Benoît Artige | Figures libres, Laura Betti
Elle n’y arrivait pas – lors de la première prise, elle avait failli se casser une jambe et s’en était sortie miraculeusement avec quelques égratignures –, mais elle persistait à vouloir faire plaisir à Pier Paolo, malgré les remontrances de son agent qui lui intimait l’ordre de ne pas céder à ce caprice non stipulé dans son contrat. Seul un repos complet lui permettrait de reprendre ses esprits – Pier Paolo en avait décidé ainsi –, on ne tournerait rien d’autre le temps que Mademoiselle Betti se reprenne. Pour patienter, on organisa des pique-niques et des parties de foot sur les rives du Pô – ce fut, aux dires de tous, des jours de désœuvrement très joyeux –, tandis que, dans sa caravane, Mademoiselle Betti se concentrait de toutes ses forces : il fallait qu’elle y arrive, qu’elle prenne sur elle – ce grand morceau de bravoure lui vaudrait peut-être un Lion d’or –, quelques jours encore et elle finirait par réussir à décoller du sol et s’élever dans les airs, les bras en croix.