Disparition d’Henri Meschonnic
En hommage à Henri Meschonnic, dont nous apprenons la mort hier mercredi 8 avril, je voudrais simplement citer ces quelques lignes qui introduisent, comme une sorte de témoignage, le très bel article qu’il consacrait en 2003 à Ingeborg Bachmann dans le numéro qu’Europe consacrait à l’auteur de Malina :
Il y a eu une fois, une seule fois, Ingeborg Bachmann. Une aventure, et une parabole. Les deux, inséparablement, comme un poème et ce qu’il a fallu de vie, et de mort dans la vie, pour faire ce poème. La condition minimale pour qu’il y ait un poème. Pas l’amour de la poésie : ce que Verlaine appelait de la littérature. Et ce poème continu qu’est une œuvre (où se fondent, parce qu’elles sont futiles et seulement d’apparence, ou partielles, les différences entre ce qu’on appelle d’habitude, à se fier à l’allure typographique, à la mine, un poème, et des choses de « genre » différent, nouvelles, roman ou autres), ce poème à son tour est la condition nécessaire pour qu’il y ait une réflexion située, une réflexion d’expérience sur la poésie des autres, sur la poésie comme transformation d’une écriture par une vie et d’une vie par une écriture. L’unité étant l’expérience, au sens d’une expérience unique : l’invention de sa propre historicité, la découverte par là qu’un art est l’invention d’une historicité nouvelle, en même temps que la reconnaissance que cette invention est un universel de l’art. C’est cela, cela seul, qui remet les choses à leur place. Les bibelots sur la cheminée de l’époque, d’un côté, et de l’autre, ce dont on n’arrête plus, ensuite, de vivre.