Pascal Quignard à voix haute
En préparation de la venue
de Pascal Quignard qu’Yves Charnet reçoit le 26 à 20 H 30 à SUPAERO & le 27 à 16
H 30 à "Ombres Blanches", pour « Paradisiaques » et Sordissimes »
SUPAERO (10, avenue Édouard-Belin, 31055 Toulouse), le mercredi 12 janvier 2005 à 20 H 30, en Salle des Thèses.
« L’AMOUR
EST CE QUI LAISSE INCONSOLABLE. »
Pascal QUIGNARD à voix haute
Mise en voix de Vie secrète (Gallimard, 1998, folio 1999 sq ) par les comédiens Sylvie MAURY & Francis AZÉMA
L’amour est un don sans pitié parce que rien ne console de sa perte. L’amour est lié au perdu : c’est pourquoi toute perte le vérifie.
C’est la plus intense des douleurs.
On peut procurer une définition négative de l’amour : l’amour est ce qui laisse inconsolable.
Il n’est jamais fini. (C’est ce que veut dire inconsolable. Infini. L’amour, au contraire de la sexualité et du mariage, est infini.) Il n’est même pas sûr qu’existe quelque chose pour l’espèce humaine comme le deuil.
Rien ne rembourse le don qui s’y est abandonné.
Car rien n’y équivaut (pp. 150-151).
Certains trouveront sans importance, et négligeable, qu’un homme écrive sur ce qu’il entend par amour. Qu’est-ce qu’un amour si on le compare à une carrière, à un fait d’armes, ou si l’on l’oppose à une fortune hardiment acquise ? Tellement plus. Qu’un être humain puisse s’ouvrir au corps d’un autre être humain, qu’il parvienne à le toucher, c’est au-delà du destin de son sexe et plus difficile que sa mort elle-même, qui n’est que personnelle et inéluctable. Ce contact avec l’autre monde que soi représente une expérience plus riche qu’une fortune lentement et résolument amoncelée. Ce toucher aboutit à une métamorphose qui malmène plus profondément l’identité personnelle que le rôle qu’un homme a pu jouer dans la société où son travail l’a introduit, où il s’est agenouillé devant un tyran, où il a été payé comme une prostituée, où son cœur s’est contraint (pp. 458-459).