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alerte Breton 3 : mails envoyés, mails reçus


"une grande cuiller en bois, d'exécution paysanne, assez hardie de forme, dont le manche, lorsqu'elle reposait sur sa partie convexe, s'élevait de la hauteur d'un petit soulier faisant corps avec elle" – achat au marché au Puces, printemps 1934, un jour que Breton est accompagné de Giacometti – le 10 avril 2003, remue.net association se portera symboliquement acquéreur de "la célèbre cuiller de l'Amour Fou"

à Carcassonne, la maison de Joë Bousquet, à Saint-Brieuc, la chambre de Louis Guilloux, à Saché, celle de Balzac comme bien d'autres lieux d'écriture, parfois bien plus modestes que le château d'Alain Robbe-Grillet racheté par le conseil général de Basse-Normandie, sont une mémoire vivante de la littérature – en dispersant le mythique appartement Breton, les livres annotés et bourrés de lettres, les objets chaque fois liés à un passage de l'oeuvre, c'est la secousse du surréalisme qu'on veut tenir à distance, parce que ce n'est pas dans l'air du temps: quand on s'en avisera, il sera trop tard – ci-dessous, au hasard ou presque, quelques-unes des réactions reçues
remue.net

ainsi que : soutiens américains...

La lecture du journal à haute voix
par Auxeméry

difficile d’échapper
_________________________au passage
________________des cyclones

______________________par temps
________________de misère

_______________________– le geste cependant

____consiste
__________ à
________________________se couvrir


d’une écharpe
___________________ de songes

Tout a commencé par cet envoi de Laurent Margantin

Nous apprenons par un article de presse, ce 21 décembre, qu´une vente aux enchères de tous les tableaux, sculptures, objets d´art primitif rassemblés par André Breton dans son appartement mythique de la rue Fontaine allait avoir lieu en avril prochain à l´Hôtel Drouot. Rappelons que cet appartement de Breton est, à l´égal de la maison de Victor Hugo pour le dix-neuvième siècle, un grand lieu de la littérature du vingtième siècle.

Cet ensemble d´objets n´est pas simplement l´œuvre d´un collectionneur, mais une création artistique en soi, le fruit d´années de voyage et de prospection, et il ne peut être, selon nous, ainsi bradé et dispersé. On pense notamment à la description qu´en fait Julien Gracq dans "En lisant, en écrivant…"

Dans l´article en question, on nous dit que ce "tableau vivant de ses panoramas intérieurs" avait été accueilli au sein de l´exposition du centre Pompidou, début 2002, intitulé "L´aventure surréaliste". On nous dit aussi que la veuve d´André Breton avait conservé pieusement cet appartement en l´état, mais que la "configuration de l´endroit rendant pratiquement impossible (nous soulignons) l´ouverture au public", il avait été décidé, une fois Elisa Breton disparue, de mettre la totalité des œuvres d´art aux enchères. À qui iront ces œuvres ? L´Etat pourra soi-disant en acquérir quelques-unes, sans que rien ne soit sûr de ce côté-là, et surtout la "maison Breton" sera démantelée et disparaîtra. On peut également lire qu´un cédérom sera offert à la vente, pour le public qui voudra se faire une idée du lieu. En somme : aux riches collectionneurs les œuvres arrachées à leur contexte si particulier, et au public un cédérom, comme si les images devaient, dans nos sociétés modernes, remplacer toute expérience physique d´un lieu.

Laurent Margantin
membre du comité de rédaction de remue.net, il anime le site "D'autres Espaces"

Autre chose qu'une simple muséification
par Claude Greis, conseiller livre à la DRAC Languedoc Roussillon
Je vous transmets ma signature de soutien à la pétition contre la dispersion marchande des traces d'André Breton. Toutefois, et surtout s'agissant d'un tel écrivain, nous devrions être capables de réclamer autre chose qu'une simple muséification, une sorte de monument à la fulgurance surréaliste dont l'invention pourrait par ailleurs rendre acceptable une certaine dissémination des livres et des objets dans les collections publiques. Ce que je veux dire: au risque de me méprendre sur ce qu'ont pu être les intentions d'André Breton quant au devenir de cette collection, je suis gêné par l'idée que les charges électriques intimes qui ont à chaque fois présidé à sa constitution risquent d'être bien amoindries, pétrifiées par un traitement muséal. Inversement, le projet d'une reconstitution virtuelle de l'ensemble devient intéressante dès lors qu'il ne s'agirait pas de masquer une dispersion marchande des objets mais d'accompagner une dissémination publique. En somme, plutôt qu'enfermer André Breton dans un lieu, lui garantir l'ubiquité de ses traces dans des collections publiques ( musées, bibliothèques et autres lieux moins attendus ), chaque objet isolé s'appuyant, là où il se trouverait désormais, sur cette reconstitution virtuelle. Quant aux éventuels lieux de mémoire (rue Fontaine, etc...), pourquoi pas? mais en s'écartant de ce qui pourrait ressembler à un musée ou à une maison d'écrivain pour tendre vers des espaces à mécanique, à ressort surréaliste: dériver du centre d'étude ou de pèlerinage vers un lieu agissant.
Cordialement
Claude Greis Conseiller livre et lecture
DRAC Languedoc-Roussillon

