TCHAT LAND, épisode 4

NISSOUS 7.8 : Jour après jour, nos discussions se prolongent. D’abord 15mn, puis 30, puis 1 heure, puis 2. Les week-ends, il nous arrive de parler de tout et de rien, jusqu’à 1 heure, 2 heures du mat. Quand je me lève vers midi et que ma mère voit ma tête, ça la rend folle.


NISSOUS 7.8 :
Cette relation par tchats dure depuis quatre mois. J’en perds le sommeil. Et je veux mincir. Je balance mes assiettes au vide-ordures quand ma mère a le dos tourné et je lui pique du Nitrazépam ou du Valium quand je n’arrive pas à dormir. Mais quel bonheur toutes ces heures passées à mélanger mes mots aux siens. Je suis devenue sa confidente et lui, mon oasis de rigolade.


NISSOUS 7.8 : Mon père a fait de la prison pendant huit ans. Oui, je sais on dirait du Germinal quand je dis ça. Mais bon, en prison voilà, tu paies tes fautes, c’est le principe, il n’y a pas de quoi en faire un drame.


NISSOUS 7.8 : Donc j’ai grandi avec les adultes, ma mère, mes tantes et ma grand-mère. Ma mère refusait que je vois mon père car elle disait que la prison, c’est pas un lieu pour les enfants.


NISSOUS 7.8 : Aujourd’hui, mon père est chef d’entreprise de lingerie féminine. Il a huit enfants de cinq femmes différentes mais surtout à 35 ans, un vrai gamin, il est complètement immature. Je vais le voir pour mon petit frère. Et bon c’est vrai aussi parce qu’il me donne de l’argent de poche.


NISSOUS 7.8 : Je ne sais pas quand exactement tout a basculé mais je me rappelle qu’un peu avant les vacances de Noël, en SVT, nous étions face à face, MOLOKOST et moi. Chacun à un bout de la classe. Lui, assis près du mur avec la porte. Et moi près du mur avec fenêtre. Avant il se faisait souvent jeter dans le couloir et c…˜était plus pratique pour la prof. Mais depuis peu ça avait cessé. Il s’était un peu calmé. J’y étais peut-être pour quelque chose.


LE CHŒUR : Les copains de MOLOKOST ? Ils s’appellent T, Moc, S et les autres, je ne sais pas leurs prénoms. En fait dans sa bande, il y a un mélange de latinos et de black. Ce sont les garçons qualifiés de plus beaux du lycée. Une sorte de boys band. Mais on t’accepte dans le groupe si tu arrives à faire un certain nombre de conneries bien précises. Par exemple être nul en classe. Il y en avait un qui a onze de moyenne générale. C’est le seul et il se fait mal voir.


NISSOUS 7.8 : Survêt. Survêt. Survêt. C’est le style de MOLOKOST et de ses amis, c’est ça. Et on voit tout le temps leur caleçon. Des fraises. Des bananes. Des kiwis. Des singes. Des sucettes rondes en zigzag vers l’intérieur. Les têtes des présidents. Ou des formes géométriques sur tout le caleçon. On voit leur caleçon par devant par derrière. Ils mettent des ceintures qui ne servent à rien. La ceinture elle termine sur les cuisses et le caleçon on le voit en entier. Les profs passent leur temps à dire : Remonte ton pantalon, remonte ton pantalon ! Dans le règlement du lycée, il est même précisé qu’il faut porter le haut du pantalon à la taille !


LE CHŒUR : Ouais mais c’est la mode ! C’est la mode ! C’est ce qu’ils répondent ! L’histoire vraie se passe dans les années 70, 80 dans les prisons aux États-Unis. Les homosexuels laissaient voir leur caleçon comme signe distinctif de rébellion pour montrer qu’ils étaient libres de se faire culbuter !

28 octobre 2013
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