François Monaville | paroles d r b

La série de textes intitulée paroles d r b a été écrite à partir de fragments prélevés au hasard dans une autre série de textes intitulée « paroles dérobées ».

De François Monaville lire aussi voix enregistrées.


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1
tu attends lundi
avec impatience
mais tu sens déjà
que ça bouge
que ça remue
les portes de la
voiture s’ouvrent
se referment les
images à la fenêtre
s’accrochent se
détachent bienve
nue à bord

accélération

autos
motos
camions
dans la fosse
se précipitent

à l’intérieur
de ton pied
quelque chose
remue

c’est peut-être
un oiseau un
cheveu ou
une plume

2
le pay
sage
défile

sur le
côté
trois
corps
éjectés
presque
nus mu
gissent

on entend
résonner
guitare
organes
larsens
cerveaux
cœurs
usines

3
si tu regardes
ce qui est
dessiné sur
le grand panneau
tu aperçois une
vache fais
attention elle
a peut-être
laissé des traces
ça glisse la
voiture dérape
zoom elle se
retourne reste
en suspension
quelques instants
puis les deux corps
à l’intérieur se
fracassent le
crâne

en
vain
ils tentent
de se dégager

4
leur cerveau
ne répond plus
mais qu’est-ce
qu’il fabrique
il faudrait qu’il
se magne quelque
chose se rapproche
quelque chose est
en train de zoom
tu vois tes besoins
tes envies si tu veux
tu peux en parler à
ton concessionnaire
j’veux dire van
der elst n’est
presque plus
vierge depuis
déjà

5
si tu regardes
la séquence au
ralenti tu aperçois
le corps de la laitière
elle tombe valdingue
à trois mètres je
pense que c’est
la sauce ou les fils
électriques qui ont
peut-être fait que
zoom elle a glissé
elle s’est fracassée
contre la borne

quoi qu’on en
dise à la fin de
la séquence elle
se relève
et

6
images
rythmes
mélodies
pics ponts
chaussée elle
arrive brutale
poings serrés
lumière flash
l’herbe s’enroule
se rétracte ses yeux
s’enflamment
elle s’empare
de la faucille de
la tondeuse et
cisaille les herbes
qui s’engouffrent
à l’intérieur de
sa bouche

7
se procurer
un homme dans
un costume en
plastique ça risque
d’être long il nous
faudrait un homme
qui puisse balayer
l’espace avec
ses bras

lorsqu’il l’
aperçoit l’
homme à la
peau élastique
ça va de soi
allonge les bras
puis le corps
recouvert de
boue se dirige
vers la laitière

on
entend
vibrer
cordes
basses
triangle

8
depuis quelques
jours à l’hôpital
il entend le bruit
d’un battement
de grands écarts
de tension et au
niveau expérience
une tranche de porc
à avaler chaque
matin avec des
enceintes spéciales
accentuant le
vrombissement
intérieur

9
aujourd’hui
il a mis un
pull un pull
en laine il redé
marre au quart
de tour il s’adapte
il porte un pantalon
en velours brun

avec une pastille
il réactive ses
neurones et
fonce

de petites taches
jaunes et blanches
recouvrent
sa peau

10
elle bouge
à l’intérieur
dedans à l’
intérieur elle
bouge

elle fait le vide et
disparaît de l’écran
avec ses bras qui
se prolongent
à l’extérieur
ça bout ça va
bientôt sortir
tu le sens

11
je devrais me
taire mais suis
persuadé que
c’est un pull
un pull qui
s’ouvre à
mon insu

il prend
possession
de ma
peau

la
recouvre
de petites taches
de petites taches
jaunes et blanches

je devrais
me taire mais
mes pieds s’en
foncent dans
la terre dans
la suie le sable
la boue ils sont
encore en bon
état je les ai
donc encore
enrobés de
plastique

12
dans
mon
assiette
j’me traîne
avec des
douleurs
partout
j’ai décidé
de faire
le vide
des nerfs
du corps
de la tête

il faut
qu’ils
aspirent
le liquide au
fond du foie

ils me
soignent
je suis à
l’hôpital

13
au bureau on a eu
que des merdes
des messages
pour me dire
procès sur ta
gueule et on m’a
dit ne pas bouger
ça donne envie de
rien foutre mais bon
le poste je le regarde
c’est normal les gens
ont trop de pognon
en réalité d’abord
se lèvent et quittent
la scène attention
le speaker annonce
à l’instant qui que
je le savais il allait
m’avait-il dit se
refaire une
nouvelle
gueule

14
qu’elle me suive
de près la langue
s’enfonce dans
l’herbe zoom
blessures elle
se rapproche
je la vois elle est
à genoux devant
l’écran murmure
mon corps me
rattrape plus
fort encore
plus fort
plus fort
je t’en
supplie

15
tu sais
aujourd’hui
deux clients
m’ont dit
j’ai été boire
tu vois rien de
spécial pas de
quoi se tirer une
balle quoi faire
d’autre en
attendant
le visage du
présentateur
un jour où
l’autre passe
à travers
l’écran

16
la bête est
de retour
c’est un opus
ambitieux les
guitares ragent
les rythmes
nous font
barrage ils
détruisent
percussions
bois briques

je suis
persuadé
qu’ils m’en
registrent

17
parler c’est
révéler quelque
chose il a parlé
on l’a vu
dégorger de
longs flots de
paroles

à travers
l’écran un
corps se
jette tu vois
comment le
monde s’ex
prime le monde
est un porc
je l’ai mille
fois mérité
frappe-moi
je me roule
à terre les
yeux crevés

18
costume de
poils roux
sur un pied
traverse le
village zoom
gros plan sur du
lait mousseux
sur du sang

il nous dit
pour écrire
il faut percuter
l’arbre l’arbre
tombe arrache
tout tout d’un
coup tout bascule
l’homme endormi
sur le banc se ré
veille avec le
cerveau qui re
bondit dans l’
air et s’écrase
crie hurle
splash
zoom
zoom
le vieil
homme


Image de Jean-Claro Martin.

28 mars 2010
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