déjà donné
Jacques Dupin
A Pompidou, on m'a répondu qu'on "avait déjà donné". Ils ont reçu ne dation, ou acheté, ce mur qui figurait dans l'exposition surréaliste. Mauvaise réponse, il s'agit, à mes yeux, d'un ensemble, et aussi des archives conservrées par A. Breton. Leur dispersion est révoltante.
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Joël Vernet
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Je m'associe à votre colère. Dans une note inédite de Journal de je ne sais plus quelle année, j'ai écrit ceci: j'aime le ton givre sec d'André Breton. Très décriée voire le plus souvent insultée, cette oeuvre est irremplaçable car elle a su porter la révolte à un point d'incandescence inégalé jamais chez la plupart de ses détracteurs. Pour les autres, dont je suis, elle est l'une des flammes où nous venons nous réchauffer quand le coeur n'y est plus tout à fait. Lorsque je pense à Breton, je repense au beau rocher de Percé, en Gaspésie, où il écrivit Arcanes 17. C'est-à-dire, à la vie infinie, sans horizon médiocre.

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Benoît Conort (écrivain, univ Paris X)
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L'idée qu'on puisse ainsi liquider (je veux dire transformer en "argent liquide") le surréalisme me laisse... sans voix. Interrogation : je ne comprends pas très bien comment on peut, directeur de Beaubourg, mettre en place une énorme exposition sur le surréalisme, et devenu ministre de la culture, quelques mois plus tard, ne rien faire pourprotéger du mercantilisme "la vie de l'esprit". J'ai dû rater un épisode.

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Corti
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Signatures de :
Bertrand Fillaudeau
&
Fabienne Raphoz-Fillaudeau
responsables des éditions Corti
(nous relayons votre engagement dans notre prochaine lettre d'informations)

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Annie Ernaux
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Je signe la pétition contre le dépeçage des oeuvres et objets appartenant à
André Breton.
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théâtre 95
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De tout coeur avec vous dans votre lutte pour sauver ce symbole capital du patrimoine artistique Français
Joel Dragutin et toute l'équipe du théatre 95 de Cergy-Pontoise
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Centre de recherches sur le surréalisme
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Cher, très cher Mathieu Bénézet,
Après tant de silence, votre initiative donne à vivre. Merci, mille fois merci, et tout à votre service.
(Tout récent docteur sur Les Philosophies d'André Breton, je contribue à animer le Centre de Recherches sur le Surréalisme à Paris III, et me mets réellement à votre disposition pour toutes les actions ou relais que vous estimerez utiles) Emmanuel Rubio, enseignant (univ. Paris)
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librairie Le Livre (Tours)
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Ne supporte en rien cette agression contre l'intelligence et la pensée. Signe pour cela. Je viens aussi du surréalisme et veux me tenir encore; de Breton à Duprey etc...Ne pas accepter d'être amputé vivant d'une part grande de la littérature. Laurent Evrard Libraire

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Valéry Hugotte (univ Bordeaux III)
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en prolongement des mots de La Confession dédaigneuse , ce texte de 1953 dont la formule finale ne saurait évidemment consoler en rien d’une vente que l’esprit même de Breton commande de voir comme simple prostitution, j’insiste décidément sur le terme qui me paraît ici seul convenir.
" Ce qui va se disperser ici, soit dit que pour quelques-uns c’est un peu du trésor du temps. [] Et l’on retrouve sa mélancolie [Lise Deharme] à voir, au vent, filer comme graines ces choses que tant de discernement passionnel avait réunies comme si, autour de celle qui s’en entourait, elles étaient venues obéissant à une loi d’attraction pure. [] Mais tout ce dont elle se sépare grâce à elle demeurera si chargé d’esprit que rien ne pourra l’éteindre dans sa gravitation vers d’autres destinées. " (Préface au catalogue de la vente Lise Deharme, Oeuvres complètes, t. III, p.1095-1096) Je tiens à signer le texte de protestation contre la grande braderie de l'appartement de Breton et à affirmer ma solidarité avec tous ceux qui refusent cette prostitution infamante d'un héritage particulièrement précieux.
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Claire-Louise Ricard (enseignante)
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Je me joins à vous pour la pétition André Breton avec mes deux mains, mes deux bras, mes deux pieds et toute ma tête ; en espérant que d'autres ne la perdront pas. Amicalement.
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Patrick Rétali
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Merci de me compter parmi les signataires de votre appel "Breton"... J'ai été à la fois surpris, choqué et navré du peu de réactions immédiates des responsables culturels.
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mémoire littéraire
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Je vous prie de bien vouloir compter ma signature parmi celles de tous ceux qui s´élèvent contre l´éparpillement de notre mémoire littéraire, et je vous remercie de votre action. Séverine Bourdieu, enseignante et doctorante (Bordeaux)
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Jean Romain
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J'ajoute ma signature si un philosophe et écrivain suisse peut y trouver
sa place. Cordialement
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librairie Les Sandales d'Empédocle (Besançon)
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D'abord merci de réagir si rapidement. De mon côté, dès demain l'appel sera disponible aux sandales et pourra être signé par nos clients ou gens de passage. Nous enverrons les feuilles signées régulièrement à l'adresse indiquée. Pour l'heure, je signe ce texte, Christophe Grossi, libraire.

