Deux lectures par Christelle Lozère et Sentier de Pour une critique d’art engagée, de Dominique Berthet


Pour une critique d’art engagée par Christelle Lozère


Les premières pages d’un livre sont fondamentales : elles amènent le sujet, annoncent le coloris, nous invitent à poursuivre la lecture en stimulant notre curiosité, notre imaginaire, en créant les premières sensations et émotions.

Dominique Berthet offre ainsi au lecteur une belle invitation à entrer dans son livre proposant, dès les premières lignes, une définition de l’œuvre d’art extrêmement intéressante. Dans l’avant-propos, il écrit : « L’œuvre d’art est une production hors du commun, fascinante et énigmatique. Umberto Eco la présente comme “un message fondamentalement ambigu, une pluralité de signifiés qui coexistent en un seul signifiant”. L’œuvre d’art en tant qu’aboutissement, même inachevé, interpelle la sensibilité et l’intelligence du spectateur. Elle s’offre à l’aventure du regard, de l’émotion, de l’analyse ; une aventure renouvelée à chaque rencontre. »

Dans cet avant-propos d’une grande clarté, l’auteur évoque la place, le rôle et la fonction du regardeur/spectateur, qui, par son intelligence, sa sensibilité, sa mémoire, aussi – qu’elle soit affective ou sensorielle – participe à sa manière au processus de création artistique (« l’aventure du regard »), qui est ainsi perpétuellement à redécouvrir.

L’auteur introduit l’idée, née dans la Correspondance littéraire de Denis Diderot sur les Salons du XVIIIe siècle, que le public-récepteur justifie en partie l’art, le fait exister et lui confère un sens. Il explique parfaitement que l’œuvre d’art est ainsi produite non seulement pour être contemplée par un public très varié, de l’indifférent à l’expert, mais aussi critiquée, c’est-à-dire confrontée à l’appréciation d’un spectateur parmi lequel peut figurer le collectionneur, le marchand d’art, le galeriste, le commissaire d’exposition, le critique d’art, l’historien de l’art, le philosophe, etc. Il pourrait être ajouté à la liste de l’auteur la figure de l’artiste lui-même, certes créateur, mais aussi spectateur du dialogue émotionnel et intellectuel entre son œuvre et le public.

À partir de l’idée que le regard du spectateur, particulièrement celui du critique d’art, nourrit et renouvelle perpétuellement l’œuvre d’art, Pour une critique d’art engagée propose, en s’appuyant sur la pensée des grands théoriciens et philosophes de l’art de l’époque moderne à l’époque contemporaine, une réflexion sur les enjeux du discours critique perçu en tant qu’écriture engagée.

Cet ouvrage, semble-t-il, n’a pas la vocation ou la volonté de définir ce qu’est ou ce que doit être pour l’auteur (lui-même critique d’art) une critique d’art engagée, mais plus de proposer au lecteur une réflexion pluri-angulaire sur le discours critique en la replaçant dans une perspective historique, celle de l’histoire de la critique d’art du XVIIIe au XXIe siècle. Cette démarche semble avoir pour finalité d’encourager les critiques d’art contemporains à « s’engager » dans leurs propres discours critiques.

Pour une critique d’art engagée a été perçu comme un formidable outil qui permet d’ouvrir une grande boîte où se trouve une autre boîte et, à l’intérieur, une autre boîte, telles des poupées russes. Toutes ces boîtes permettent de réfléchir, à partir des discours et des regards multiples bien sûr contextualisés par l’auteur dans leurs époques et dans leurs propres enjeux, à un certain nombre d’idées, de questionnements sur ce que sont l’imaginaire, la beauté, l’imitation, l’engagement, etc., remettant en cause perpétuellement notre propre définition et perception de l’œuvre d’art.

Parmi ces boîtes, une paraissait fondamentale pour comprendre le rôle et l’utilité d’une critique d’art engagée : il s’agit de celle qui différencie le critique d’art de l’historien d’art. Pour souligner cette distinction, l’auteur cite Hélène Lassalle. Pour elle, « la tâche du critique se joue dans la proximité et dans l’immédiateté de l’apparition de l’œuvre tandis que l’historien, même des périodes récentes, opère dans la distance, selon une perspective ».

