Atelier #4 : L’exil a le goà»t, l’odeur, la couleur de...

Nous avons écrit autour du thème de la pièce de théâtre intitulée « Fille de  » de Leïla Anis, que nous allons aller voir prochainement àla Maison des Métallos : http://www.maisondesmetallos.org/2013/12/20/fille-de. Cette pièce est le récit d’un exil ou plutôt d’un devenir, celui d’une jeune femme emportée adolescente loin de son pays d’Afrique de l’Est vers la France.
Voici comment la pièce débute : « Mon exil porte en lui tant de contradictions que j’ai toujours préféré le taire. Pourquoi raconter que je suis étrangère de partout ? Ni d’ici ni de là-bas, ça intéresse qui une ï¬ lle de l’entre-rien ? Pourtant aujourd’hui je décide de dire…  »
Dire l’exil, c’est quoi ? Pour nous quel goà»t, quelle odeur, quel musique, quelle couleur, quelle matière ànotre exil ? En utilisant vos cinq sens (goà»t, odorat, ouïe, vue, toucher), nous avons parlé de ce que l’exil évoque pour nous.

Voici quelques extraits :

 L’exil a la couleur des flamboyants que je n’ai jamais vu en France avec ces fleurs bien rouges et vertes au milieu, avec ces feuilles fines et fragiles.

 L’exil a l’odeur de mon enfance
Un jour de la semaine dernière quand je suis rentrée du jogging, j’ai envoyé un texto àmon amie : « Aujourd’hui l’odeur, ça m’a rappelé mon enfance, c’est difficile àexpliquer quelle odeur exactement, peut-être ce sont les plantes, l’eau du canal, la vapeur de la chaleur parce qu’il faisait humide et chaud, tout s’est mélangé et ça a composé un morceau de souvenir d’un été de mon enfance en Chine avec mon père. On était sorti en forêt pour chasser les oiseaux, ma mère nous attendait àla maison et préparait le dîner. Peut-être cela n’a rien àvoir avec l’odeur àce moment, peut-être c’est juste que mes parents me manquent.

 L’exil a l’odeur de la terre qui se dégage quand il pleut après un soleil de plomb, une odeur de mangue pendant la saison car chez moi dans la cour de mes parents il y a beaucoup de manguiers et comme les mangues mà»rissent en même temps, parfois elles tombent en grande quantité par terre et ça dégage une odeur que je ne retrouve nulle part, une odeur de sauce simple et goà»teuse qui se dégage des marmites un peu partout parce qu’en général on cuisine en plein air comme il fait beau tout le temps, comme ce n’est pas toujours clôturé, en général l’odeur de toutes les cuisines se mélangent, et puis on ne retrouve jamais une fois que l’on a quitté le village le goà»t de la cuisine de nos mamans, pourtant parfois elles n’ont pas beaucoup d’ingrédients mais quand elles cuisinent ça a un bon goà»t qu’on ne retrouve pas, peut-être est-ce l’eau ou les herbes qu’elles ont cueilli dans le jardin, une odeur d’humidité pendant la saison des pluies et une odeur de chaleur intense pendant la saison sèche, une odeur de bien-être avec la convivialité qu’on ne retrouve qu’en Afrique.

 L’exil a le goà»t d’un plat que je n’ai jamais mangé dans ma vie. Tout àcoup me voici devant cette nourriture que je ne peux pas manger mais comme il n’y a pas d’autre chose que ce plat je suis obligée de le goà»ter, mais j’ai peur de le manger et qu’il me donne des allergies, donc l’exil pour moi c’est quelque chose que je n’attendais pas du tout.

28 mars 2014
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