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Claude Buchvald et sa compagnie
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Nous tenons à exprimer notre vive indignation à l'annonce de la vente de l'appartement d'André Breton et de la dispersion de ses biens alors que la création d'un musée André Breton va de soi.Il est impensable que l'Etat se dérobe à ses obligations. Claude Buchvald et Claude Merlin, comédiens, metteurs en scène; Blaise Merlin, compositeur.----------------------------------------------------------------------
Itinéraire des poètes
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Je rejoins la liste des signataires de l'appel de Mathieu Bénézet. Non que je croie en la mise au musée de la mémoire des écrivains, leur oeuvre survit bien par la alecture qu'on en fait ou qu'on en donne, mais je ne peux me résoudre à la dispersion de ce qui est notre patrimoine, notre héritage. Xavier Lainé, poète, association Itinéraire des Poètes
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doctorante
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je voudrais signer le texte de Mathieu Bénézet et m'associer à l'action de Remue.net contre la vente de l'appartement d'André Breton. A cette idée, je suis tellement submergée par l'indignation et la consternation que j'en reste muette. A ressasser l'amour fou des œuvres d'André Breton qui m'a transporté pour longtemps quand je les ai lues et relues pendant mes toutes jeunes années d'étudiante. Et encore maintenant où je ne peux pas les relire sans éprouver un frisson le long de la moëlle épinière. Agnès Edel-Roy, agrégée de Lettres Modernes, Doctorante en Littératures Comparées.
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Alain Freixe
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Je signe des deux mains. Des 10 doigts. J'ai depuis toujours choisi "la clé des champs" plutôt que la "Sainte Famille" même si j'ai gardé une tendresse particulière pour un certain Artagon, celui qui fréquenta la chambre de Bousquet et rédigea la même année que Blanchot un très beau texte sur "Traduit du silence". Bousquet choisit Breton en 46 lors de son retour. La période de la "liste noire" est sinistre.Tout ce qui touche à Breton m'importe.
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coté Cocteau
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Sylvie Marie-Scipion, muséographe se joint à vous pour soutenir une telle démarche. Je suis en train de réaliser le Musée Jean Cocteau et de préparer l'ouverture de la Maison de Cocteau à Milly la Forêt (95), projet qui a été mené à terme grâce à l'implication personnelle de M. Pierre Bergé (Président de l'association des Amis du Musée de Jean Cocteau) et qui a permis la mobilisation des collectivités (Conseil Régional Ile de France et Conseil Général de l'Essonne).
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d'Ottawa
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Il serait scandaleux, effectivement, de laisser disperser aux quatre vents, et dans des mains impies-- comme une vulgaire relique d'une époque que l'on croit à tort révolue -- le domicile d'André Breton et son contenu, pour moins, sans doute, que le prix d'une compétition sportive dite de "haut" niveau. Où la France "cul-turelle" [trait d'union, ou plutôt de séparation, très intentionnel !] place-t-elle ses valeurs ? Dans le vulgaire fric ??
Le surréalisme n'est pas mort, loin s'en faut : dommage qu'il survive dans l'inculture et la barbarie...
Yves Chartier, musicologue,
Professeur à l'Université d'Ottawa

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égouts de monnaie

Je me souviens aussi de la suggestion en manière de jeu faite un jour à une dame, devant moi, d'offrir à la "Centrale Surréaliste", un des étonnants gants bleu ciel qu'elle portait pour nous faire visite à cette "Centrale", de ma panique quand je la vis sur le point d'y consentir, des supplications que je lui adressai pour qu'elle n'en fît rien. Je ne sais ce qu'alors il put y avoir pour moi de redoutablement, de merveilleusement décisif dans la pensée de ce gant quittant pour toujours cette main". (Nadja)
L'objet crève l'écorce commerciale qui l'a produit. Il renaît par la main, devient échanges d'émotions ; par l'écriture il s'épanouit, nourrit un rythme intérieur, scande enfin l'émotion.
L'arracher à cet entrelacs de mots et de relations, le projeter dans la bêtise commerciale des surenchères, revient à dire que seule la règle habilitée à régir le monde est l'accumulation.
Il n'est pas de symboles qui demeura en repos tant que tout ne sera pas précipité avec méthode dans ces égouts de monnaie s'étendant désormais en réseau mondial.
De fait, la poésie se trouve face à ça.
Et continuera donc. De toutes façons.
Yves Ughes (écrivain, Grasse)