Pour une critique d’art engagée m’a permis de réfléchir sur ma propre méthodologie et mon propre rapport à l’œuvre d’art en tant qu’historienne de l’art. Même si le critique et l’historien de l’art ont finalement le même sujet d’étude, un même engouement pour l’art, leurs méthodologies face à l’interprétation de l’œuvre s’opposent tout en se complétant. Le critique est dans la spontanéité, l’immédiateté, l’actualité, le témoignage, l’émotion, la sensation, le trouble. Il est en contact avec les artistes, le marché de l’art, le public. Sa parole est plus ou moins engagée ; elle peut être politique, voire militante. Le critique peut participer à la construction ou à la destruction d’une œuvre d’art, d’un mouvement. Il peut inventer un langage. Il est lui-même un créateur.

Quant à l’historien de l’art, il peut se rapprocher du scientifique. Il réagit à froid, avec distance, selon une méthode analytique, proche de l’historien, qui consiste à replacer l’œuvre dans son contexte historique, politique, économique, sociologique, philosophique, anthropologique, etc. Sa propre émotion face à l’œuvre d’art ne transparait pas dans son interprétation. Elle est secondaire. L’historien de l’art analyse la parole du critique tout en prenant du recul, de la hauteur, face à cette parole en la contextualisant. Il n’est pas obligatoirement en contact avec les artistes, le marché de l’art ou encore le critique d’art, car l’historien de l’art travaille essentiellement sur le passé ou éventuellement sur le présent, mais avec toujours la distance nécessaire à son analyse. La proximité, les affinités du critique d’art avec les artistes et le marché de l’art interrogent l’historien de l’art sur les enjeux autour du discours critique, particulièrement si cette parole est engagée et militante.

Cet ouvrage permet justement de saisir les enjeux et les évolutions de l’histoire de la critique d’art, puisque l’auteur fait le choix de mettre en valeur les premières figures de cette pensée critique, Lessing, Diderot, Baudelaire, Walter Benjamin, J.-P. Sartre, ainsi que des critiques plus contemporains. Par le découpage de son livre en chapitre consacré à chaque fois à un critique particulier, de Lessing à Sartre, il permet au lecteur à la fois de mieux comprendre qui étaient ces critiques et la nature de leurs relations avec les artistes de leur temps, et, à la fois de permettre au lecteur de bien saisir la portée de leurs discours engagés.

En interrogeant le lecteur dans les derniers chapitres de son livre sur ce qu’on peut ou doit attendre de la critique d’art au regard de l’art contemporain, on s’interroge inévitablement sur les propres engagements de Dominique Berthet en tant que critique d’art.



Pratiques artistiques contemporaines en Martinique



Cette réflexion m’amène à faire un lien avec son ouvrage Pratiques artistiques contemporaines en Martinique qui présente, pour reprendre les propos de l’auteur, « un certain nombre d’expériences plastiques » à travers lesquelles on peut lire, dans un second niveau de lecture, l’histoire des idées esthétiques qui, depuis les années 1940 (plus précisément à partir de la création la revue Tropiques), ont servi de cadre aux travaux des artistes martiniquais. Ce second ouvrage apparaît comme une mise en pratique de ce que l’auteur théorise dans Pour une critique engagée : à savoir sa volonté d’être un critique engagé.

Son engagement, en tant que critique d’art, semble être, en effet, multiforme :

- il est dans son contact permanent avec les artistes antillais et le marché de l’art depuis plus de 20 ans (l’acolyte).

- il est dans sa volonté de donner enfin par l’écriture, la voix ou l’image, une visibilité internationale aux artistes locaux et de manière plus générale, aux pratiques et aux débats artistiques caribéens afin d’en montrer leurs richesses et leurs diversités.

