Terre d’accueil
Ouvrir la fenêtre. Poser le pied sur le rebord. Sauter. Tout cela, non pas calmement, mais dans la précipitation. Parce qu’il y a des bruits qui viennent du couloir, ou de dehors. Est-ce qu’on ferme les yeux en tombant ? Le temps de voir se rapprocher la terre, la terre d’accueil qui va enfin vous ouvrir les bras, dans la mort ?
Le vide qu’on rencontre dans la chute, c’est le vide même de la boîte aux lettres où l’on attend depuis des années une bonne nouvelle de la préfecture, c’est le vide des rues dans lesquelles on erre, sans statut, sans rien, c’est le vide juridique de ceux qu’on ne peut ni renvoyer, ni accueillir. Lorsqu’on n’a plus (de) lieu, plus d’existence, sinon fantomale, alors, oui, il reste ce vide, que l’on rejoint, pour en finir.
Ceci n’est pas de la littérature. C’est le scandale qui perdure, chaque jour, partout, en France, en Europe. Ce n’est pas de la littérature, parce que la littérature ne crie pas. Et il faut crier.