Fabienne Swiatly | Finir le boulot

Nous avions dit le 30 juin et j’ai envoyé le texte le 3 juillet. Texte fini. Les comédiennes vont se l’approprier pendant l’été. Clic droit et le texte me quitte. Soulagement, je vais pouvoir penser à autre chose.
Peur aussi, celle de ne pas avoir assez travaillé. De ne pas avoir assez sué. De retenir le meilleur. Que le texte a écrire viendrait seulement maintenant.

Merde. Merde. Merde... On peut pas rester coller indéfiniment à un texte. Il faut bien le lâcher. Combien de temps d’écriture en tout ? Le premier fragment envoyé au metteur en scène date du 19 janvier 2011, l’intitulé du mail était : J’ai hésité. Mais ensuite ? Combien de jours ou d’heures d’écriture, de réflexions, de lectures ? Je ne sais jamais. Et qu’importe. Oui mais il faut bien clouer le bec au doute. Lui dire que le maximum a été donné.

Texte achevé et il me reste une douleur physique. J’ai mal partout. Ventre. Dos. Jambes. Je suis éreintée.

Étonnamment (mais j’entends ricaner dans mon dos) le dernier passage que j’ai travaillé sur Annette dit :

« J’ai mal. J’ai mal derrière les os. Mon squelette ? Un ramassis d’os inutiles. Vous ne connaissez pas la douleur de derrière les os. Aucun d’entre vous n’en parle. Pas de langage approprié à ce que je ressens. Ma douleur est exclue de vos dictionnaires, de vos logiciels.
J’ai mal derrière les os.
Pas un de vos tracés ne le raconte.
Apprenez à lire mon silence.
J’ai mal derrière les os.
J’ai mal.
Elle sait, maman, elle le sait mais elle n’ose rien dire.
 »

Bien sûr il y aura encore la résidence à La Chartreuse de Villeneuve lez Avignon, le laboratoire à Vénissieux. Accompagner la création. Travailler dans le détail, certes, mais je ne serai plus confrontée à la masse du texte.

La pièce sera jouée en janvier au Théâtre de Vénissieux et en Février auTNP de Villeurbanne..

photo@swiatly

5 juillet 2012
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