- il est aussi dans sa volonté de prendre en compte, dans son discours critique, l’histoire spécifique des Antilles qui est fondamentale pour comprendre la réalité présente et la démarche des artistes antillais – c’est-à-dire de déterminer les conditions qui ont rendu possible l’existence d’un art contemporain en Martinique – pour mieux en saisir sa richesse, ses enjeux et sa spécificité.

Ce discours est neuf, fort et engagé. Notre recherche en histoire de l’art le confirme : avant la Seconde Guerre mondiale, le discours officiel refusait, voire niait toutes possibilités et toutes capacités artistiques aux populations noires des Antilles. Seuls, lisait-on dans la presse, des esprits éclairés venant ou issus de la France hexagonale pouvaient apporter l’art aux Antilles. Ce discours colonial négationniste trouva son apogée dans l’entre-deux-guerres à travers l’idéologie et la propagande impérialistes de la Troisième République. Il s’est aussi fissuré pendant cette même période grâce aux premiers échanges artistiques entre la Métropole et les Antilles faisant évoluer les regards et les imaginaires.

Aujourd’hui, le foisonnement de cette production artistique aux Antilles montre le chemin parcouru depuis les années 1940. Les travaux de Dominique Berthet permettent de rendre compte de cette richesse tout en mesurant le chemin parcouru pour sa connaissance et sa reconnaissance à l’échelle internationale. Le choix des notions développées dans Pratiques artistiques contemporaines en Martinique – celles de la mémoire, du lieu, de l’héritage, de la trace, de l’identité, de la fragmentation, de l’hybridation, du métissage – montre la perception par l’auteur de la complexité de l’histoire antillaise.

L’approche sensible de Dominique Berthet témoigne encore une fois de sa volonté de produire une critique engagée qui, par cette prise de position militante et forte, ne peut que s’enrichir et nous enrichir.


Christelle Lozère est historienne de l’art, maître de conférences à l’Université Antilles-Guyane.





Pour une critique d’art engagée par Sentier


L’engagement du critique pour Dominique Berthet est dans une grande proximité avec celui de l’artiste pour qui il s’agit de rendre visible un point de vue de la manière la plus indépendante possible. Il est crucial de comprendre que la création artistique actuelle est une démarche éminemment individuelle, unique, singulière. Avant d’être une production qui s’adresse à des spectateurs, des lecteurs ou des auditeurs, c’est une recherche personnelle, intime, secrète et silencieuse. Connaître ce qu’est le silence de l’intériorité est essentiel pour comprendre ce qu’est réellement une démarche artistique. La caractéristique principale de la création artistique est la communication de cette expérience d’isolement, de solitude, d’exploration de son propre imaginaire. L’artiste est le seul maître de sa pratique, un domaine dans lequel nul ne saurait intervenir à part lui. Il peut pratiquer dans tous les lieux où il peut puiser des ressources, où il trouve du matériel, où il trouve matière à spéculations et à improvisations. Il est seul à pouvoir circuler dans le labyrinthe de ses intuitions. Toutefois, plus la sphère de communication de l’artiste s’élargit, plus la présence de son œuvre dans le collectif se confirme, et plus son champ de solitude devient perméable aux intrusions extérieures. Il lui faut alors être très vigilant afin de ne pas s’égarer. Bien sûr, la nécessité de la mise en rapport de l’œuvre avec le collectif reste l’objectif premier du créateur, mais cela ne peut pas se faire à n’importe quel prix. Cette conception du sujet créateur autonome n’a pas existé dans toutes les époques. Pendant longtemps, les artistes furent avant tout sollicités pour leurs compétences techniques mises au service des cultes ou des pouvoirs. Mais depuis le Siècle des lumières qui a vu apparaître une nouvelle vision de l’homme, la place de l’individu dans le collectif a été bouleversée. Chaque personne a maintenant des droits, chacun à la liberté de cultiver sa subjectivité, en théorie du moins. La création artistique peut être comprise comme l’activité la plus à même de permettre à quelqu’un de pousser cette expérience d’affirmation de soi le plus loin possible. Les artistes peuvent maintenant investir les espaces comme ils le désirent, en s’appropriant les murs des villes, les déserts ou les forêts, tout autant que les lieux virtuels. Les techniques se mêlent, le champ de l’art se déplace constamment de l’immatériel au matériel et vice versa. Il est de plus en plus complexe d’établir un cadre précis pour situer la pratique artistique, les limites de l’art deviennent floues. C’est à la fois passionnant et inquiétant, car il est possible de craindre une dissolution de l’art dans toutes les autres activités. Il est tout à fait concevable que l’artiste devienne critique et que le critique s’adonne à la création artistique.

