Jean D’Amérique | poèmes à l’attention des confinés

Tandis que je poursuis à distance mes ateliers d’écriture avec les jeunes du Lycée Galilée (Paris XIII), je me permets de mettre tous les « confinés » du monde en contact avec ces quelques poèmes écrits par les élèves. Ils sont à consommer, à propager… Je vous reviendrai peut-être avec d’autres prochainement. — Jean D’Amérique


une journée nue
une personne nue
les routes nues
les oiseaux chantent
le temps s’occupe au travail

— Alin Chowdhury

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et maintenant je fume tout seul
avec le vent qui souffle

la pluie qui tombe arrose les rues
et maintenant je fume tout seul
qu’est-ce-que tu veux sauver ?

— Amin El Otmani

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l’ennui est ennuyant
sombrer dans un lointain fleuve d’oubli
un cœur éperdument en éveil
laissant ma vie défiler devant mes yeux
et oublier toutes mes douleurs et mes tristesses
je renais comme une fleur du printemps
qui se reproduit au fil du temps
années par années
ainsi va la vie

— Tess

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un lundi matin je dois me creuser le cerveau
mon corps a trop d’énergie pour rester calme
mon inspiration déborde
ça me chatouille les oreilles


la boule au ventre
quand je pense à mon avenir
pas envie de voir ma femme vomir
mon enfant je t’attends
mais faut être patient
il faut des tunes et beaucoup de temps

— Eliot Desvaux

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Le train de l’enfance déraille.
Creuser un autre chemin.
Le sang coule.

— Laura Faluto-Kapia


je suis une personne
sans abri depuis peu

j’habite dans la rue
là ou toutes les bactéries se logent

j’ai un chien qui me donne
tout l’amour dont j’ai besoin

— Sirine Mouhoub


Je connais une ville qui nous ressemble,
elle est souvent animée, bruyante et imparfaite.
Autour de ses boutiques qui nous font consommer,
ces plats venus d’ailleurs,
cette cabine téléphonique qui nous rapproche,
nous rappelle ces murs qui nous séparent.

— Norah Catherine


je veux piéger le temps
pour rester dans le présent
mais la trajectoire du vent
me bloque dans le verrou

la mémoire est un raccourci
qui mène vers le cimetière de la tristesse
où pataugent les souvenirs
dans un lac de sang bleu

— Anisse


l’humeur est froide
est-ce une tendance
à première vue c’est juste une comédie

— Alin Chowdhury


je suis une chaise
j’ai mal au pied
parce qu’il y a quelqu’un assis sur moi
et il est très lourd

hier quelqu’un s’est lâché sur moi
j’en ai marre
et il y a plus de cinquante personnes par jour sur moi
donc je démissionne

— Eleanor Ficadière

3 avril 2020
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