Fabien Arca | Ma balade lycéenne

Jeudi 23 mars 2017

Comme un touriste, je visite Vitry, guidé par un groupe de lycéens.
Expérience plutôt enrichissante.
Les lycéens sont généreux.
Ils témoignent librement.

(…)

Petit Flash-back.

Mai 2016.

Je travaille sur mon projet de résidence.

Avec Anne Delaunay (de Gare au Théâtre), nous avons rendez-vous avec Hervé, le CPE d’un établissement de Vitry. Le lycée Jean-Macé a été l’un des premiers à répondre positivement quand nous avons présenté le projet de « Cartographie de l’intime » à d’éventuels partenaires.

Hervé est quelqu’un d’assez dynamique. Plutôt enthousiaste. Ouvert. Il a été sensible à ma démarche et je me souviens qu’il a immédiatement voulu faire quelque chose.

Restait à savoir quoi.

(…)

Novembre 2016.

La région Île-de-France a donné son feu vert.
Entendez par là, j’ai obtenu le financement pour la résidence… !
Assez rapidement donc, nous avons relancé Hervé pour qu’il organise un rendez-vous avec des profs intéressés par mon projet.

Deux professeurs ont répondu : une prof de français & une prof d’histoire-géographie.
C’est avec la prof d’histoire-géographie que nous avons convenu de cette balade urbaine, parce qu’aussi ça cadrait bien avec son programme et son projet.
Tant mieux.
Autant joindre l’utile à l’agréable.

(…)

De retour au temps présent.

Jeudi 23 mars 2017

C’est le matin.
Je suis dans une classe du lycée Jean-Macé.
Il est tôt. 8 heures du matin.
J’ai déplié une carte de Vitry.
Je parle un peu de moi.
Qui je suis. Qu’est-ce que je fais. D’où je viens.

Je raconte surtout aux jeunes comment à leur âge, avec mes potes, on se retrouvait dans certains endroits de la ville, pour faire du skate ou simplement pour être ensemble…
J’évoque le souvenir des maisons abandonnées (qu’on visitait la nuit), je raconte quelques-unes de nos "errances", et comment j’affectionnais certains lieux de la ville… C’était un terrain de jeu.

La ville laisse des traces et nous y laissons les nôtres.

Je leur demande ensuite de réfléchir à une succession de lieux à proximité de l’établissement.
Des lieux qu’ils affectionnent pour une raison ou une autre.
Ils ont quelques minutes pour faire cette liste.
Puis, ils lisent leur liste, tour à tour.

À l’écoute de tous les lieux et grâce à la carte que j’ai posée au mur, on délimite un parcours avec une série de marqueurs.

L’idée est simple : j’invite à présent chaque ado à me guider d’un point à un autre et aussi à me raconter une anecdote, un souvenir lié à cet endroit…

Il est 9 heures.

Nous prenons nos affaires et nous quittons l’établissement pour 1 heure de balade dans Vitry.

Et voilà la succession de stations qui ont jalonné cette balade.

1) Le Plot devant le lycée (la clope du matin)

"Je dirais que...
Clope du matin
Un truc
Pas beaucoup
Mais elle
A cet endroit
Un petit groupe de filles
Il n’y en a qu’elle qui fume.
Les autres attendent qu’elle
L’écrase".

2) Le MAC-VAL (stage et bien-être)

Avant de parler "bien-être" au Mac-Val,
Je ne sais pas comment en arrive là
Ils évoquent la mémoire de ce jeune qui s’est défenestré
Mort brutale, incohérente.
Elle a marqué les esprits,
Laissé une trace
Dans la ville
Encore visible.

Le Mac-Val est un musée d’art contemporain. Un des jeunes y a fait son stage de 3e. Une autre apprécie la mare avec les cygnes. C’est calme.

3) Le Banc du cimetière (et jacques le SDF)

C’est un banc sur lequel ils se retrouvent.
Entre jeunes.
Ils se considèrent parfois comme des « galériens ».

Mais ça.
Et même sur le banc, il y a parfois un SDF qui vient dormir.

4) La cité Robespierre (des œufs sur la tête)

« La cité Robespierre, c’est la terreur » me dira-t-il.
Non pas parce que les gens sont dangereux, mais parce que c’est crade.
Il y a des insectes et puis des rats.
Les escaliers sont tagués.
Des ascenseurs bizarres et je n’ai toujours pas compris comment on faisait quand on habitait au 26e étage de la tour.

Et puis il y aussi ce qu’on n’entend pas sur l’enregistrement : "depuis leurs fenêtres, certains habitants balancent des œufs, des oignons, des assiettes, des trucs quoi"…

5) La place du Marché (la fontaine interdite)

Un soir d’été, ils ont ouvert les vannes des bouches à incendie. Ils se sont amusés à passer dans les jets d’eau jusqu’à l’arrivée de la police.

6) Les berges de la Seine (cap ou pas cap)

5 000 000 d’euros pour traverser la Seine à la nage ? Franchement moi je dis oui. Même pour 1 000 000 d’euros, je le fais. Mais eux, ils m’ont dit « non », parce qu’ils avaient trop peur de se noyer…

Les berges de la seine, c’est un endroit où ils ne viennent pas souvent, alors pour s’amuser, on a fait des ricochets avec des cailloux.
Fin de la balade.
Comme en vacances !
À Vitry sur plage !

(…)

Comme d’habitude, j’ai fait quelques photos.
Toujours.
Et puis capturé leurs voix.
Tout est là.
Je vous laisse découvrir les enregistrements !
Bonne balade sonore !

19 avril 2017
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