Fred Griot | Ateliers - cycle 1 - écriture
Présentation, objectifs, contenu :
Écriture et création textuelle : porter trace de ce que nous sommes, par une écriture claire.
– autour de la trace, de la tenue du journal, de la littérature comme témoignage et exploration de ce que nous sommes
– autour de la recherche d’une langue simple, accessible, claire
– apprendre à dire, à se libérer, à s’exprimer, à maîtriser ce que l’on souhaite dire, et à le dire clairement. écrire pour se dire, se livrer, se délivrer ?
– ouvrir un accès simple et « démystifié » à la littérature, par différents canaux
– impulser et accompagner dans une dynamique créative
– expérimenter et rechercher collectivement (« labo ») : Parler de création, de voix littéraires, d’intime et d’universel, échanges et débats
– favoriser une ouverture, mais aussi une confiance en ce qu’est le porteur de parole, en la valeur de son propos... en la liberté que nous avons de « prendre parole ».

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TEXTES DES PARTICIPANTS

Joëlle
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Écoute, écoute le murmure du Silence,
Tantôt angoissant, tantôt rassurant,
Sérénité, calme apaise notre for intérieur,
Éloigne de l’agitation,
Recentre sur l’écoute de soi,
Rappelle que nous faisons parti de l’univers,
Met en éveil, nos différents sens, nous rappelle que notre cœur bat,
Écoute, écoute le murmure du Silence.
AYK le 15 10 2017
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Tourbillon de pensées positives dans ma tête,
Défilé d’images de la nature issu, de mes balades,
Superposition de portraits et d’histoires de vie,
Imprégnation d’écritures dans ma mémoire,
Réconfort ressenti, recueilli au file de mes lectures.
Prisme de l’humanité imprimé en mon for intérieur tel un kaléidoscope,
Visages de toute origine continentale,
Souffrances, joies humaines,
Espérance de trouver une nouvelle voie, de prendre de la hauteur après les épreuves.
Croire en la capacité humaine de construire plutôt que de détruire ...
Au moment où j’écris ce texte, la maison est silencieuse. Il fait encore nuit.
Je suis agitée et animée par plusieurs sensations et sentiments.
C’est comme une interaction de mille atomes qui se bousculent, se cognent et demandent qu’à exploser en plein jour, pour être partagé avec autrui.
Pouvoir laisser des gouttes de positivité, dans ce monde mouvementé qui semble échapper à l’humanité.
AYK 4 h 30 du matin le 17 10 2017
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J O U R N A L
Comme il est plaisant de trôner sur une étagère parmi cent petites boites aux couleurs pastel ou bien vives. Une douce odeur règne dans la boutique. D’élégantes dames nous prennent dans leurs fines mains blanches et sentent, sans trop en avoir l’air, les fragrances s’évadant de notre gracieux emballage.
Le choix a l’air très important. Évidemment entre lait d’ânesse et huile d’argan, c’est un dilemme. Toutes deux sont douces, toutes deux sentent bon. L’une est ronde, l’autre en forme de galet.
Mais voici que la Dame admire mon emballage. Sur un beau papier glacé rose sont dessinées des fleurs de jasmin. Cette jolie fleurette ne sort que le soir. Elle embaume les patios, se pose sur une oreille, s’offre en petits bouquets que vendent les enfants aux amoureux qui vont à deux du soleil plein les yeux..
Second jour :
C’est moi. Je suis l’élue. Maintenant je demeurerai dans la superbe salle de bain aux vasques de marbre de mon hôtesse.
Délicatement, lorsque j’expire, c’est un souffle léger comme la caresse d’un pétale qui s’envole alentours. Les miroirs, sertis de feuille d’or, me renvoie l’image d’un visage aux traits purs, au sourire enchanteur. Celui de la femme dans toute sa grâce
Les jours suivants :
J’ai toujours le bonheur de glisser entre ses jolies mains. Elles me posent sur le lavabo, dans ce petit logement fait pour moi. Je mousse en micro bulles sautillantes, je caresse les doigts divins qui me font sauter d’une paume à l’autre. Un filet d’eau tiède me prive de cet enchantement.
Longtemps plus tard :
Comme le temps passe vite, comme il efface notre trace. Je ne serai bientôt qu’un semblant de savonnette. Une chose informe qui se colle au marbre comme une bernique !
Va-t-on me jeter ? Vais-je rejoindre la cohorte des bouts de savon perdus ?
Ainsi va la vie. Tout a une fin et la mienne est proche Laissez-moi encore une fois m’enivrer de l’odeur du jasmin.
M.C.A. 2017
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EXTRAIT DU JOURNAL D’UNE CHATTE NOMMÉE HERMINE
Vendredi 20 Octobre
Demain, ma maîtresse et moi nous partons en vacances.
