Crues

Extrait du Régional du 27 janvier 1910 :

« La jolie rivière que tant de touristes viennent admirer chaque année roule furieusement, aujourd’hui, des flots d’une eau jaune sale à une vitesse de plus de deux mètres à la seconde.

Le niveau atteint 2,80 m au-dessus du niveau normal. La plaine est envahie en amont et en aval de Beaumont et de Persan donnant ainsi l’aspect de lacs, desquels émergent quelques arbres et, de loin en loin, quelques meules de paille.

Le chemin de halage, en aval du pont, est submergé à partir de la teinturerie ; l’accès de l’usine Hilaret et Huguet n’est plus possible que par le chemin de fer. Les papeteries de l’Auto, situées, comme l’usine Hilaret, dans la plaine, entre la gare et l’Oise, sont totalement isolées, sauf par le raccordement du chemin de fer.

L’usine a d’ailleurs suspendu son exploitation depuis lundi : les sous-sols sont inondés et l’on a de graves appréhensions au sujet de l’état des dynamos. Les magasins eux-mêmes sont menacés par les eaux et, en toute hâte, on déménage dans de nombreux wagons tout le papier préfabriqué. Des piles de bois servant à la fabrication et représentant une valeur de 200 000 francs peuvent, d’un moment à l’autre, être emportées par les flots.

L’usine de la soie a sa chambre des chaudières très menacée aussi.
Du côté du petit ru de décharge de Persan, venant se jeter dans l’Oise près de la pompe du chemin de fer, l’envahissement est complet, tous les jardins sont submergés. Le chantier de bois de l’usine Belvalette est inondé également, et la crue a causé de graves dommages ; là aussi, la chaudière est menacée par les eaux.

Sur la rive gauche, les bateaux-lavoirs et le bateau-conférences sont l’objet de préoccupations constantes de la part des propriétaires.

La route allant du pont au cimetière de Beaumont est submergée depuis l’angle de la rue Perrine.

En aval, les chantiers Billoin et Pasdeloup, ainsi qu’une partie de l’usine de Blanc, sont sous l’eau.

Partout de l’eau et encore de l’eau. L’île de Champagne est couverte, l’écluse de l’Isle-Adam est débordée et l’éclusier ne peut quitter son domicile qu’en bateau.

Cette crue, plus importante que celles de 1898, 1882 et 1876, semble près d’avoir atteint son maximum. Ce ne serait pas dommage, car elle n’apporte avec elle que ruines et désolation.

Même désolation plus bas : le feu de Saint-Jean est un lac et on nous prédit l’arrêt de services d’eau et de gaz si la crue augmente car les machines menacent d’être submergées.

Dans certaines maisons, près de l’église, l’eau est dans les caves. Quelques centimètres encore, et la place du Patis sera transformée en lac.

Nous espérons bien en vous, bon père Neptune ! Faites cesser l’état actuel et nous vous promettons de vous demander votre trop-plein cet été !

Quelques détails de dernière heure : à l’Isle-Adam, l’île Pain est à demi submergée. De Champagne à Valmondois, l’Oise a envahi la plaine qui la sépare de la voie ferrée, de façon que les trains circulent pour ainsi dire sur l’eau. »


Parce que le niveau monte : Montée des eaux (Pierre Senges)


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3 août 2010
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