Étienne Vaunac | Tardigrades & intrigues - 3 : VENDREDI

« Après quoi, il abandonne l’entomologie, les études sur les tardigrades, qui le passionnaient tellement, et le spectacle terrible de ce monde qu’il ira cacher derrière des lunettes obscurcissantes. » (Henri Michaux)

La neige met la lumière en pièces puis les flocons recouvrent le salon d’un cri — rude la neige tombe sur tes seins — une étoupe enflammée c’est le givre c’est toute la vie — passée dans l’interruption de la halte — la neige découvre notre présence dévouée dans les séracs — pour que rien n’arrête le crime quand tu lèves la main — sur tes doigts pris au dépourvu mais que d’autres s’empressent où la parole accumule ses pierres — la secousse est un don de la cendre

C’est autre chose encor le même amour vaincu — dans cette langue pelée par le gel c’est autre chose — une vie prête à soi pour les serviettes en papier — oubliées près du canal mais pas les embrasures ni les verrous — la meute vêtue pour la faim — le parquet des lentilles sur le bassin où le syrphe — se pose (et qui sûrement n’advinrent jamais)

Cet escalier dénutri par l’orage où tu t’impatientes dans le ralentissement des particules à force — d’être mauve à moins — d’escalader les couleurs de la terrasse pour te pencher jusqu’à mon sang — n’a que faire de la rumeur des écrous ni du pré — peut-être alors mon ombre pourra se — tenir toute droite dans le simple horizon qui te tombe des yeux mais les phrases— disparaîtront quand je cesserai de me — taire — de la nuance la tige

Le sentier va- — t-il aux orties mais le sol n’est pas plus sec — qu’en deçà de la prouesse quand sur mon palier vous délaciez vos chaussures — près des cormorans pris au piège des hortensias — toujours est-il que le ventre tend au maximum son enveloppe par calcul et que — le jour se lève paresseusement sur l’oxydation — mais dans la neige nous — finissons par perdre nos rides de vue il n’est pas — conseillé de vivre avec la fibre céphalique

Sur la terre ferme — doucement la bouche des mortes nous courons sur — des sols qui peinent à garder la tête hors de l’eau — dans l’antivénézuela où le saule de michaux que… — nous marchons vers une route où s’errent les mots dans les chignons ou les libellules — finissent toujours par retomber dans l’odeur de fioul — tâche toujours de te corriger par — des exemples

La mare se détourne du pommier — tu me sers si fort contre ce pierrier que le désespoir pourrait bien — mettre fin à la laideur mais dans la transparence du regard le sang — coule à une lenteur inimaginable qui de leurs veines tendues — voudra se défaire éloché — le sang d’un et d’autre côté — au retour des épeires dans les poches

L’innommable bientôt traversera la fenêtre ocre et chaud — l’innommable nous basculera du côté de la vie — non manifeste contractée autour des cernes nous ne serons pas contraintes — par la défaite de la neige comme envisager quoi — pour ne pas perdre la face — adorablement exterminées par la forêt significative — ou ce qui sied au licou de la lisière

Les étourneaux dans leur nuée ouverte sur les os on — ne peut pas compter — combien ont choisi la guerre et combien — les figues pour limer la profondeur de l’iode et du lisier — de la voix du témoin forcer l’escalier de basalte mener — le pain par les tempes — alors qu’en dessous de nous des varappeurs s’apostrophent par toutes roches

Des femmes te font signe au bord de la bave en réclamant la hâte de l’herbe — l’ombre de cette pierre est-elle tournée vers nous ou vers la pluie — éclose sur la bouche — nous retenons moins d’eau dans nos mains que ne le — feraient les tardigrades s’ — il existait de l’eau

Sur la table les olives doivent être — reliées à la possibilité même des images — de nos épaules après tout râpées contre les pierres des remparts — dehors dans la horde toute retournée l’orage bascule à ras de — terme — la détonation de l’existence frottée — sur les mousses malgré des crèmes raffermissantes pour ou contre — c’est dans la nuit que l’obscurité surprend le plus

Les grives percent le ciel — débardent les entrailles des mots au — chevet de la vigne les veines seules prennent par le feu — à quoi nous servirait d’avoir un cri de plus que les pierres — à échanger contre le salpêtre de l’intransigeance mon — pied bute dans les nèfles sur une tête de guêpe oubliée par des veules — la mémoire ne tient que par l’indifférence chimique

La neige s’étendrait-elle sur toute la terre ce ne serait pas du — tout la renverse de la peau que tu renfermes — peu s’en faut (l’été ramentevu de carnac) — mais enclin à plonger nos corps dans l’atrocité de l’eau — aux flouves soutirer comment se comporter avec la résine — pour garnir l’indifférence en nous emparant de la laine la plus proche — où le poème proclamera la divergence des mots vers la phrase

16 mai 2025
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