Formats Belgrand

FORMATS BELGRAND

I


Neige n’était pas neige n’était pas
le petit ruisseau strident à mes pieds
était
ce frisson derrière moi
Tu passais
comme souvenir Nous étions
proches
et lourds
 

 

Pas de vrai rayon de lumière rasant la joue telle
une caresse en vrille et la menace
Pas de tendre nuit rose ou de vaisselle occupée à l’inox
Mais la voix de silhouette qui chuchote toujours par la fenêtre ouverte
Tu sais

Ou sous mes seins nus quand dépliée sur le canapé je ne te regarde pas Je regarde
à l’intérieur des choses et jamais
dans le livre ouvert


Je ne suis plus un livre ouvert

 

 


Parcouru des chemins de fougères où libellules crues m’ont murmuré des secrets
purs et durs
Or le tracé m’oriente
Il n’y a pas de neige
Il n’y a pas de neige Pas de rambarde      non plus
au bord de l’autoroute

 

 


Tu fixeras
derrière moi le point d’origine
qui te convient le mieux
Tu regarderas les bruits qui jappent
de la cimaise sans jamais rien retenir
Tu pourras
taillader      ce que tu veux J’aurai
vécu
du beau reflet au moins

On s’en voudra pas
On s’en voudra pas C’était le soir et souvent
tu ne finissais pas ton assiette
Tu pensais aux amis de passage
Tu pensais rattraper quelques heures
dans le jour
C’est ballot ça passe
plus vite que le paysage
Tu sais

C’est comme s’il n’y avait plus
jamais d’avant ni d’après seulement cette lutte à mort et vague

La chanson qui te reste
et pourquoi tu fredonnes
toujours
en léchant tes couleurs
 ?

 

 

II

 

 


C’est pas le chlore c’est pas le chlore
qui me fait les yeux rouges
Baby
Oh
On dirait que je coule
Par où tu t’accroches explique-moi
Ils ont mis des ténèbres tout autour
Oh
Ça dérive vers les mondes en or

 

 


C’est noir
C’est noir de monde ici
Viens on libère
la place on fait
la planche
J’ai oublié mes lunettes ça tangue
Regarde
derrière les arbres à nu
plein de chouettes effraies débraillées à la lune
On nous guette
Ils nous auront
Ils nous auront mon cœur
Ils finiront par nous avoir
Ils nous tendront toujours
les mêmes pièges
Et c’est fou comme je tombe
toujours à l’intérieur de la lumière
et la tête la première
C’est pas ma faute
Baby
C’est le manque
de repères
C’est l’enfance
C’est ma mère

 

 


Il faudrait
récupérer les couleurs au moins
sauver les contrastes des jours
avant que ça disparaisse
Les murs
Les bords
La limite les mesures le monde qui est fait d’angles
À la limite on écoute
un dernier Bowie et on décampe
Il est mort hier
Ouais
À la limite on évite
complètement de geler
par nos cœurs
On dit qu’on vit On dirait
qu’on en serait capables
On dirait que
Ouais
À la limite Ouais on dirait qu’on y croit
Toi d’abord


Frédérique COSNIER, Février 2016 / Toiles d’Adrien BELGRAND.
Avec l’aimable autorisation d’Adrien Belgrand, Galerie ALB, Paris.
Frédérique Cosnier sur remue.

8 juin 2016
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