Vous allez me demander comment je le sais. Eh bien je le sais, c’est tout.
A chaque fois c’est pareil, je ne me trompe jamais. Je ressens des picotements dans les vibrisses, un changement dans l’atmosphère, un je ne sais quoi. Aucun signe visible de préparatifs car tout se fait derrière mon dos mais je le sens. Ma maîtresse dit que j’ai la science infuse.
Samedi 21 Octobre au matin
Ça y est, je vous l’avais bien dit, c’est le départ.
Aux aurores, en douce, en catimini, ma maîtresse a chargé la voiture. Sans me faire voir je l’ai observée, puis je me suis planquée. Soudain elle m’appelle : Hermine ! Où es-tu coquine ? Je fais la sourde oreille mais quand elle passe près de moi je pousse un petit cri pour lui dire qu’elle brûle. Pas question qu’elle m’oublie. Elle se baisse, m’extirpe de ma cachette, me prend dans ses bras et me fait un bisou sur le nez. Je rechigne un peu, par principe, puis je me laisse installer confortablement dans mon panier qu’elle place sur le siège passager. Les ceintures bouclées on démarre. D’où je suis je vois tout. Pendant le voyage, je pourrai lui parler un peu ou pester contre les fous qui nous doublent. La route est longue pour arriver à la mer ! Je prends le temps de vérifier qu’on tourne à gauche et non à droite au premier carrefour. Ouf ! C’est bien ça. On ne va pas chez le véto. Je peux fermer les yeux et m’assoupir en toute confiance.
Samedi 21 Octobre, fin d’après midi
J’ai senti que l’on ralentissait et que l’on quittait l’autoroute, ce changement de rythme m’a fait sortir de ma torpeur. On ne va pas tarder à arriver. Ici l’air est différent. Ma maîtresse dit qu’il est iodé. Dans dix minutes je serai là où j’aimerais vivre à plein temps. Je miaule de satisfaction et d’impatience. Il me tarde de boire un bol d’eau fraîche, de retrouver ma litière et d’aller vérifier qu’aucun intrus n’est venu chez nous en notre absence. Parfois, certains sont par trop sans gène !
Dimanche 22 Octobre
J’ai vraiment bien dormi. Il est vrai qu’avec les années dormir est l’activité qui me convient le mieux. C’est le cri des mouettes qui m’a réveillée .Ces volatiles ne savent que rire ou criailler. Ce sont des cyclothymiques qui passent sans motif apparent de la joie à la colère. Je les aime bien, elles ont l’odeur de la criée au bout du bec et cela me met en appétit. Aujourd’hui, j’entame mon régime poisson et fruits de mer. Je sais que c’est bon pour ma santé de manger des fruits et ceux là, ils n’ont pas loin à aller pour atteindre mon assiette…rien à voir avec les ersatz en sachets qui ne sont que des attrape-nigauds !
Lundi 23 Octobre au matin
Le jour se lève. Aujourd’hui il fait vraiment beau. Ma maîtresse s’est plantée devant la fenêtre et s’extasie.
Bien sûr, moi aussi je la vois monter tout doucement cette grosse boule hors d’atteinte. Il parait qu’à cette heure, sa luminosité et ses couleurs sont époustouflantes, d’une beauté sans égale, un spectacle à vous couper le souffle ! Moi je veux bien mais cela ne me fait ni chaud ni froid. Les couleurs je ne les distingue qu’à peine. Je vois le monde en sépia un peu comme sur les photos anciennes et je trouve ça très bien .Par contre, la nuit je peux me diriger dans l’obscurité sans problèmes. Je suis nyctamère. Non…nyctalope. Ce qu’il est laid ce mot. Il manque vraiment de poésie. Pourquoi faut-il que ce soient les humains qui aient inventé le langage ?
Mardi 24 Octobre
Ma maîtresse m’a laissée toute seule toute la journée en me recommandant d’être bien sage. De toute façon faire des bêtises n’est plus de mon âge ! Pour se faire pardonner elle m’avait préparé un vrai festin.
Elle allait à Landerneau, la ville où l’on fait du bruit. Quelle idée, elle qui apprécie le silence ! Elle avait rendez-vous avec un certain pique- assiettes, non pique à sots je crois. Un peintre très célèbre parait-il.
A son retour, sur son smart phone elle m’a montré deux de mes semblables, à moins que cela ne soit le même chat ayant posé pour deux tableaux. Pas très doué le peintre ! Ce matou noir a l’air complètement ahuri. Mais au moins, lui on voit que c’est un chat alors que la femme qui lui tient compagnie on ne sait même pas si elle est de face ou de profil. Elle est aussi cabossée que si elle était passée sous un train. Jacqueline qu’elle s’appelle. Nom d’un chat qu’elle est moche !
