Monostiques paysagers [16]
Le 1er mai 2012, Rentilly
11 h 34
grand arbre a su casser petit, marronnier vieux sur érable jeune, et tout est déjà dégagé hors de l’allée, cher public
14 h 33
derrière le mur d’enceinte, la rue passante Thibault de Champagne et derrière un chantier de futures baies de bureaux
14 h 53
les quatre pins soigneusement monumentaux, un incliné à gauche, un incliné à droite, un droit centré, un qui hésite
14 h 58
là où personne ne va j’ai trouvé des fraisiers qui portent des fleurs bien vivaces et l’on voudrait que je dise où ça ?
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Le 2 mai 2012, Rentilly
20 h 44
soir humide, un sol éponge, un ciel de pluie, l’herbe liquide et l’indécence qu’il y a à s’assombrir sous un ciel sombre
23 h 06
le ciel est assez parme, une voûte vraiment de four avec des feux dans la périphérie, où est le noir dont on parle tant ?
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Le 3 mai 2012, Rentilly
10 h 55
le pauvre marronnier tombé au vent d’honneur est déjà ramassé, découpé, déchiqueté par les paysagistes urgentistes
10 h 58
deux des trois bassins ont été mis en eau, de couleurs différentes, pâles, l’une plus verte que beige pour cause de fond
13 h 23
puisque le ciel enfin se découvre un petit avion s’en vient l’occuper dont le moteur hache l’air comme l’autre le bois
15 h 37
les hêtres pourpres s’empourprent enfin, et moi écrivant ça je m’embourbe, les pieds lourds, si le poème était léger !
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Le 6 mai 2012, Rentilly
11 h 30
des amis joggent ou tai-chient dans le parc gorgé d’eau avant de se tremper de vin, manger, boire et dire des sottises
12 h 11
on peut se débarbouiller dans les buis sans y mettre les mains, se rincer en se décalant d’un mètre et souffler du nez
14 h 27
on peut se promener le long d’un rayon de livres, de livres de paysages ou autres, mais si l’on s’arrête, on s’arrête
Jacques Jouet
1er juin 2012