A l’occasion de la parution de "La poésie motléculaire de Jacques Sivan [choix de textes, de 1983 à 2016]" paru aux éditions Al Dante (juin 2017), le texte Mécanic’Jacques préfaçant de Vannina Maestri.
Mécanic’Jacques
J’ai toujours travaillé à la destitution de la
notion d’un sujet monolithique, à la destitution
des dualismes moi/réel, sujet/société. J’ai toujours
eu le souci que mon écriture soit synonyme d’action.
Quand on écrit on doit être dans le même état
d’esprit que lorsqu’on fait une performance.
Jacques Sivan (notes et brouillons inédits)
Donc une écriture constituée de blocs - des textes, des images - qui interagissent. Ces interactions mettent en évidence des fragments de réalités. Entre ces blocs d’écritures diverses nous prenons conscience de l’émergence de mondes singuliers. Ils opèrent en creux, un peu flous, un peu virtuels. Ce sont des blocs flottants dont la structure est mouvante, indécise. En fonction des conditions et du type de lecture nous construisons des variations. Nous ne sommes dans l’écriture ou dans la lecture que des modes de temporalités processuelles. Ces procédures de lecture, de composition, de montage, nous les devinons mais elles demeurent aléatoires. Comment Jacques lisait-il ses textes ? Il donnait simplement à voir, à entendre, des propositions. Il les faisait miroiter, il les faisait lire dans tous les sens. Nous ne savons pas exactement quand une partie de nous-mêmes est en mode de fonctionnement machinique ou bien en mode de fonctionnement conscient, raisonné, affectif… Similijake et les autres textes fonctionnent comme un outil, une sorte de machine. Et cette machine se dilue dans des contextualités. Elle se dilue dans les ensembles, les propositions. Elle s’offre aussi de manière multiple. Des moments de subjectivation sont possibles mais brefs. Qui est vraiment Jacques ou Jake ? Ce fonctionnement machinique ne cesse de se pluraliser. Il semble se perdre puis se réorganiser, se redistribuer. Ce qui permet des recentrages plus ou moins fonctionnels. Album photos, Echo Echo, Des vies sur Deuil Polaire… sont des livres formés de blocs dont les interactions mettent en évidence des fragments de réalités vaguement semblables. Entre – et c’est ce entre qui importe – émergent ces mondes singuliers de Jacques/Jake à recomposer sans cesse.
V. M.
"La poésie motléculaire de Jacques Sivan [choix de textes, de 1983 à 2016]", interventions de Vannina Maestri, Jennifer K.Dick, Jean-Michel Espitallier, Emmanuèle Jawad, Luigi Magno, Gaëlle Théval, éditions Al Dante,2017
Isbn : 978-2-84761-715-3
3 juillet 2017