à Patrick
Souchon
on avance
on avance place tien an men tu la voyais pas comme ça
l’histoire jogging du dimanche autour de la cité interdite
la langue à l’œuvre on avance on mélange
à
l’amertume la mélancolie dans une chanson la nostalgie comme
l’opium gangrène la nostalgie n’est plus
une radio on l’écoute vingt ans déjà vingt ans
après ce n’est pas de la nostalgie la rapsodie même
si ça rime avec vieux genre ressuscité genre ancien même
si tout ça lié
si elle injuste parodie l’épopée hector ulysse en particulier
un peu ridicule dans sa grandiloquence armée médiocre tricheur – pas
hector si beau en cadavre homérique héroïque - mais
ulysse
la tromperie en modèle sa jactance on appelle ça la ruse
et c’est très bien côté du côté de
la rhétorique
ce que le rapsode veut c’est crier c’est comme glissant glisser
du cri antillais à la parole nue relater la colère et parler
d’eux de tous ceux-là qui l’entourent en leur cité close
leur parler votre vie est une rapsodie
partageable entre tous ceci est mon roman et cette vie aussi insensé qui
crois que je ne suis pas toi est la nôtre puzzle
de vers de prose en versets précipitée
avec des phrases mal fichues je viens ici connaissant la vie et de la mort
ce qu’un vivant pourrait des deux
savoir juger cette longue querelle du vers et de la prose de la douleur
et de l’espérance avec parfois de la romance empruntée à l’espagnol
et qui désigne un bref poème épique en octosyllabes
ses vers pairs sont assonancés c’est ainsi que la rapsodie
va
de la romance au roman courtois récit galant irréaliste les
espagnols poussant la romance rejoignent ceux du nord et tombent en don
quichotte
le rapsode n’est pas l’homme d’une cité plutôt
celui qui a droit de citer
les autres où sont-ils qu’on vienne à eux les autres
dehors et nous dedans on les regarde comme
derrière une vitre le réel menaçant le réel
mène au sang quotidien la misère et la nôtre
cet effroi d’enfant sur le siège arrière de la voiture
elle trouait la nuit
tu vois on danse le corps on le balance pour pas tout seul dormir on avance
les citations comparaissent elles se heurtent collage non mais tissage
d’une histoire d’aujourd’hui vaguement racontée
avec de l’invention
empruntée au latin classique inventio action de trouver de découvrir
découverte faculté d’invention et terme de rhétorique
en latin chrétien inventio sanctae crucis (v 530) désignait
la fête rappelant la découverte par hélène mère
d’empereur prostituée et femme offerte au désir mage
de la croix du christ et adinventio signifiait trouvaille dans la façon
d’agir et péjorativement expédient ruse toutes choses
applicables à la rapsodie
l’invention donc d’histoires en romans d’enfance
é
coutez la romance écoutez
la chanson bien douce qui ne pleure que pour vous plaire chanson des rues
et des bois vieille chanson du jeune temps romance sans parole de la plus
haute tour à bouche close vibrent les lèvres un bruissement
d’enfant tout entier
au bruissement qu’il fait à sa faim et sa soif
on avance on n’a pas assez de sens pour faire la phrase dans l’autre
sens ou à pieds dans la beauce peguy sue depuis bientôt un
siècle en quête d’un pas vers le ciel lui aussi voulait
aimer pourtant
on avance on ne sait pas vers quoi peut-être vers le bout de la ligne
avant qu’elle ne brise et navette revienne au début maladroit
rapiéçage
quand elle revient on s’interroge en ces temps de bûchers bovins
de fièvre ovine en vertu du principe de précaution on canalise
les catastrophes provoquées on rentre dans la rime ces bouts désordonnés
ces chiens versés noirs ils sont cerbères à l’entrée
des enfers romantisme attardé
quelle épopée offrir aux zep si taguées wait for the
ricochet disait une voix
dans le noir de la chambre quand passait child in time l’on jouait
la nuit
