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Rahmy / Une fin des certitudes |
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Chronique n° 10 Ilya Prigogine, le devenir du Chant
Ilya Prigogine : "Prix Nobel de chimie en 1977 pour ses contributions à la thermodynamique des processus irréversibles, Ilya Prigogine est l'une des grandes figures scientifiques de notre temps. Il aborda dès 1945 l'étude des processus irréversibles, qui l'ont amené à développer un intérêt récurrent pour le concept de temps". Quel écrivain contemporain se risque à questionner le scientifique, un peu à la façon d'un Voltaire avec Newton, à rédiger un "Éléments de la philosophie de Prigogine pour la littérature" ou à frotter son écriture aux équations de son temps? Plus rare encore celui qui est à la fois écrivain et philosophe des sciences, qui décloisonne les disciplines et tente l'élaboration de passerelles stylistiques et éthiques entre l'univers de la physique et le monde des lettres (le principe de décohérence quantique s'avère par exemple extrêmement riche pour cerner le statut du mot chez Ponge ou Tarkos...). Il ne s'agit pas de promouvoir un gadget vulgarisé pour "faire intelligent" dans les livres d'art, mais bien d'oser penser la littérature comme on pense aujourd'hui la matière. Les physiciens n'ont pas le temps de la démarche, trop occupés aux applications concrètes de leurs équations. C'est aux lettreux de faire l'effort pour s'affranchir d'une compréhension du monde très en vogue au 19e siècle! "Nous assistons à l'émergence d'une science qui n'est plus limitée à des situations simplifiées, idéalisées, mais nous met en face de la complexité du monde réel, une science qui permet à la créativité humaine de se vivre comme l'expression singulière d'un trait fondamental commun à tous les niveaux de la nature" (Ilya Prigogine, La Fin des Certitudes, Odile Jacob 1996, p.16). Quelques-unes unes des questions posées sont "comment concevoir la créativité humaine ou comment penser l'éthique dans un monde déterministe?"(id., p.15). Je trouve à la position théorique de Prigogine sur le chaos (du moins à ce que je peux en saisir) une audace et une dimension considérables qui ne m'inspire pas directement mais qui, comme dirait Bacon, m'influence, me parle infiniment. Sa discussion du clinamen d'Épicure qui recentre et éclaire l'éternel débat déterminisme/liberté en le subordonnant au devenir témoigne d'une "générosité" qui ancre la matière de Newton, d'Einstein, de Hawking (et ses lois déterministes) dans un milieu absolument ouvert où se déploie le Possible et non plus le Certain, ni le certainement prouvable. Je dis générosité car il me semble qu'in fine, c'est un acte de foi. Je dis aussi générosité car ses propositions alimentent le travail du littéraire, ne serait-ce que pour lui permettre de repenser son rapport au temps, hors déploration, hors nostalgie, hors fantasme. Le littéraire méprise la flèche du temps, il se joue de l'irréversible et c'est en cela, sans doute, qu'il manque d'assise. Or la lettre dispose aujourd'hui d'un outil capable de la disposer mieux au sérieux du monde. Cet outil, c'est le temps de Prigogine, un mouvement asymétrique affranchi de l'Origine, le parfait Devenir pour une affirmation du multiple et de la dissémination. "Un jour les dieux se retirent. [...] Ce qui reste se divise donc aussitôt en deux : l'histoire et la vérité. L'une et l'autre sont la même origine et se rapportent à la même chose : à la même présence qui s'est retirée. Son retrait se manifeste donc comme le trait qui sépare les deux, l'histoire et la vérité." (Jean-Luc Nancy 2001) ... non, rien ne se retire, la trace de parole n'est pas ligne de partage entre vérité et histoire, mais témoignage du délitement permanent dont le devenir procède. Le temps n'est pas réversible nous dit Prigogine, le fleuve ne remonte pas à sa source et les dieux en mouvement trouvent à l'indétermination de leur trajectoire plongeante la richesse d'un milieu exclusivement voué aux Apparitions... On lance l'appel ! |
liens Prigogine Ircam
/ centre Pompidou : un entretien avec Ilya Prigogine
sur le temps |
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Complément 1 deux hommes de science et d'écriture,
dont à remue.net on est quelques-uns à ne jamais manquer
les publications - un philosophe du temps : Étienne
Klein. Les Temps de la physique à suivre aussi: Jean-Marc
Lévy-Leblond, bio/biblio Éthique de la communication
et art d'écrire.
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Complément
2 Gadamer Shaftesbury
et les Lumières anglaises |