Le critique lui-même explore d’autres domaines, il doit interroger les sciences humaines, l’histoire de l’art, la sociologie, l’anthropologie et il ne peut éviter le politique, c’est-à-dire une réflexion sur la place de l’art dans la société. Mais ces outils ne suffisent pas. Le critique est aussi quelqu’un qui œuvre à partir de ses émotions personnelles, il s’engage par intuition, mais il ne s’agit pas pour autant d’une posture égocentrique. Affirmer son point de vue dans la critique d’une œuvre d’art permet d’ouvrir des horizons en donnant à voir l’art sous un angle inédit. La critique la plus intéressante est certainement celle qui, à l’instar de l’œuvre d’art authentique, vise à déchirer les voiles des visions préconçues, à briser les tentatives de formatages des imaginaires.

L’artiste sait que son œuvre est destinée à être interprétée. Il ne peut cependant prévoir la nature de cette interprétation et d’ailleurs, assez tôt dans sa formation, il comprend qu’il vaut mieux renoncer à toute prévision. Dans l’atelier, il navigue à vue, en aveugle, il avance en terre inconnue. Il faut l’accepter, c’est incontournable même si cela est parfois inquiétant. Quand l’artiste comprend qu’il ne peut que se détourner de l’idée de maîtrise, il trouve alors cette liberté qu’il cherche laborieusement dès ses années d’apprentissage. Aujourd’hui les médias de masse occupent une place très importante, ils ont le pouvoir de fabriquer des opinions. La critique est souvent très insatisfaisante et réductrice et les textes critiques les plus fondés sont très souvent le fait d’écrivains qui développent une pensée personnelle dans un travail d’écriture. Ce qui est important dans la démarche de Dominique Berthet, c’est que c’est l’élaboration d’une critique mettant en évidence les rapports entre l’œuvre et ce qui se passe ici et maintenant, c’est-à-dire, pour reprendre le propos de Walter Benjamin, le hic et nunc de l’œuvre, ce qui correspond à une recherche d’authenticité. Un critique digne de ce nom cherche l’indépendance, il a l’intuition des ouvertures, des potentialités de devenir, des possibilités d’échanges, des glissements, des bouleversements contenus dans les œuvres, et ses écrits sont des créations qui cherchent à les mettre en évidence. Il réagit avec sa pratique de l’écriture. C’est important de le noter, car tout comme le plasticien dans ses relations aux techniques, c’est dans la pratique de son art qu’un écrivain construit sa pensée. Comme l’écrit Dominique Berthet, la critique d’art ne peut que s’inscrire dans un processus créateur.

Le plasticien, quant à lui, explore ce qui est hors du langage, il rend visible sa perception des champs d’indicibilité, de l’innommable, des lieux virtuels ou actuels où les mots perdent leurs sens, où du moins ils ne suffisent plus, mais où les idées continuent de surgir. L’art est un domaine privilégié où l’humain côtoie le non-humain. Parallèlement, pour Dominique Berthet, la critique est une tentative d’accéder à un au-delà du visible qui reste à découvrir dans toute œuvre.

L’art est un domaine dans lequel, sans qu’il y ait besoin de beaucoup de moyens, une grande liberté de mouvement est possible. L’artiste invente sa propre méthode de travail, il n’est plus contraint aujourd’hui de se soumettre à des règles. C’est cette dimension déstabilisante, aléatoire, de la création qui souvent inquiète et provoque des réactions négatives. La création artistique est l’objet de toutes les attentions de la part des pouvoirs économiques actuels qui résistent au fait que des zones d’émancipation et des solutions alternatives quant à la production et à la diffusion des œuvres échappent à leur contrôle.