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une SCI Breton à nous tous

Plus que des signatures, un bretonton, pas un jeu de mot mais une invitation à créer une sci, qui plus qu'immobilière sera surtout musicale et littéraire! Si 305.000 euros sont nécessaires, il faut trouver 305 personnes à 1.000 euros ou 3.050 à 100 euros ou 15.250 à 20 euros, soit 18 personnes regroupées par chaque récepteur de ta fabuleuse lettre de diffusion.... elle aura une belle tronche la sci Breton.
Merci pour la lutte. Manifestons. Catherine Collin (Paris)

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restitution au Lot de ses galets
par Jacques André (Loire-Atlantique)

Tout part d'une photo de Breton, sur une rive du Lot, tout en bas de Saint-Cirq. Il est courbé et ramasse des galets. En fait, il semblerait que ce soient des agates (ou agathes) qu'il recherchait ; ça devient donc un "galet" plus rare. Deux références sur cette cueillette et à sa précision minérale :
page 140, in André Breton par lui-même , Sarane Alexandrian, Écrivains de toujours, au Seuil,1971
& page 686, in André Breton, Mark Polizzotti, Biographies, NRF Gallimard, 1999.
Je ne pense point que les galets — que sont les agates — n'en soient pas moins dignes de retourner à leur fleuve d'origine.
Quant à moi, arpentant les rives d'un fleuve ou les grèves de mon océan, je cherche toujours le galet, si minuscule soit-il, qui me renverra à l'Œuf parfait de Miro, dans les jardins de la Fondation Maeght.
Il est certain que l'image de Breton cueillant les galets du Lot, n'a que renforcé en moi cette démarche minérale et rêveuse:
Si Breton a, de Saint-Cirq-la Popie, rapporté dans son musée rue Fontaine quelques galets du Lot
nous devons exiger qu'ils soient rendus aux gravières du fleuve.

 

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en protestation, une lecture publique intégrale de l'Anthologie de l'humour noir
par Dominique Dussidour, le 28 décembre

Voici quelques propositions immédiates:
1) rédiger et diffuser, début 2003, dans la presse généraliste, littéraire, artistique française et étrangère, dans les revues papier, sur les sites Web, dans les lieux de culture (théâtres, universités, etc.) un texte interpellant les pouvoirs publics, et en particulier le ministère de la Culture, qui, autant qu'organiser et privilégier les grand-messes au Panthéon (après Hugo en 2002, ce sera le tour de Berlioz en 2003), feraient encore mieux leur travail, c'est-à-dire ce pour quoi ils ont été élus, en préemptant cette collection, c'est-à-dire en gardant rassemblées, vivantes et présentes les traces matérielles de cet héritage, de cette mémoire afin qu'elles ne soient pas évacuées, effacées, oubliées - mais est-ce bien raisonnable de demander à des institutions de s'intéresser à celui qui, précisément, refusait de les reconnaître et de prendre au sérieux leurs contorsions culturelles ? La plupart d'entre nous ont été marqués par le mouvement surréaliste, par ses poètes, par ses révoltes, par ses injonctions à vivre autrement, par Nadja, par les Manifestes du surréalisme, par Les Champs magnétiques... Beaucoup doivent à la découverte de Robert Desnos, de Philippe Soupault, de tous les autres, d'être à leur tour aujourd'hui devenus écrivains, poètes, peintres, artistes, comédiens - ce serait l'occasion de le dire à haute voix (plutôt qu'écouter discuter qui est réac, ex-réac, néo-réac, réac d'avant- ou d'arrière-garde ou réac à venir).
2) organiser une lecture intégrale de l'Anthologie de l'humour noir (à la Maison des écrivains, par exemple).
- Rectif : Rédiger et lancer un « Manifeste pour le Surréalisme »
Suite : Proposition 3 (qui, pour garder toute son efficacité, devrait cependant rester secrète) : le premier jour de la dispersion de la collection Breton, arriver très nombreux et bien avant l'ouverture des portes de Drouot de façon à entrer les premiers dans la salle où aura lieu la vente et à occuper toutes les places assises sans faire aucune enchère?
« Je te salue...
Du fond du pacte millénaire qui dans l'angoisse a pour objet de maintenir l'intégrité du verbe
Des plus lointaines ondes de l'écho qu'éveille le pied frappant impérieusement le sol pour sceller l'alliance avec les puissances qui font lever la graine...»
André Breton : Ode à Charles Fourier (1945).

Cordialement, Dominique Dussidour.

