Monostiques paysagers [7]


Le 18 février 2012, Rentilly



9 h 50

la terre remuée mouillée les feuilles des charmes restées sur branche du dernier automne sont de la même teinte brique




10 h 41

la troupe de coureurs est bavarde et pas moins les oiseaux dans le cèdre qui disent on dirait bien : « Bonjour, le jour ! »




10 h 51

les engins des planteurs, sangliers à moteur, ont dévasté le tapis vert tout saupoudré d’échardes, déchiquetis de tilleul



*



Le 22 février 2012, Rentilly



9 h 45

dans la voiture, « véhicule autorisé » de Laurent, longer le mur trop vite (pas tant que ça) et pénétrer comme un châtelain




10 h 05

comment avais-je pu ne pas voir encore les quatre épis de faîtage à poterie du pavillon Carcat, l’un d’eux qui s’incline ?




10 h 25

regardant accrocher des monotypes titistes sur les murs de la salle des Trophées je vois le feu rouge fixe entre les lauriers




11 h 47

mer de buis devant, vert wagon dominant et tendresses de jaune (persistance d’automne), le chêne des marais dit l’hiver




11 h 49

le labyrinthe fleuri fleuri ne l’est guère, fantôme horizontal à la droite du févier d’Amérique, lui-même fantomatique




12 h

le côté de Guermantes est rural, les clochers successifs celui de Bussy celui de Guermantes et tout de même deux grues




15 h 45

la cour carrée demande à devenir forum, ce qui sûrement ne manquera pas, pourvu que l’air se réchauffe : il s’entraîne




15 h 49

« ouverture de saison le 4 mars », nous sommes donc dans une saison close — mais quelle injustice envers l’hiver !



*



Le 23 février 2012, Rentilly



9 h 15

le ciel est un tampon de ciel, sans relief ni couleur, qui pèse sur les cimes des arbres, mais tout compte fait assez léger




10 h 31

les ardoises s’huilent d’humidité grasse et de pente en pente et de toit en toit, chien assis, poils de chien en promenade




10 h 51

double porte porte porte porte vitrée fenêtre porte vitrée fenêtre avant le triangle rouge indiquant Remises Ateliers




14 h 23

l’if planté dans son pot de buis qui sent le buis étire une de ses branches vers la maison aux volets bleus cyclopéenne






Jacques Jouet









3 mars 2012
T T+