Michel Séonnet / Sans autre guide ni lumièreü

Que celle en mon cøur qui brûlait...

Michel Séonnet  précise que le poème est cité dans la traduction de Bernard Sesé (les cahiers Obsidiane, 1983) ; je me permettrai dÁajouter que Jacques Ancet en a aussi donné une très belle ²Poésie/Gallimard, 1997- assortie de sa poétique de la traduction, et en a déplié le titre : Chansons de lÁâme qui se réjouit dÁavoir atteint le haut  état de perfection,  qui est lÁunion avec Dieu, par le chemin de la négation spirituelle. On aura reconnu La nuit obscure et Jean de la Croix, noche oscura, que Vicente Pradal et son groupe ont fait entendre dans une version flamenca qui a fait les belles heures des Tombées de la nuit de Rennes il y a quelques années et dont on conserve le frisson.

Ce à quoi je voulais en venir : le frisson à lÁévocation par Michel Séonnet du chemin de lÁabandon à lÁhistoire de Dietrich Bonhoeffer.
La couverture du livre publié dans la collection lÁUn et lÁAutre chez Gallimard : une photographie de la cellule 92 de Tegel (Berlin) où Dietrich Bonhoeffer (1906-1945), accusé de mener des activités subversives contre le régime nazi fut emprisonné du  5 avril 1943 au  9 avril 1945, date à laquelle il fut exécuté.
Ce pasteur qui lança un jour à ses étudiants dans le séminaire clandestin de Finkelwald « Seul celui qui crie aujourdÁhui en faveur des juifs a le droit du chanter du grégorien », était entré dès 1933 dans une dissidence plus radicale que celle de lÁ « Eglise confessante ».
Tout en sÁappuyant sur la solide documentation existante (la biographie de Eberhard Bethge, les lettres de fiançailles, les øuvres de Dietrich Bonhoeffer, dont Résistance et soumission), Michel Séonnet nous invite à un double pélerinage : sur les traces, les lieux (la chambre, Pätzig, Skopje, Berlin) dÁune part, et dÁautre part dans la compréhension du renouvellement du langage, dans un « monde devenu  majeur », de la nécessaire pudeur et intériorité de la foi qui nÁont rien à voir avec lÁostentation religieuse, mais permettent au contraire une présence au monde plus profonde et respectueuse de son autonomie.
Sur un mode différent, Michel Séonnet nous donne à découvrir un cheminement intérieur à la manière dont Sylvie Germain a su saisir la résistance dÁune  Etty Hillesum (éditions Pygmalion, 1999). Il  faut lui en savoir gré et affirmer que dans ces mots : ces 27 phrases ou paragraphes qui jalonnent la relation, il y a « quelque chose de léguable ».

 

Certains avec leurs mots, leur références, leur culture feront de la mort de Dietrich Bonhoeffer « un haut lieu théologique » (Arnaud Corbic, ofm , dans Etvdes , mars 2001), il importe de saisir et cÁest ce que fait Michel Séonnet que la manière dÁêtre au monde, de résister de Bonhoeffer est offerte , donnée à tous. Et que cette pensée est dÁactualité.

Les lecteurs familiers de remue.net savent les interventions engagées de Michel Séonnet : affaire dÁAbbeville, prêt payant en bibliothèques, clandestins de Douvres, censure etc. ; on sait aussi son action en faveur de lÁécriture publique. Il convient également de se souvenir des forts beaux livres édités chez Verdier : La Tour sarrasine, et Que dirai-je aux enfants de la nuit ? et du récent La chambre obscure chez Gallimard. Enfin il ne faut pas oublier, la collaboration à lÁEntre-tenir à Saint-Dizier, de lÁexposition au Banquet du livre 2000 (la Parole errante, Armand Gatti) : « Le mot forêt lorsquÁil devient résistance ».

RK

à signaler :
site allemand/anglais sur Dietrich Bonhoeffer
exposition "ouvrier" à l'Entretenir Saint-Dizier