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les Mexicains font mieux que nous
par Laurent Margantin
En Chiraquie on soigne Dumas et les 3 mousquetaires, c´est sympathique et émouvant une panthéonisation, mais il semble qu´à voir l´incapacité ou le manque de volonté de l´Etat de s´occuper de la "maison Breton", il vaille mieux être un écrivain du dix-neuvième siècle récupérable par les bons sentiments humanistes, qu´un disciple de Fourier et admirateur de Sade & Rimbaud, et fondateur du mouvement poétique le plus virulent dans ses critiques de la société moderne.
Au Mexique, dans le quartier de Coyoacan, j´ai pu visiter la maison de Trotsky, maison où il vécut pendant son exil et où il faut assassiné. Sur le mur de sa chambre il y a encore les marques des tirs de mitraillette suite à la première tentative d´assassinat. On a laissé la bibliothèque, la cuisine et chaque pièce intactes, ouvert des pièces d´exposition avec quantité de photos et de documents, et je me souviens que quand nous étions là une jeune guide mexicaine, hors de toute visite guidée organisée, et s´occupant seulement de nous deux, nous a racontés quantité de détails du séjour de Trotsky, comment la maison s´était transformée en bunker, etc. On est loin de la culture CD-ROM et des intérêts commerciaux, et en pleine culture vivante.

Breton et Trotsky au Mexique
Dans le journal mexicain la Jornada, on reconnaît le manque de ressources financières, mais surtout la nécessité de protéger un "espace historique, magique".Les artistes ne sont pas oubliés, notamment Frida Kahlo. Bref, on rêve d´une maison Breton en France, de préférence rue Fontaine, réaménagée sans doute, étendue comme la maison Trotsky, pour qu´une histoire ne s´efface pas et continue à vivre, celle d´une France où des hommes et des femmes luttaient à travers l´écriture pour une vie collective plus heureuse et plus juste, car c´est aussi cela le surréalisme, une politique...

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Ruth Szafranski (message du mardi 24 déc)
J'y reviens et insiste. Une pétition de vous tous, auteurs français reconnus, en trois lignes disant seulement : "Nous, écrivains, artistes, scientifiques et enseignants, en raison de ses crimes contre la nation dans l'affaire Erika et l'affaire AZF, décrétons le groupe Total moralement responsable, à titre punitif, de la sauvegarde en l'état du musée Breton rue Fontaine, moyennant versement immédiat de la somme de 40 millions d'euros à l'étude des commissaires-priseurs." Ladite somme est ridicule aussi bien vis-à-vis des dégâts commis que de leur bénéfice annuel. Et mettre au plus vite sur remue.net la description de la petite chambre de Proust sauvegardée dans l'immeuble de la banque Lazard.

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Le XXIème siècle commence bien
par Serge Bonnery

