Par un défaut de langue
Le coeur ressemble aux jardins quil aime, tout
encombré de broussailles, d'orties, fleurs sauvages, roseaux
droits dressés. Parfois, derrière quelque pierre brute,
une terre cultivée comme un jardin secret, fragile, assailli
de verdure. Puis cela disparaît. Les racines, lasses, renoncent
à creuser le lent terreau du temps." extrait du Journal
de méduse
heurter le paysage un mouvement de pierre brute mal poli
trop rugueux comme saccadé avec ratées et reprises brutales
le rêver dans la langue
chaotique démesure minérale comment la rentrer dans des
vers ou de la prose une phrase
on dit envisageur envisage le paysage comme un qui le visage il le paysage
à la façon de métaphore
paysage quand on le dévisage sans rhétorique un heurt un
trou aussi avec ce quil faut de remue-ménage et de la terre
autour de la boue
delta tout engorgé de sable le paysable meurt de sensabler
senlise aux marécages
une autre île assaillie de mer avec mousson eaux bouleversantes
cela tangue chavire le cur et la nausée mêlés
déluge le long du visage la jungle pousse de tous ses troncs enlacés
des racines rampent tordues hors du sol de la terre royal botanical garden
le long du kelani ganga
on a beau savoir que ganga veut dire fleuve on entend
ganga quelque chose de très grand la chose
mahatma qui roule et charrie que rien ne dévie qui va et troue
la langue de sa démarche hésitante la chose
défaut de la langue dans la langue qui fait défaut dans
la langue un choc de voyelles noires - du sang depuis longtemps séché
aux lames assassines - elles saffrontent en hiatus peut-être
où lon ne peut habiter mais on en rêve jour après
jour jusquà
devenir même inhabitable cicatrice à la surface dun
désert vue davion la nuit des flammes en ordre géométrique
malgré leur mouvement de torche
un besoin de violence une évidence de rage jettent le désordre
dans ces figures on imagine quelque tempête enfin du sable
étouffe les flammes en dunes variables et le vent
défie la langue et le regard disperse la phrase en incidentes multiples
la déplie déplie la nudité du lieu |