l’amour aux cartes on le jouait suivant que gagnait ou non
la réussite aux cartes vieillard grincheux on passera ses matinées à la
patience en grommelant sur la toile cirée de la salle à manger
pendant qu’une moins vieille s’activera dans la cuisine
tout nettoyer les vieux cuivres obus de 14 ou les trompettes de l’harmonie
municipale
le savait-elle que l’on jouait ainsi la vie à pile ou face
la rapsodie mêle tout absout tout dans le rythme
ce monde est glauque comme un venant pleurer d’avoir bien réussi
les cadors on les retrouve aux belles places nickel devant le troupeau
bêlant pas vraiment de l’ordre de
la rapsodie inconnue des équations de benjamin péret c’est
là son intérêt
brise toutes les conventions verse vers le vers mal édicté de
la diction bégaye la romance d’une infinité de destins
versés après changés comme le sang
en vin
ce noir désir quand reviendra l’automne le vent l’emportera
la saison monotone et le roman en langue vulgaire
l’ivre dive bouteille des mots pas bien gelés ils fondent
au feu de ces messieurs
on les dit grands bon appétit messieurs
est-ce bien d’ailleurs une rapsodie en avançant on se dit
qu’on est en train d’écrire
une satire en latin satura macédoine de légumes pièce
de genres mélangés avec la mayonnaise un peu tournée
qui pèse sur l’estomac pas loin de la rapsodie en somme
sorte de farce morale et raillerie à la fois quelque chose qui ressemble à du
brassé du réchauffé du pas tout à fait
fait avec des dérapages des zigzags encore une fois
doué pour les ratées le rapsode ne sait que déraper
au lieu de chanter à la fin de l’envoi
il coule dans le marécage on l’enferme pas besoin de cadenas
poète ci-gît cœur sans cœur mal planté trop
réussi comme raté n’a rien compris à la reproduction
clone il tourne mal
jouant habilement des codes le contumace renonce à les aimer trop
machinalement ajustés
il aime le grain de sable ce qui merdre soudain et pas dans un système
et quand ça saute en l’air sous le ciel de baudelaire
when i’m sixty four 6 et 4 ça fait dix revient à 1
en numérologie le chiffre non-identitaire du rapsode lié au
zéro de quoi
peut-être l’émotion l’étonnante corrélation
un peu obscure perdue dans les méandres de l’inconscient freudien
on ne boit pas pour que monte le courage on boit pour que tombent les barrières
pour laisser parler la langue de soi morte
la seule vraie primitive véritable saillie de l’esprit balbutiant
roman où rien n’est vrai on s’invente des vies elles
deviennent réelles rapsodies où n’est que chant et
parole mal assurée qui s’engendre et se grise
de toutes ses histoires
elle prend le contre-pied casse l’image
du poète policé au miroir flatteur il rit de se voir
quelle histoire si belle où est le désir et cette femme offerte
dans l’échange qu’en faire quand
elle jouit d’être sur la photo on voit
que le sexe demeure insatisfait et quelle satisfaction donnera la réponse
apaiser le désir et l’éponger l’adoucir dans
le frisson et partagé le baiser
mais lui où en est-il de son programme parti au fond d’un
verre de ti-punch deux heures anse à la gourde il n’a jamais
vu de lamantins
à
petit canal là où débarquaient les esclaves il y a
une décharge publique
on y revient la rapsodie est maladroite mal romancée elle aime rompre
la musique la torpeur mélancolique
l’héritage de saturne et les humeurs noires en lignes si brisées
ç
a soulage soudain de franchir délibérément toutes
les lignes blanches autrefois jaunes de taper tous les arbres d’échouer
dans tous les fossés de sombrer dans tous les atlantiques et rire
ç
a soulage d’être enfin dehors d’avoir cédé et
succombé de renoncer s’abandonner à tous les démons
de midi et de minuit c’est ça la rapsodie le pardon absolu
radical
le titanic s’enfonce couler avec dans la mer froide enfin sombrer
s’abandonner comme d’autres le font au plaisir s’abandonner
