Jacques Rebotier / description de l'omme
poésie naturelle

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Jacques Rebotier est écrivain, poète, homme de théâtre, compositeur, musicien, en gros: homme avec un h.... Actuellement en résidence de création à l'université Paris X (Nanterre - Arts du Spectacle), il a inauguré il y a deux ans le
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aussi de jacques Rebotier, sur remue.net:
litanie de la résolution 34
litanie de la certitude

Rebotier vous parle du monde, le chapitre 11 inédit de "description de l'omme"

– 1. Corps. Sac, pot, membres. Ouvertures. Consistance, odeurs, goûts, couleurs.
1.1.
L’omme est un animal constitué d’un gros sac, surmonté d’une boule, appelée pot. Des coins du sac sortent des excroissances allongées, quatre, qui pendent généralement vers le bas.
1.2.
Dans le sac est enroulé un tuyau, que l’omme utilise pour badigeonner le monde de diverses matières verbales et fécales.
1.3.
Le pot est pourvu d’ouvertures, marchant par paires, 2 + 2 + 2 , plus une = 7.
L’ouverture solitaire est située en bas du pot. Elle est appelée “louche”, ou “trou-du-pot”.
1.4.
Observation.
Le sac et le pot peuvent ne peuvent pas être séparés.
1.5.
Consistance.
Le sac est mou-mou, le pot est dur-dur.
1.6.
Le fond du sac est pourvu d’un trou, ce qui permet de le vider.
1.7.
Les quatre excroissances allongées sont prolongées d’autres excroissances allongées, mais plus petites, au nombre de cinq. Qui font 20. Vingt.
1.8.
Précisions consistance.
Le sac est majoritairement mou, mais dur en certaines parties. A l’inverse le pot est majoritairement dur, mou en certaines parties. Dont acte.
1.9.
On peut parfois apercevoir, au bas du sac, un doigt 21, mou-mou-mou, et appelé pour cette raison tristouquète.
1.10.
Observation.
Plus un pot est dur, plus on a de mal à le casser.
1.11.
Les ouvertures naturelles du pot sont toutes situés vers l’avant, et marchent par paires, 2 + 2 + 2 , plus une = 7. 2 côté-côté + 2 côté-centre + 2 centre-côté, et une plein centre, inférieure = louche = trou-du-pot = 7. Sept.
1.12.
Le doigt numéro 21 peut, sous certaines conditions, devenir dur-dur-dur. Il peut alors s’introduire dans différents orifices, ce dont il ne se prive d’ailleurs pas.
1.13.
Un long tuyau est enroulé dans le sac, dont une extrémité se situe en bas du sac et l’autre en bas du pot. On les appelle “trou-du-sac” et “trou-du-pot”.
1.14.
Trou-du-pot permet de remplir le pot, puis le sac.
1.15.
Consistance et hygrométrie.
Le corps de l’omme est principalement sec-sec, du moins à l’extérieur. Les régions les plus humides sont concentrées aux deux extrémités du tuyau.
1.16.
La raison semble en être qu’elles sont en communication avec l’intérieur du sac, qui, lui, est humide de bout en bout.
1.17.
Règle.
Pour observer ce qu’il y a à l’intérieur d’un pot, il faut le casser (dur sur dur). Pour observer ce qu’il y a à l’intérieur d’un sac il faut le crever, et /ou le couper (dur sur mou).
1.18.
Outre le tuyau, le sac mou-mou contient un certain nombre d’autres sacs, baignant dans cinq litres et demie d’un liquide rouge sang, que l’on peut voir s’écouler lorsqu’on crève le sac.
1.19.
L’outil le plus approprié à l’ouverture du pot est un artau. L’outil le plus approprié à l’ouverture du sac est un outau. Ceci est un conseil.
1.20.
La boule numéro 1, ou pot, contient différentes matières molles, grises, blanches et roses.
1.21.
Des goûts et des odeurs.
Les odeurs sont concentrées:
1.21.1.
aux intersections des excroissances allongées et du sac.
1.21.2.
aux trous.
1.22.
Précisions odeurs.
Les trois trous du pot qui vont par paires ne sentent rien. Les trous qui vont par un puent tous (quoique chacun à sa façon).
1.23.
Précisions-précisions odeurs trous uniques.
1.23.1.
La région trou-du-sac produit une odeur mauvaise. Pourtant celui qui la porte ne semble pas s’en apercevoir, et il parait même s’en réjouir. (Paradoxe dit “de l’odoriphore”: la sienne propre le transporte, celle des autres lui répugne.)
1.23.2.
Explication.
De même que l’omme ne peut pas se voir, il ne peut pas se sentir.
1.23.3.
Objection. S’il ne sent pas, pourquoi dès lors se délecterait-il ?
1.23.4.
Réponse. Ce n’est donc pas sans doute de son odeur qu’il jouit, mais de l’effet qu’il lui voit produire sur autrui. (De même les enfants aiment à faire s’envoler les pigeons.)
1.24.
Des trous.
Les trois trous-doubles du pot servent à sentir, 1/ (centre-centre) : les odeurs, 2/ (centre-côté) : les images, 3/ (côté-côté) : les sons.
1.25.
Tous les trous ont du goût. Les trois trous-doubles ont ainsi un goût 1/ trou-d’air : sucré, 2/ trou des images : salé, 3/ trou-du-son : amer.
Les odeurs sont sucrées, les images sont salées, les sons – et en particulier les paroles – sont amères.
1.26.
Les trous uniques servent à sentir 1/ trou-du-pot : les saveurs, 2/ trou-du-sac : les pensées (voir 5.26).
1.26.1.
3/ Trou-du-trou: les sentiments.
1.27.
Lorsqu’on applique son goût à quelque chose qui ne vous revient pas, on éprouve du dégoût.
1.28.
Le dégoût est un regret immédiat d’avoir goûté. Il s’exprime par un recul de tout ce qu’il est possible de reculer dans le corps.
1.29.
Des trous et des couleurs.
Les trous n’ont pas de couleur.
1.30.
On peut en revanche observer des couleurs aux matières contenues dans les trous.
1.31.
L’enveloppe de l’omme est noire, bistre, beige, voire blanc, selon variété. Tous les intérieurs tirent vers le rose.
1.32.
Des plantes poussent sur le corps de l’omme : au-dessus du pot, parfois sur le bas du pot, au-dessus des œils, aux intersections des excroissances allongées et du sac.
1.33.
Remarque finale sur les orifices et leurs odeurs.
Il existe encore, au centre de l’omme (et au centre du sac), un trou qui a dû être bouché, voir “Naissance”. Ceci n’est pas un trou. C’est pourquoi il ne sent rien et il ne sent rien.
1.34.
Le nombril est le trou-zéro du corps.