PANIC, revue de cinéma
Panic est une revue de cinéma, une vraie. Le premier numéro est paru en novembre 2005 et on y retrouve des signatures, des sujets et des auteurs qu’on affectionne. Bref, un numéro particulièrement vif et tendu.
La barque est menée par Stéphane Bou et Jean-Baptiste Thoret qui ne sont pas des inconnus. Souvenons-nous de ce lointain automne 1999 lorsque parut le premier numéro d’une revue de cinéma qui posait en couverture « Filmer la peur ». Un angle sec et rageur, un sommaire aux allures de manifeste, une brèche que depuis les animateurs de feu la revue Simulacres n’ont cessé de parcourir.
Aujourd’hui Panic ranime la flamme et en anime une autre. Et sans concession... la couverture en serait le premier indice, le lecteur n’a qu’à bien se tenir. Ou plutôt il est invité à entrer dans un espace qui se veut critique, au sens le plus grec et le plus réflexif du terme. Le bonheur d’une telle démarche, c’est de faire débat et d’interroger, de trouver des approches qui prolongent un questionnement. Voici donc quelque chose d’infiniment précieux en ces temps où... etc. etc.
L’architecture de ce premier numéro est particulièrement riche, cohérent et savamment articulé à la démarche de la rédaction.
Le premier dossier qui ouvre ce numéro est un entretien avec Olivier Assayas (à titre personnel, c’est le meilleur choix du cinéma français contemporain). On y retrouve Assayas en grande forme critique. S’il force parfois le trait, c’est pour animer ce qui est encore vivant dans l’esprit critique du lecteur. Et cela fait du bien, je vous assure. On connaissait l’admiration du réalisateur d’Irma Vep pour Michael Mann. Il le redit dans les colonnes de Panic qui consacre justement son premier dossier au réalisateur américain si peu et si mal reçu en France.
Juste comme une mise en bouche : « Des obliques, des lignes droites, des carrefours, des freeways a perte de vue, un damier infiniment ouvert, et puis l’océan Pacifique : L.A. Dead Line, « notre divinité » dit d’elle James Caan, le cambrioleur fatigué du Solitaire (Thief, 1980). »
Premières lignes du texte de Jean-Baptiste Thoret et d’une trajectoire cinématographique. Le cinéma de Michael Mann, donc.
Mais l’on retrouve également de beaux textes sur Rosi, Marker ou Haneke, un article de Nicole Brenez sur Mounir Fatmi (son titre « Aimons-nous vivants » mériterait d’être celui d’un chronique).
Et ce n’est pas fini. Pour faire grincer quelques dents (et même les miennes par moments mais c’est aussi l’intérêt et la pertinence de la revue), on peut lire l’article de Thoret sur le dernier film de Cronenberg et le « critique de la critique » de Marc Cerisuelo dont il faut notamment rappeler le très beau Hollywood à l’écran. Cerisuelo revient sur quelques livres en sortant quelques griffes.
Enfin, la revue s’achève par une vingtaine de pages sur Don DeLillo : une conversation, un article et surtout une traduction inédite d’un texte de 1983 de Don DeLillo, « le sang de l’Amérique, vingt dans le labyrinthe de Dallas ». Histoire de souligner la cohérence éditoriale précédemment évoquée, de rappeler le passionnant 26 secondes, l’Amérique éclaboussée de Jean-Baptiste Thoret.
En somme, un numéro réjouissant qui cherche et trouve un ton. Et que vive l’avenir.