Lancement de la résidence de Frédérique Aït-Touati (vidéo)

La librairie est le paradis des auteurs, leur maison et leur scène. Occuper une librairie en résidence, c’est côtoyer potentiellement tous les livres. D’où l’envie pour moi de proposer une résidence d’auteurs plutôt que d’auteur, d’ouvrir l’écriture àla multiplicité des voix et àla communauté de pensée dont elle se nourrit. Pendant dix mois, il sera moins question du texte qui s’écrit là, souterrainement, que des livres et des auteurs qui m’accompagnent depuis longtemps.

Pour ouvrir cette résidence consacrée aux lieux, j’ai invité Yann Rocher et Andrew Todd, deux spécialistes de l’espace, pour évoquer le pouvoir particulier de certains lieux àconcentrer le monde et le savoir – les bibliothèques, les observatoires, les théâtres, les laboratoires, les cabinets de curiosité.

Une librairie, c’est une fenêtre sur le monde. Elle se tient en équilibre entre l’intérieur et l’extérieur, entre le microcosme et le macrocosme, entre le mouvement de la ville et le calme de la lecture. Inscrire mon projet d’écriture dans une librairie, au cÅ“ur de Paris, c’est me permettre de tester cet imaginaire géographique et cartographique. Et si je m’installais – pourquoi pas ? – àl’étage de la librairie, sur un petit bureau devant la vitrine, comme une fenêtre sur la ville. Écrire dans un lieu dédié aux livres, àleur classement, àleur vie secrète, àleurs lecteurs et àleurs regardeurs, quoi de plus naturel ? C’est un vieux rêve sans doute, celui d’occuper un lieu peuplé d’auteurs, de lecteurs, un lieu ouvert sur le monde, où l’on voudrait capter le brouhaha de la ville et arrêter la marche des passants, le temps d’un soir, les inciter àfranchir le pas de la porte pour leur parler de ce que l’on aime lire et écrire. Le théâtre me l’a appris : l’écriture est une action partagée, partageable. Cette fois, le pari est de partager mes inspirations, mes lectures, dans un autre espace que la scène – dans le théâtre de papier d’une librairie. Toute ma pratique se construit sur cette scansion : la fermeture nécessaire àl’écriture de mes livres, l’ouverture vitale au public dans mon travail de metteur en scène. La résidence àla librairie Petite Égypte qui s’ouvre aujourd’hui est pour moi l’occasion de combiner ces deux mouvements complémentaires.

21 février 2017
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