Note de lecture : le Château de Cène, la Sensure par Ronald Klapka
La parution du catalogue de la collection L'Imaginaire a suscité chez certains libraires la réalisation d'étals de ces publications en poche de titres qui ont pour certains de quoi changer la vie de leurs jeunes et moins jeunes lecteurs. Au hasard, l'oeil s'est posé sur le Bleu du ciel, Lourdes, lentes, W, Le Château de Cène. Il y en a, heureusement, bien d'autres encore. Evoquée dans Le Sens la Sensure (réimpression Talus d'approche ; 1996), la correspondance avec Serge Fauchereau, dans un chapitre intitulé La pornographie est particulièrement précieuse pour saisir une époque, l'advenue d'un écrivain de tout premier plan, des malentendus qui persistent et la pertinence toujours actuelle du néologisme apparu dans l'Outrage aux mots (1975) qui figure également dans cette édition du Château de Cène. Si certains épisodes du récit ont pu valoir à l'auteur les foudres de la justice, et le classement dans les ouvrages érotiques d'un bon écrivain (voir l'Encyclopedia of Erotic Literature), une analyse plus serrée comme celle d'Anne Malaprade (revue Prétexte) met en évidence la traversée des s(censures , et combien il est difficile d'être libre sous le régime de la liberté, quand l'enjeu de l'écriture dans la restitution d'états extrêmes (le viol par les chiens par exemple) est le moyen de lever une autocensure. On comprend ainsi qu'un entretien avec Dominique Sampiero ait pour titre : Bernard Noël, l'écriture comme résistance, ou que l'affolement de la perte puisse avoir pour nom Syndrome de Gramsci, ou encore Castration mentale. On ne s'étonnera guère non plus que de belles pages sur Bernard Noël figurent sur remue.net, dont les siennes sur Artaud.
Bernard Noël / LE CHÂTEAU DE CÈNE
suivi de LE CHÂTEAU DE HORS, L'OUTRAGE AUX MOTS et de LA PORNOGRAPHIE
[1990] , 182 pages, 130 x 215 mm. Collection L'Arpenteur, Gallimard -rom.
ISBN 2070780325. «Être inacceptable... Il ne s'agissait pas de faire scandale ni violence, mais de céder à l'emportement d'une révolte qui, en soulevant l'imagination, combattait la censure intérieure et la réserve timide. L'écriture fut en touts cas un moment de jubilation et de liberté intenses, car être inacceptable conduit simplement à ne pas accepter les oppressions de l'ordre moral et de sa propre soumission. Ce livre, poursuivi pour outrage aux moeurs, est-il devenu inoffensif ? Ou bien la censure s'est-elle faite plus subtile en privant de sens - donc de plaisir - aussi bien les excès imaginaires que les valeurs raisonnables ?» Bernard Noël. |