Une œuvre d’art est toujours complexe, c’est un enchevêtrement de diverses intentions, de multiples gestes, c’est une superposition de moments, d’états d’esprit, d’humeurs, d’imprévus, immergée dans les variations contextuelles. L’art est difficile à déchiffrer pour celui qui n’est pas initié et qui pense pouvoir l’aborder immédiatement dans son intégralité, comme c’est le cas pour tant d’images aujourd’hui. Toutefois, il n’est pas réservé à un public de connaisseurs, car c’est certainement dans l’art que l’on trouve le plus grand nombre d’autodidactes, à la fois chez les amateurs et chez les praticiens. L’intuition artistique est très forte dans l’esprit de beaucoup de gens. Les utilitaristes pourront argumenter tant qu’ils voudront autour de l’idée que l’art est une production accessoire, voire superflue, chacun sait que c’est parce qu’il est inutile qu’il est nécessaire. Pour appréhender pleinement une œuvre digne de ce nom, il vaut mieux être averti, avoir l’expérience du rapport à l’œuvre, avoir été confronté à l’expérience de la création dont les voies sont multiples et souvent inattendues. La critique joue un rôle important sur ce plan, même si, bien sûr, elle ne saurait intervenir dans un processus d’explication.

Un chapitre du livre de Dominique Berthet est consacré à Walter Benjamin. Le philosophe juif allemand a construit sa pensée dans une contradiction apparente entre une réflexion théologique et une tentative d’élaborer une esthétique matérialiste. Il était à la fois très ancré dans l’actualité politique de son temps et, dans le même temps, préoccupé de tradition juive. Son texte majeur « L’œuvre d’art à l’ère de sa reproductibilité technique » garde toute sa force plus de soixante-dix ans après avoir été écrit, malgré le fait que les extraordinaires évolutions technologiques des dernières décennies ont changé la donne. La problématique abordée par le philosophe est cette bascule du statut de l’œuvre, passée d’un rapport intime, unique et authentique avec le regardeur, à une présence totalement métamorphosée dans le champ social lorsque la reproduction technique a été inventée. Que penserait Benjamin aujourd’hui devant le spectacle de toutes ces représentations dématérialisées et diffusées sur des millions d’écrans simultanément ? Il est très important que l’accès aux œuvres d’art soit le plus large possible afin de permettre à chacun de percevoir ce que signifie créer une œuvre. Mais malheureusement, il est bien difficile aujourd’hui d’affirmer que les productions de masse sont des œuvres réellement créatrices et que les outils de simulation virtuels permettent à chacun de créer en toute autonomie.

Dans la pensée de Benjamin, comme le souligne Dominique Berthet, la réflexion autour du salut, du sauvetage de l’humanité est très présente, il l’exprime notamment dans son approche du concept d’histoire. Il est difficile d’envisager l’idée d’un salut collectif par l’art, mais la pratique artistique, comme travail libéré des contraintes de la rentabilité et des conventions sociales sclérosantes, comme œuvre humaine en résistance à toute forme d’asservissement, peut servir de modèle pour une réflexion sur la réforme du travail qui accorderait à la création une place à tous les niveaux des hiérarchies sociales. Ne peut-on pas espérer que le travail soit un jour conçu comme un espace d’émancipation et de construction de son être singulier dans le collectif ? L’artiste, parfois sans s’en rendre compte, par le seul fait de tenter de rendre visible sa manière singulière de voir, perturbe les rationalisations aliénantes, les déshumanisations et les tentatives d’uniformisation. Affirmer par la critique l’autonomie de l’art, sa liberté, son refus des carcans, des compromissions, faire l’éloge du trouble et de l’imprévisible tout en offrant des outils théoriques à chacun pour le développement de son propre sens critique, voilà des propos dans lesquels cet ouvrage de Dominique Berthet est vigoureusement engagé.


Sentier est artiste plasticien

20 janvier 2014
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