j’ai connu le corps de ma mère
« Voilà le patrimoine familial / À ciel ouvert », Gladys Brégeon
« Je me souviens de ses genoux
De ses chevilles
De la forme de son pied au repos
De son dos
Cette courbe que j’ai massée
Sous laquelle tout la tuait
Sa douceur
Sa maigreur »
Elle note avec brièveté et précision les manques, les habitudes, les moments de bien-être, les muscles tendus, détendus, la souplesse, la vivacité, la respiration calme ou haletante, la subtile mécanique d’un corps qui tourne rond avant de se dérégler, provoquant par là même un autre déraillement, plus intérieur et profond, qui laisse les témoins hagards et sans voix.
« Je ne comprends pas ce qu’elle me dit
Dieu
Des visites
Ma sœur
La sienne
Les prolongations
Dit-elle »
Il faut peu de mots, et peu de pages, à Gladys Brégeon pour toucher de près le départ de celle qui s’éloigne du « centre-vie ». Son livre, hommage - et tombeau - à « Celle d’où je viens / Ma mère », est simple et concis. D’une grande sobriété. Et d’une infinie délicatesse.
« Le corps
Qu’allons-nous faire sans le corps
Et avec
Qu’allons-nous faire du corps »
Gladys Brégeon : j’ai connu le corps de ma mère, éditions Isabelle Sauvage.