Pare-chiens

(La souris saute sur le chien.)

« Ixion, d’après les poètes, est ligoté sur la roue, extérieurement à la circonférence. Ainsi « circulent » les hommes-serpents dans les foires, la nuque aux talons. Notons que les yeux d’Ixion sont tournés en dehors, et ainsi reflètent le monde, de même que le reproduisent les lentilles d’un cinématographe Lumière. »
Alfred Jarry, La Mécanique d’ « Ixion », 1903.

A Laval, ce grand parking aurait pu être aussi une « fourrière » : on y laisse sa voiture comme son chien, est-ce la voiture qui garde la bête ou le contraire ?

« Esprits animaux », disait un philosophe en 1637. Le chien se met souvent à la place du conducteur de voiture absent, sauf quand il s’agit d’une conductrice !

« La Société protectrice des animaux a épargné, zoophiliquement, aux chiens qualifiés tournebroches qui, chez les couteliers, ambulent dans l’intérieur d’un tambour qu’ils actionnent, une partie du labeur d’Ixion », remarque Alfred Jarry dans ce texte aux spirales délicatement ciselées.

Les chiens tournent maintenant en rond à l’intérieur des automobiles mais ne fournissent pas encore d’énergie aux moteurs ; ce serait pourtant écologique. Leur agitation est vaine, malheureuse, mais ils finissent par se calmer au bout d’un certain temps.

Parfois, on remplace le chien par un bébé, si l’on en a un sous la main. Cela peut dissuader les intrusions, paraît-il. Demain les chiens, a écrit Clifford Sidmak. Chiens noirs des seventies, a composé François Bon.

Le problème est souvent de retrouver ensuite son véhicule parmi des centaines d’autres, quand on a oublié la rue ou si les emplacements ne sont pas numérotés. Heureusement, les chiens aboient et la caravane se déplace.

« La mémoire, ce chien d’arrêt de l’esprit, est aussi un pareil cercle. Quêtant tout le long de la courbe des circonvolutions limitées par la sphéricité du crâne, elle repasse par les mêmes points… et rapporte. »

Mais allez savoir ce qui peut se cacher aussi à l’intérieur d’un fourgon qui ferait bien dans le décor d’un polar de Jean-Bernard Pouy, sauf en examinant, à travers son pare-chiens, le vide de la cabine ?

« Le chien qui suit son maître, et l’homme perdu dans un désert sont Ixion. »

15 mars 2007
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