Fred Griot | enfin tu regardes l’herbe
tu regardes l’herbe
plein d’amour ami
couché sous le ciel les étoiles
le vent t’a emporté ami
et tu regardes l’herbe
le vaste alpage du ciel
étendu sur la terre
toi comme le ciel étendu
nappe qui nous berce amour
que tu nous as laissé.
et toi toi tu regardes l’herbe
allongé
sur la terre le ciel
et tout l’amour que tu as donné
maintenant
nous le convoyons.
•••
le chemin prenait presque droit dans les herbes.
une ligne nette.
ondulante.
et ton dos là
qui partait.
ami
t’es parti dans les herbes
et nous sommes là
à te regarder
filer
tracer
ta silhouette diminuée
estompée.
mais
c’est là que subsiste
s’imprime
ce halo de présence
sur l’air
ami.
•••
et puis
ce putain de jour d’octobre
où ce fut le silence
ce jour d’octobre
où t’a fermé les yeux
bouche close soudain
où ton cœur a pété
d’un coup subit soudain
éclaboussant
gerbes et nuages d’amour.
il avait bossé dur le coco
bien pompé l’excitation
du monde
capté
l’affection
aspiré
la vision
faut dire
ami.
tu as eu raison de foncer autant
tu aurais pu partir avant.
ami
ce putain de jour d’octobre
où t’as filé dissous dans l’espace
où t’es retourné à la grande soupe
aux arbres aux plantes
laissant ta chair ta viande tes os
qui t’avaient tant grignoté les nerfs
nourrir la terre
laissant ton chant
fertiliser filer s’échapper clair
ami.
•••
aujourd’hui passe
et voici que tu regardes l’herbe
aujourd’hui vois-tu
il fait froid
humide
sans toi
sur la terre
et ça transperce
et les pelures
ne suffisent plus
à soigner
nos élans
nos besoins
de consolation.
et voilà ami
aujourd’hui passe
aujourd’hui passe plein
et nous savons ami que
la joie est un choix.
•••
et puis et puis
nous irons encore dans le sud
au bord de la mer
où la pierre brûle
et nous mangerons des pastèques
en regardant la lumière de face
nous plongerons
dans l’eau des lacs bien froids
sous l’orage qui se pointe
noir comme une nuit
claquant sur la surface.
le bruit le vent fonceront
fouetteront
l’onde de son
claquant l’onde de houle.
flac !
et puis
et puis
l’arc-en-ciel triple aussi
devant derrière tout autour
sur les pentes.
et nous sortirons
dégoulinant de lac
éclate de rire
fouette de sang
clap de paluches sur cuisses
fiers de nos conneries de gosses.
juste avant que les arbres
ne commencent à s’abattre
dans l’ombre du vent.
et puis
nous camperons sur des terrasses
de nuit tiède
nous tchatcherons jusqu’à plus soif
boirons jusqu’à plus sec
à rire.
nous brulerons l’affection
comme une flamme
au milieu de nous
nous brulerons
car nous voulons la paix
mais aussi l’élan et le risque
sinon morts morts tout à fait
morts pour de vrai
ami.
et c’est ainsi qu’
aujourd’hui passe
•••
et puis
au soir
crevé
s’allonger dans l’herbe
le soleil dans les yeux
et regarder
toutes choses tourner.
les choses passent
toutes choses
et on se demande…
mais rien ne sert
de se demander
les choses
couleront
tout de même
ainsi.
elles sont déjà là.
•••
ami ami
enfin tu regardes l’herbe.
•••
extrait de « enfin tu regardes l’herbe » :
– livre en cours : le site
– disque et concert : le site
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