel suédois), Jean Pierre Siméon (poète et directeur du Printemps des Poètes), Guillaume Durieux (acteur), Julie Brochen (actrive et directrice du Théâtre de l’Aquarium), Véronique Bellegarde (metteur en scène), Marc Delouze (des Parvis Poétiques), Nadine Eghels (Textes et voix), frédérique Wolf- Michaux (comédienne et chanteuse)…
Rendez-vous à la Maison de la Poésie à 20 heures (sauf samedi à 17 heures), 157 rue Saint Martin dans le 3ème arrondissement.
Entrée libre