Pierre Antoine Villemaine | Ici tout bouge..

Ici tout bouge, nage, fuit, revient, se défait, se refait. (S. B.)

 

comme paralysée la parole hésite

et je vais murmurant
sans prendre forme et sans aucune règle

à toi-même étranger / vide
à peine vivant

à qui demander conseil ?

*

Ce fut la dernière fois que je le vis. Je lui tenais la main et le regardais comme si je voulais saisir un secret ou une révélation. Je le fixais si intensément que je m’égarais dans son visage qui perdit la forme que je lui connaissais. Sous mes yeux il devenait un homme quelconque, sans nom, sans âge, sans origine, qui lentement se dissipait dans l’espace de la chambre. Il ne subsista bientôt que l’éclat brillant et froid d…˜un regard. […] Jamais je ne le revis. Je ne voulais pas de la tournure prise par les événements. Je voulais une autre vie. J’étais tombé en faiblesse alors j’ai marché jusqu’au soir dans la grande ville.

*

Il fallait quelqu’un pour le dire alors je me suis proposé pour dire ce que personne n’avait envie d’entendre mais devant l’ampleur de la tâche j’ai renoncé aussitôt.

*

Aujourd’hui j’ai été traversé par un bonheur d’une rare intensité. Je l’ai oublié. Demeure le souvenir vide et frémissant d’un passage furtif, l’émotion inoubliable d’une touche invécue.

*

comme si éprouvant quelque chose, je ne l’éprouvais pas vraiment

*

tu parles, tu parles et pourtant tu ne dis rien...

 

je vous avais promis le silence… et je parle encore !

26 avril 2022
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