Ca vous étonne, la dispersion des collections de la rue Fontaine ? Moi, pas. C’est, au fond, très logique. Ne sommes-nous pas entrés depuis longtemps déjà dans l’ère de la dispersion ? Dans l’ère de l’oubli ? Dans l’ère de l’argent tout puissant ?
Ce qui est réconfortant, face à cet état de fait, c’est ce qui s’exprime ici. A savoir un sentiment partagé, entre révolte et écoeurement. Ne pas rester les témoins silencieux d’une dilapidation : c’est bien le moins, une manière aussi d’assumer notre impuissance à arrêter cela. Prendre la parole, c’est aussi se dresser contre. Alors, disons ensemble notre refus quand quelque chose d’important va se perdre à tout jamais.
Ce qui se perdra dans cette vente, c’est la beauté du geste qui consistait à rassembler pour faire sens, et le sens même de cette beauté. Précisément, en quoi Breton faisait œuvre d’art à travers ses collections. Ce qui se perdra, c’est beaucoup du sens de toute une vie.
Dans cette vente, s’affronteront deux forces contraires. L’une éparpille et renvoie au néant. L’autre, en rassemblant, crée du sens. On sait déjà laquelle des deux vaincra.
Les collections de Breton n’ont de sens que rassemblées. Dans son article pour Le Monde du 22 décembre 2002, Michèle Champenois le dit très bien quand elle écrit : " Le grand mur de l'atelier où Breton composait, avec livres, sculptures, peintures, photographies, selon les correspondances intimes qu'il décelait entre ces éléments, un tableau vivant de ses panoramas intérieurs… ". Avec la vente du printemps 2003, ces " correspondances intimes ", ce " tableau vivant " vont disparaître. Au diable les " panoramas intérieurs ", c’est Breton que l’on disperse ! Il me semblait pourtant avoir compris avec le surréalisme que l’homme n’était rien sans ses " panoramas intérieurs ". Qu’on enterre cette idée-là aux dépens de son inventeur démontre tout le cynisme de notre époque.
On a aussi le sentiment que les " grandes " institutions culturelles françaises, vu leur peu d’empressement, depuis tant d’années, à bouger positivement autour des collections de la rue Fontaine, génèrent de l’inertie à vous faire froid dans le dos. On nous dit (extrait de l’article du Monde) que " la conservation sur place (des collections de la rue Fontaine) n'était pas possible ", et que " la configuration de l'endroit rendait pratiquement impossible l'ouverture au public ". Evidemment, si l’on reste enfermé dans les schémas de la culture-spectacle-objet de consommation, autrement dit des " grosses " expos dont le succès n’est plus mesuré qu’à la longueur des files d’attentes sur les trottoirs parisiens, il est impossible d’imaginer une solution adaptée à un lieu comme le 42 rue Fontaine. Faire preuve en l’occurrence d’aussi peu d’esprit d’invention est à verser au crédit de l’incompétence. La réalité est que les " institutions ", à force d’élever des murailles entre la poésie et la vie, se sont mises dans l’impossibilité de penser quelque solution que ce soit à ce type de problème. C’est peut-être cela, aujourd’hui, l’exception culturelle française...
Et pour en finir avec nos sinistres, encore ceci : y a-t-il eu, de la part des pouvoirs publics et de leurs institutions, réelle motivation pour sauver le patrimoine du surréalisme ? Je ne suis pas dans le secret des dieux, donc je me contente de m’interroger. Et cette question, je me la pose sérieusement pour la raison suivante. De deux choses l’une :
1) soit l’on considère l’œuvre d’André Breton (et, par extension, le surréalisme) comme partie intégrante de notre héritage culturel en ce qu’elle constitue une page majeure de l’histoire des arts et de la poésie, et le 42 rue Fontaine vaut d’être préservé dans la forme même que lui avait donnée son concepteur. Auquel cas, il n’y a pas à tergiverser. Quand on veut, on peut.
2) soit l’on ne considère pas André Breton (et, par extension, le surréalisme) comme suffisamment important pour consentir un quelconque effort. Ce que je crains. N’oublions pas que l’institution est capable de tolérer à la direction du musée Picasso un Jean Clair, le même qui dénonçait dans le quotidien Le Monde du 21 novembre 2001 la responsabilité des surréalistes dans l’attentat du 11 septembre contre le World Trade Center de New York ! Que peut-on attendre de cette engeance-là ?
Oui, il y avait à inventer, pour sauver la rue Fontaine, une manière de préserver une mémoire. Sans céder à la tentation d’élever un culte à son occupant. Un mausolée Breton ? Risible ! (et Breton au panthéon, ça n’aurait rien changé au problème !). L’occasion était belle. Elle aurait même pu faire école pour d’autres lieux et ainsi nourrir une réflexion à partir des expériences en cours sur la conservation de lieux comme éléments constituants d’un patrimoine culturel. Il existe déjà des maisons d’écrivains, en France. Encore faut-il, quand est haut perché sur ses certitudes, manifester à leur égard un minimum de curiosité...
Sauver l’appartement de la rue Fontaine et son contenu ? D’accord bien sûr pour pétitionner, manifester. D’accord pour mettre le doigt là où ça fait mal, je veux dire : dénoncer tout ce qui fait qu’aujourd’hui, une telle vente aux enchères est possible.
Le XXIème siècle commence bien : André Breton est à l’encan ! " A quoi bon des poètes en un temps de manque ? ", s’interrogeait Holderlin. N’est-ce pas le moment de reposer la question ? Et d’y répondre.
Serge Bonnery
pour dire que chantiers.org s’associe à votre initiative

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François Bon (extrait d'un message à Jean-Marie Barnaud, mardi 24 déc)
du mal à savoir précisément ce qui choque – l'utilisation des phrases de Breton lui-même pour dire qu'il ne souhaite pas de traces, convoquées pour faire du fric, oui ça me choque – encore ils ne savent pas où aller les chercher, hors dans le Breton très jeune – je sais bien qu'il dit, justement dans le chapitre de la cuiller "j'aimerais que ma vie ne laissât après elle d'autre murmure que celui d'une chanson de guetteur" (L'Amour Fou, donc 1934) mais ce déploiement marchand devient obscène si on le colle à la phrase qui, justement, dit pourquoi il a eu cette pulsion d'acheter la vieille cuiller en bois
je crois que de tels endroits nous aident à croire chacun à notre "poulailler" d'écriture personnel, même si on n'y a pas chacun, comme toi, le ciel bleu et les citronniers
je pensais à l'humilité de la chambre de Louis Guilloux, restée telle quelle, avec les pipes et les plumes, dans les hauts de Saint-Brieuc, et en dessous une turne aménagée pour un écrivain en résidence, à peine payé, qui intervient dans les écoles primaires - est-ce si difficile de trouver une solution de ce genre ?