renoncer à croire à ne pas croire n’être qu’un
prenant parole hurlant de toute la force de ces millénaires de chaos
hurlant d’avoir été esclave d’avoir été le
maître hurlant d’avoir toujours tué été tué d’avoir
toujours imité d’avoir appris les règles et de les
avoir oubliées d’avoir rêvé les femmes et de
les avoir méprisées de les avoir voilées et de les
avoir violées
enfant hurlant d’être pris dans cette vie que l’on avait
choisie pourtant
c’est facile mourir dans le ventre de sa mère et on n’avait
pas voulu aujourd’hui on est bien obligé de continuer à faire
comme si
le cœur y était quand il n’y est plus l’infarctus
guette
toujours quelque chose guette le diabète le sida la peste ou la
grippe asiatique toujours quelque chose cède dans le corps quand
la fatigue est trop grande
happiness is a warm gun elle est si froide en vérité à qui
réchauffer larme sinon la colère et c’est encore la
rapsodie
une colère énorme une insupportable atroce colère
qui étrangle dévore de l’intérieur qu’on
sait plus où donner de la tête c’est ça la rapsodie
2001
l’odyssée de la colère injuste féroce impitoyable
le chant des opprimés puisque l’internationale n’est
plus le chant de tous les refusés les chants de la douleur ne sont
pas toujours les plus beaux contrairement à ce que prétendait
l’alfred en se saoulant tristement
il devait bien avoir lui aussi quelque colère rentrée ou à rentrer
bon dieu ce qu’on peut à vingt ans
se raconter d’histoires et dans la rapsodie on psalmodie le chant
errant de nos erreurs quand on regarde
sous les gravats toutes ces ombres perdent nom englouties par la bouche
d’égoût sur le trottoir les ombres lèvent des
corps parmi les blocs échus du désastre rejoignent d’autres
ombres plus anciennes mêlent leurs cris silence
on se frotte on se serre on court on va on appelle
l’usure le temps qui nous dévore saturne n’a jamais
baissé la garde comment pourrions-nous vaincre
ne sommes dieu ni démon nous seulement cet amas ridicule et grotesque
de chairs enchevêtrées dans le rictus corps d’agonie
sommes combat toujours mené
malgré les manipulations malgré ceux qui savent et ceux qui
décident et ceux qui gagnent tous cherchons le pouvoir d’avoir
du pouvoir de gagner du pouvoir d’exercer le pouvoir de conserver
le pouvoir
se refusant se donnant c’est tout un de pouvoir
asseoir son pouvoir asseoir ces phrases anormées ces diagnostics
en langue obscure et définitive ces promesses sans lendemain et
ces lendemains qui n’appartiennent qu’à autrui
remettez-nous votre pouvoir et nous leur remettons notre pouvoir nous y
renonçons pour l’amour de quoi cette compassion
revienne le temps des révolutions la rapsodie refuse de convenir
refuse de se soumettre refuse d’acquiescer refuse de consentir refuse
de dire oui
aimer pourtant
volonté passionnée d’une négation on voudrait
tant croire que le pire n’est pas certain on voudrait tant ce soir
il fait nuit sur new york en d’autres lieux aussi de chine à palestine
et on tape sa tête contre un mur ou contre une pierre une fois de
plus on perd une fois de plus on additionne on soustrait c’est pareil
dans le désespoir (point sur point) on échoue désastres
répétés
aimer pourtant aller plus haut mais comment
par le servage des filles dites de joie pour une fois et plus jamais
je vous aime femme venue de l’épeire vous près de lui étendue
dans vos larmes il voit
grossissement d’une larme loupe elle-même
l’amour pleure son esseulement si seulement ces mots
venaient à vous à la manière d’un battement
d’ailes lui rapsode demande le droit d’asile demande qu’on
voie
par les trous d’un manteau danser les galaxies et demande
le droit d’être vivant j’y suis j’y suis toujours
vivant ce qu’on peut à vingt ans
se raconter d’histoires benoît conort
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