Le manège des oubliés
C’est un recueil de textes brefs, incisifs ; certains se referment sur eux-mêmes, d’autres restent ouverts mais tous se suspendent au bout d’une ou deux pages, sans que le récit ait le temps de s’installer, sans que vienne le mot de trop. Une économie du geste, poétique, presque conceptuelle, sur une corde sensible.
27 morceaux d’orfèvrerie, dans un rythme qui permet de tenir le souffle.
27 facettes de personnages, accompagnés de nombreux autres, peuple de nuit.
Ce sont des vies très vite cueillies quand l’Ankou, personnification bretonne de la Mort, va au-devant des clochards célestes.
À la manière d’une roue de fortune, le Manège fait remonter les oubliés de leurs limbes. Des figures sont convoquées au bal des fantômes, impressions fugaces, parmi lesquelles on reconnaîtra Nino Ferrer ou Danielle Collobert.
Des figures en clair-obscur comme autant d’éléments empruntés à la mémoire de l’auteur, qu’il repêche pour nous lecteurs en vue de former le tombeau d’une génération qui passe.
Dans l’ambulance, avant de sombrer, il leur parlera, à eux qui redoutent le jour où, au summum de l’excitation, il basculera du haut de la falaise, d’un livre étonnant, du pays qui s’en détache et du grand voyage qu’il entamera bientôt pour le découvrir.
Jacques Josse, Le manège des oubliés, Quidam éditeur, 124 pages, octobre 2021.
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