Mercredi 25 Octobre
Pour faire plaisir à ma maîtresse j’ai décidé de lui faire un petit cadeau.
La vraie chasse je suis contre, pourtant savoir attraper une proie est ancré dans mes gènes. Mon champ de vision élargi me permet de voir arriver le cadeau que je convoite…mais mon futur cadeau ne sait pas que je l’ai vu. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire il est dans ma gueule, tout chaud, tout doux, tout tremblant. Je l’ai choisi car il est petit et j’aime le son de sa voix haut perchée mais pourtant mélodieuse. Ce cadeau vivant est décoratif et il va apporter autant de bonheur qu’une boite à musique. J’ai à peine serré les mâchoires, il ne se débat même pas. Je l’ai apprivoisé, il a compris que je ne lui veux aucun mal.
Je le dépose fièrement aux pieds de ma maîtresse. Déception, pas un merci ! C’est tout juste si je ne me fais pas gronder. Incomprise ! Je suis une incomprise ! L’oiseau dont j’ignore le nom me fait un clin d’œil puis s’envole et va se percher, sans rancune en chantonnant sur l’arbrisseau juste devant la porte.
Hermine (pour le pattuscrit) - Béatrice pour le tapuscrit)
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jeudi 23 novembre 2017
Chère Anne,
Une journée pour rien. De celles où l’on se transforme en bulot. Grosse fatigue, grosse flemme. J’ai réussi à ignorer avec dignité le regard implorant de l’aspirateur, l’invite muette du fer à repasser et j’ai respecté jusqu’à ce soir la tranquillité du clavier de l’ordi.
Cédant au charme enjôleur du canapé, je me suis blottie dans les coussins, réfugiée sous un plaid doudou.
Rien d’attirant au dehors : ciel bas, gris, pluie fine et désespérément régulière.
Même pas envie de lire, c’est dire…
Pas envie de penser.
La teinte anthracite du ciel ferait ressurgir mes idées sombres, irait chercher ce qui m’inquiète, ce qui me fait peur et distillerait ses gouttes de poison-tristesse. Pourquoi ? Je pourrais me débattre et choisir au contraire mes images de lumière et de joie, j’en ai un tas en magasin.
Allons bon, j’avais dit "ne pas penser".
Sabre laser contre les vilains cafards, j’ai saisi la télécommande et j’ai zappé, bêtement, au hasard. En milieu d’après-midi je ne risquais pas de tomber sur les infos si anxiogènes et génératrices de profonds élans de rage face à la cruauté imbécile du monde. J’ai fini par me caler sur une série policière, pas trop prenante ni violente, un brave épisode de Colombo usé à force de rediffusions et paisiblement, je me suis assoupie.
Demain sera un autre jour…
Colette
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PETIT JOURNAL DU QUOTIDIEN L.
17 octobre : ce matin, je me réveille fatiguée, mon corps ne suit pas ma pensée, ou est-ce l’inverse ? Je fais du sur place dans mon lit et je passe de l’état de légume à celui de l’escargot, qui glisse du rêve à la dure réalité d’une radio qui hurle… Non, qui grésille et me chante l’odeur du café. Je me dédouble, mon esprit est au lit et mon corps assis face à mon bol.
Les mots dorment, la nuit les révèlent au grand jour.
15 octobre : une manière de tuer le temps, la chasse, non pas celle d’autrefois où n’existait pas le supermarché, mais celle de ces prédateurs qui profitent du dimanche ensoleillé pour endeuiller la campagne.
Les mésanges se posent sur le rebord de mes pensées, légères, elles viennent picorer mes idées noires.
Tes yeux de lion d’or, sur le canapé.
29 octobre : Aussi légère qu’une feuille d’automne, tu trembles et tu meurs. Les feuilles, rouges, comme ma douleur, tombent et forment un tapis sur lequel j’aimerais m’envoler pour ne plus penser. Nous marchons, et levons les yeux au ciel, là, les oies nous montrent la voie. Partir, bouger, ne pas rester immobiles et attendre. Ne pas s’abandonner.
18 novembre : Avant dernier atelier avec Fred, idée soudaine, résonance d’un mot souvent rappelé :
U ne
N uée
d’I nfâmes
V ertus
E mportent
R ageusement
S on
A ppel
L ointain
I mpétueux
T errible et
E ternel
À la Vie.
Lucrézia
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3 décembre 2017
A mon amie.
Au cœur de la fleur, un papillon.
Dans l’azur du ciel un avion.
Papillon s’est envolé…
L’avion a filé…
Reste un sillon blanc…
Restent nos souvenirs flottants…
Éphémère temps, savourons l’instant !
Martine