Un polar, forme étonnante, écrit
par cette grande dame du journalisme, l’auteur de «L’hypothèse
du désert» qu’il est urgent de (re)lire en cette
période de guerre imminente, de « Blue moon »,
de « La vie là-bas comme le cours de l’oued »
des « Innocents » ou le héros est Dieu, tous
publiés chez Gallimard.
Mais si l’histoire est simple les personnages
le sont moins.
La victime s’appelle Mathilde, elle aime
trop le rouge et elle parle trop.
Le coupable nous est donné d’emblée,
le mari, Klein Simon : psychanalyste, traîne un passé
de fillette, n’écoute de ses clients que ce qui peut
lui servir, capte leurs mots à son propre usage. Décide
de tuer sa femme parce que le monde n’a pas de bout.
Le flic enquête avec le vocabulaire convenu. Il traîne
un passé dont il croit avoir triomphé. On sent bien
que tout ça le gave. Le meurtre mondain. Les psy. Les bourgeoises
et les mômes de bourgeoise. Il se soigne au Gaviscon.
Tout cela donne un livre en deux couleurs rouge
et noir sur fond gris.
Un meurtre, réfléchi, construit,
imaginé, rêvé, peut-être.
Une enquête policière menée
par intuition, ralentie par culpabilité.
Du psychanalyste au policier qui est le coupable,
qui est le lâche, qui a le courage d’affronter son histoire
?
La victime compte peu. Une dame rouge sur fond
noir, peu aimée, peu aimante, juste un miroir social.
Du mauvais usage de la psychologie, de l’analyse
des mots par des policiers amateurs, du bon usage présumé
des mots dans le cabinet du psychiatre.
Dominique Sigaud nous parle des distorsions de la parole. Du double
sens des mots, de leur re-composition absurde ou éloquente.
Elle nous parle aussi de la vérité
et de la surprise éprouvée quand elle surgit parce
qu’en général on se tuerait plutôt que
de la dire.
On peut tuer quelqu’un pour tuer en soi quelque
chose. Tue = tué.
« Fin du feint de la feinte et du feinté
» dit Dominique Sigaud.
MS
Dominique
Sigaud / DE CHAPE ET DE PLOMB
BLANCHE . 256 pages - 15,90 € Sur Mathilde Klein, retrouvée
noyée devant l'étrave d'une péniche, on ne
saura pas grand-chose. Devant Baptiste Dridi, l'enquêteur
d'origine algérienne chargé de l'enquête, son
mari Simon Klein, psychanalyste reconnu, soutiendra jusqu'au bout
l'hypothèse du suicide. Le policier, à la mémoire
troublée par le suicide de sa propre mère quand il
était enfant, est tenté de le croire. Simon Klein,
jaugeant avec une froideur lucide les faiblesses des êtres
humains qu'il a appris à bien connaître à travers
ses patients, son fils, sa femme et les cercles intellectuels qu'elle
fréquentait, dresse un constat sans espoir des petitesses
intimes et des compromis sociaux.
Dominique Sigaud nous entraîne progressivement dans une plongée
glaciale vers les arrière-pensées des deux narrateurs.
À travers leur confrontation, se dessine un portrait rageur,
amer et violent de la société contemporaine.
DE CHAPE ET DE PLOMB [2003], 256 pages, 140 x 205 mm. Collection
blanche (2002), Gallimard -rom. ISBN 2070768171. Parution : 09/01/03.
De chape et de plomb
de Dominique Sigaud, Gallimard
par Michèle Sales
Un polar, forme étonnante, écrit par cette grande dame du journalisme, l’auteur de «L’hypothèse du désert» qu’il est urgent de (re)lire en cette période de guerre imminente, de « Blue moon », de « La vie là-bas comme le cours de l’oued » des « Innocents » ou le héros est Dieu, tous publiés chez Gallimard.
Mais si l’histoire est simple les personnages le sont moins.
La victime s’appelle Mathilde, elle aime trop le rouge et elle parle trop.
Le coupable nous est donné d’emblée, le mari, Klein Simon : psychanalyste, traîne un passé de fillette, n’écoute de ses clients que ce qui peut lui servir, capte leurs mots à son propre usage. Décide de tuer sa femme parce que le monde n’a pas de bout.
Le flic enquête avec le vocabulaire convenu. Il traîne un passé dont il croit avoir triomphé. On sent bien que tout ça le gave. Le meurtre mondain. Les psy. Les bourgeoises et les mômes de bourgeoise. Il se soigne au Gaviscon.
Tout cela donne un livre en deux couleurs rouge et noir sur fond gris.
Un meurtre, réfléchi, construit, imaginé, rêvé, peut-être.
Une enquête policière menée par intuition, ralentie par culpabilité.
Du psychanalyste au policier qui est le coupable, qui est le lâche, qui a le courage d’affronter son histoire ?
La victime compte peu. Une dame rouge sur fond noir, peu aimée, peu aimante, juste un miroir social.
Du mauvais usage de la psychologie, de l’analyse des mots par des policiers amateurs, du bon usage présumé des mots dans le cabinet du psychiatre.
Dominique Sigaud nous parle des distorsions de la parole. Du double sens des mots, de leur re-composition absurde ou éloquente.
Elle nous parle aussi de la vérité et de la surprise éprouvée quand elle surgit parce qu’en général on se tuerait plutôt que de la dire.
On peut tuer quelqu’un pour tuer en soi quelque chose. Tue = tué.
« Fin du feint de la feinte et du feinté » dit Dominique Sigaud.
MS
Dominique Sigaud / DE CHAPE ET DE PLOMB
BLANCHE . 256 pages - 15,90 € Sur Mathilde Klein, retrouvée noyée devant l'étrave d'une péniche, on ne saura pas grand-chose. Devant Baptiste Dridi, l'enquêteur d'origine algérienne chargé de l'enquête, son mari Simon Klein, psychanalyste reconnu, soutiendra jusqu'au bout l'hypothèse du suicide. Le policier, à la mémoire troublée par le suicide de sa propre mère quand il était enfant, est tenté de le croire. Simon Klein, jaugeant avec une froideur lucide les faiblesses des êtres humains qu'il a appris à bien connaître à travers ses patients, son fils, sa femme et les cercles intellectuels qu'elle fréquentait, dresse un constat sans espoir des petitesses intimes et des compromis sociaux.
Dominique Sigaud nous entraîne progressivement dans une plongée glaciale vers les arrière-pensées des deux narrateurs. À travers leur confrontation, se dessine un portrait rageur, amer et violent de la société contemporaine.
DE CHAPE ET DE PLOMB [2003], 256 pages, 140 x 205 mm. Collection blanche (2002), Gallimard -rom. ISBN 2070768171. Parution : 09/01/03.