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tout reconstituer au détail près (la poussière, dit Gracq), à l'identique évidemment (rien n'a bougé, dit Gracq) dans une structure inviolable de verre, hermétiquement scellée, sous atmosphère neutre – la structure peut-être exposée de façon fixe, sous la verrière du Grand Palais au moment du salon du livre, ou place Blanche à Pigalle chaque jour anniversaire de la publication du 1er manifeste surréaliste (vers une fête nationale surréaliste pour remplacer une des fêtes catholiques obsolètes/obligatoires : l'ascension par exemple, et on l'appellerait le "pont surréaliste"), ou sur la terrasse supérieure de Beaubourg, et libérée sur demande pour être transportée par camion dans chaque ville qui en souhaiterait provisoirement la présence – et tout autour du camion les portraits géants des 12 surréalistes (Aragon, Artaud, Breton, Char, Crevel, Desnos, Eluard, Ernst, Man Ray et trois autres au choix ou par rotation), par exemple à 12 m de rayon, en 4m sur 6, et de chaque portrait dressé à l'air libre une diffusion sonore continue de l'oeuvre oralisée de chacun – la convergence avec fête foraine ou stand de sommeil hypnotique serait valorisée (à suivre) – quelle que soit la solution envisagée, la collection doit d'abord intégralement être préemptée, moules à gaufre inclus, par l'état français – par exemple grâce à une ponction punitive sur le groupe Total ou une ponction préventive sur les banques de Monaco, par une Mini-Tobin à 0,00001% sur les transactions boursières pendant 21 jours ou simplement par marche arrière sur les 4,75% supprimés cette année du budget de la culture: les financements existent
Ruth Szafranski

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L'idée de l'image par l'image, la notion de surréalisme dans l'acceptation du terme et dans sa connotation actuelle, internet...etc, oui, ça fait réfléchir de préserver, reconstruire l'appartement de Breton, à Saint Dizier ou ailleurs -non, à Saint Dizier, bien sûr...-, personellement, j'imagine cet appartement entierement refait et vide, sans visiteur, juste avec un réseau de webcam, un site comme Phil de Jonckheere sait les faire, permettant une visite virtuelle en permanence. Effectivement, la vente Breton n'est qu'un point de départ...
Thierry Beinstingel

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transmis par le site Fabula à ses 4000 abonnés, le lundi 23 décembre, avec reprise du texte de Laurent Margantin:
"Fabula s'associe à l'étonnement peiné de François Bon et Laurent Margantin" – Alexandre Gefen
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transmis par [bulletin] remue.net, le lundi 23 décembre

vente Breton, moules à gaufre
le descriptif ci-dessous montre bien bien l'enjeu qu'il y aurait à résister à la dispersion marchande : tout cela ne vaut qu'ensemble, et dans la disposition qu'avait inventée Breton dans son appartement de la rue Fontaine
nous complétons par des extraits de presse : leurs yeux s'agrandissent, ils comptent déjà les billets...
le 10 avril 2003, remue.net association se portera symboliquement acquéreur de "la célèbre cuillère de l'Amour Fou"
FB

vente Breton, l'inventaire
Ensemble de 500 lots de manuscrits comportant entre autres des dossiers concernant les “ Jeux surréalistes ”, l’époque des “ sommeils ”, les thèmes astrologiques, des manuscrits autographes de Breton, le dossier Nadja, Arcane 17, …
Ensemble de 3 500 lots de livres comprenant les œuvres de Breton, des livres portant un envoi autographe à Breton (Freud, Trotski, Apollinaire, etc.), catalogues de peinture, revues importantes (La révolution surréaliste, Littérature)…
Ensemble de 200 pièces collectées par André Breton dont une collection de moules à gaufres et à hosties, deux collections de bénitiers, un ensemble de statuettes et de tableaux mexicains et des objets célèbres dont la cuillère de l’Amour fou.
Ensemble d’environ 150 objets océaniens et amérindiens comprenant des œuvres majeures (statue Tolaï pour l’Océanie, rares masques esquimaux et Haïda pour les Amériques) ainsi que des simples casse-têtes kanaks ou des poupées Hopi.
Ensemble de 450 tableaux, sculptures, dessins et collages comprenant des œuvres de visionnaires (Zötl), de révoltés (Trouille), de naïfs, des dessins de Breton, des Cadavres exquis, les fameuses cartes du Tarot de Marseille ainsi que des œuvres de Arp, Brauner, Dominguez, Magritte, Miró, Molinier, Picabia.
Ensemble de 500 lots de photographies modernes : comprenant des oeuvres d’art (Bellmer, Ubac, Alvarez Bravo), les archives des expositions (Man Ray, Ubac, Denise Bellon), des illustrations des œuvres ainsi que des albums de famille, un ensemble de photos d’Elisa Breton et des photographies de travail.

dossier de presse, suite
sur remue.net, l'article du Monde, et celui du New York Times - mais ces quelques extraits sont parlants :

Art and Auction. Etats-Unis
"I believe it is into my thought that I put all my daring, all the strength and hope of wich I am capable, it possesses me entirely, jealously and makes a mockery of wordly goods." Be that as it may, André Breton sure had a lot of wordly goods. Since the death of "le Pape du Surréalisme" in 1966, his wife, Elisa, and daughter, Aube, have taken great pains to preserve his three-room studio at 42 Rue Fontaine in Paris, complete with his archives and extensive personal collection, as a research center, a so-called Palais Idéal du Surréalisme (nothing about Breton's movement was without a heavy helping of mystagogy). But the French government wasn't bying it, literally, and so his daughter has decided to put it on the market. Commissaires-Priseurs Calmels Cohen are gathering around 5,000 lots - some 400 paintings, drawings and sculptures ; 1,500 photographs; close to 3,500 books ; and 150 works of tribal art - for a marathon 10-day dispersal starting on April 1. The total estimate is E30 million to E40 million. [...]

