La plage ensorcelée

Dans un coin de la mémoire cet été-là nous étions sur une plage normande le groupe ou plutôt un groupuscule tyrannique, nos regards démoniaques sur l’enfant d’origine maghrébine que nous avons enseveli dans le sable, il ne restait que sa tête hors du sable le regard apeuré victime de la cruauté, aujourd’hui encore son visage me hante, j’ai le sentiment de la honte de la bassesse il aurait pu mourir mais le destin en a voulu autrement.
Sans doute avions-nous repris le bus, le train, en direction d’une ville de Picardie.
Ce souvenir contraste avec un autre été sur L’Île-aux-Moines, en Bretagne, où les cheveux rasés je m’éloignais du groupe, l’inconscient collectif j’enrage, je lutte, les moines n’étaient pas loin et je ne souhaitais pas me conformer aux rituels ecclésiastes… Seul, je n’ai pas mangé ce midi-là et je récuse la plainte. Le groupe toujours le groupe j’enrage encore. Dépersonnalisation juvénile, le non-sens l’oubli la haine la violence ; la jalousie pour un détail vestimentaire ; je bouge je virevolte parmi les adultes ; certains ont le bien en eux certes mais pas tous. La prison sociale connue et reconnue j’enrage encore aujourd’hui ; le fil conducteur j’hésite, j’hésite encore à m’y conformer. Enfance meurtrie je souhaite là m’arrêter ; le fil, l’institution des laissés pour compte c’est écrit et cela s’accomplit. Déstabilisation perte d’équilibre, fondation sur des sables mouvants retour avec claque de gauche à droite, hémoglobine, sueur et enfin la liberté.

Bruno

3 décembre 2012
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