Anne Luthaud | 10 fois une minute #8
Une minute
Pour le parfum. Celui de cette fleur blanche veinée de rose. Il a du suave et de l’acide. Comment ainsi mêler les deux. Et le soyeux des pétales où s’accroche le nez
Une minute
Elle. Avec sa frange courte n’a jamais vraiment compris. Elle s’est avancée tranquillement devant la maison close et a demandé encore une fois : c’est donc ici que
Une minute
C’est une bouteille posée sur une marche de pierre. Ou sur un banc. Bouteille de rouge. Une main la prend, l’attrape, du liquide coule le long
Une minute
Ça se passe la nuit. Ça a lieu la nuit. Personne ne sait d’où ils viennent. Personne ne sait comment ils s’installent. Ils sont là en masse compacte. Ils parlent bas et
Une minute
La jeune fille à la fenêtre a repris sa place, face à moi. Visage rond et cheveux en chignon, tête penchée sur son devoir, elle ne lève pas les yeux, elle
Une minute
11h36 est l’heure du train. 14h57 l’heure d’arrivée. Elle prendra les mesures nécessaires. Toutes les mesures. Prendra le temps en main, le déplacement,
Une minute
Lui. S’est installé au bout de la jetée une fois encore. Pour attendre. Il ne sait comment ni pourquoi, il aime être là face au large. Au large. Au large qui s’ouvre et bat. Au large qui dure et tient. Au large
Une minute
Il a raté le train. Comme chaque fois qu’il part là-bas. Il se prépare, s’apprête, heureux du voyage, et au dernier moment traîne. Impossible de quitter. Quand enfin il
Une minute
Comme un train traverse le paysage. Le fend. Sépare les espaces que l’on peine à identifier. Repérages factices de moments déjà achevés quand à peine commencés
Une minute
Vol d’oiseaux. Hirondelles, passereaux, ou quoi ? Vol d’oiseaux pour 100 km. Sans route donc, sans train, sans ce qui nous meut. Oiseaux dans le ciel comme seul compte à rendre.
Une minute
Froissement d’ailes. Vol au vent. Je n’aime pas la béchamel lourde qui accapare la pâte feuilletée de ces entrées d’un ancien temps. Pourtant, elle en
Une minute
Elle. Elle aussi attend. Je ne sais pas quoi ni comment. Juste elle ne bouge pas. Elle respire à peine, l’apnée aide à l’attente. Il ne faudrait tout de même pas
Une minute
Dans le train. C’est toujours au même endroit qu’elle regarde : son reflet dans la vitre pour accéder au paysage. Traverser ainsi le défilement. Mais ce jour là,