15/11/02 - Le Marché L'Hebdomadaire du dirigeant. Belgique
En avril prochain, l’étude parisienne Calmels-Cohen mettra aux enchères le contenu de l’atelier d’André Breton. Pas moins de 11 catalogues illustrent cette vente pour le moins éclectique, à l’image de ce maître du surréalisme. Le tout est estimé entre 30 et 40 millions d’euros. Côté classique, la vente comprendra quelque 400 tableaux, dessins, sculptures, signés entre autres Dali, Magritte, Picasso, Miro,… mais également 1.500 tirages photos dont des Man Ray, proche de Breton, un fonds d’archives, 500 manuscrits, 150 objets d’art amérindien et océanien… [...]
09/11/02 - Frankfurter Allgemeine. Allemagne

Bretons Sammlungen - Versteigerung im Pariser Drouot
Das Pariser Auktionshaus Calmels Cohen versteigert vom 1. bis 18. April 2003 im Hôtel Drouot den Inhalt der Wohnung von André Breton. Das einzigartige Konvolut von mehreren tausend Objekten, Gemälden, Skulpturen, Fotografien, Stammeskunst, Büchern und Autographen, die der Dichter und Denker des Surrealismus im Lauf der Jahrsehnte zusammentrug, wird auf dreissig bis vierzig Millionen Euro geschätzt. Die Wohnung - und gleichzeitig das Atelier - in der Rue Fontaine Nr. 42 unweit von Montmartre und Pigalle wurde seit dem Tod Bretons im Jahr 1966 von seiner Witwer Elisa und bis heute von seiner Tochter Aube und der Enkelin Oona wie ein Heiligtum gehütet. [...] A.H.

Les Echos, Marché de l'art. Par Judith Benhamou-Huet
Une vente à Drouot consacrée au surréaliste André Breton
C'est l'évènement le plus important des dernières années sur la place parisienne [...] Les onze catalogues de vente réunissent un important ensemble d'objets accumulés par cet érudit pendant trente ans dans sa demeure du 42, de la rue Fontaine. Le tout est estimé pour 30 à 40 millions d'euros. [...] L'ensemble appartient à la fille du poète, Aube Breton. Depuis la mort d'André Breton en 1966 elle avait religieusement gardé le contenu de l'appartement dans lequel il avait vécu pendant plusieurs dizaines d'années.

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François Bon, lundi 23 décembre, lettre à Julien Gracq
cher Julien Gracq,
je ne sais, vous qui avez tant traversé, si vous trouvez quelque intérêt à la lecture des journaux – mais, ce dimanche matin, comment ne pas penser à vos pages "Chez André Breton" en découvrant ceci dans Le Monde – comment ne pas penser à votre réflexion "il y avait ici un refuge contre tout le machinal du monde", en apprenant que ce lieu, même secret et inaccessible, allait passer aux mains spéculatives, aux mains marchandes –
je ne vous en préviens pas pour provoquer ou partager une tristesse (comme j'avais pensé à vous, une fois, en découvrant la piste pour 4x4 et le parking bitumé à Tréhorenteucq) mais parce que sans doute on pourrait encore faire pression sur les grandes institutions publiques pour qu'elles se portent acquéreur de l'essentiel...
les moules à gaufres et à hosties, et même, précise le commissaire-priseur "la célèbre cuiller de l'Amour Fou": quel triste arrangement de langage...
il nous restera toujours vos pages – une fois de plus, la trace llittéraire, presque mystique, où vous aurez pris le relais de Nerval et d'autres, mais si rares [...]
j'espère que la coupure du Monde, que je vous joins, ne vous attristera pas – nous devons quand même résister ? on a l'impression que le surréalisme, sa subversion, sa transgression, ne compte plus comme valeur – 
après tout, il ne nous reste rien de Lautréamont, et le rêve n'en est que plus puissant – mais, en sauvant les moules à gaufres et le les oiseaux empaillés de Breton, est-ce qu'on n'entoure pas plus précautionneusement notre rêve, notre besoin de rêve, là où c'est Lautréamont qui l'incarne?
la Loire en hiver, quand elle sort de la brume, dans les lumières du matin, nous remet dans la force, j'imagine que vous regardez l'île Batailleuse
avec mes meilleurs voeux de santé et de moral, et l'habituel respect
FB