Brigitte François | Un quart d’heure par jour

Mercredi 16-11 ; 17h15-17h30

Métro. Les latinos du carrefour souterrain à Châtelet sont toujours là, générations renouvelées, répertoire inchangé, flutes andines et de pan, guitare, vente de CD. Impression de les avoir toujours vus là. Ils devraient être centenaires ! Brad Pitt, Elvis, Biolay en affiches. Vigile, matraque et chien muselé à l’entrée sur le quai. Je ne monte pas dans le premier train. Ni dans le deuxième. Trop de monde, pas de place dans l’étouffoir. Va falloir se décider. « Le prochain train est dans deux minutes ». S’approcher du bord du quai, oser. Les écouteurs de mon voisin ne sont pas étanches : j’aime pas sa musique. Bottes et grisaille des vêtements d’hiver. Un peu de rouge ferait du bien.

Je monte. Lecture par-dessus l’épaule : « avec l’appli transilien, un homme averti en vaut deux » ; j’ai pas d’i-phone.

Place assise : à ma droite, Musso, à ma gauche, ça dort. En face, concentré sur musique intérieure. Sudoku. Red Hot Chilli Peppers… Surcouf… je me souviens de Dubo –Dubon- Dubonnet… dans mon dos, le strapontin claque violemment. Montparnasse. La rame se vide à moitié. Accident grave voyageur sur la ligne 6.


Jeudi 17-11 ; 17h15-17h30

La boulangerie, vite... du monde à table ce soir, anniversaire. Faut encore faire la quiche, et puis faire joli, allumer le feu de cheminée. Zut pas de place. Je me gare en bas de la rue. La remonter. Je croise le monsieur nain de la rue Lambert, qui lui, descend en sifflotant. Il est toujours joyeux. Et puis faire la queue à la boulangerie. Deux croquises. Je n’aurai pas le temps du teinturier.


Vendredi 18-11 ; 17h15-17h30

En plein cours à la fac. Suis seule à me démener, dernière heure de la semaine pour les étudiants qui n’en ont rien à faire… quelle idée, ces cours dits obligatoires. Du coup, ils se comportent comme mes 6è du collège : bébés trop vite grandis. Et puis cette fille voilée dans le groupe. Frustration, énervement, envie de ma fâcher vraiment. Et puis, à quoi bon ?


Samedi 19-11 ; 17h15-17h30

Coiffeur. Ça parle d’émissions de télé que je n’ai jamais vues, de voyages « au club med » dans des régions où je n’irai jamais. Univers parallèles.


Dimanche 20-11 ; 17h15-17h30

Canapé, lecture, bon polar suédois, spécial week-end pour travailleuse épuisée


Lundi 21-11 ; 17h15-17h30

Gym... y’a un muscle, là, je ne savais pas qu’il existait… à moins que ce ne soit une humeur, qu’un clystère ou un calin saurait peut-être amadouer…


Mardi 22-11 ; 17h15-17h30

Théâtre : 400 élèves de collège dans une salle. Roméo et Juliette, passions et déchirements sur fond de brouhaha zappeur et blasé. Tristesse.

1er février 2012
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