Toute l’Iliade en trois jours
C’est démesuré : les 24 chants de l’Iliade font en tout plus de 15 600 vers. Environ une heure de lecture pour chacun. C’est Philippe Brunet qui a formé ce projet. Une quarantaine d’« aèdes » liront sa traduction. Chaque chant sera introduit en grec ancien. Les lecteurs seront pratiquement toujours trois ou quatre sur scène ; ils se succèdent, se joignent, s’épaulent ; ils font entendre la dimension collective de l’épopée.
Parmi les lectrices et lecteurs : Dido Lykoudis, Marie-Claire Davy, Marianne Comtell, Karoline Zaidline, Bernard Benech, J.-P. Guglielmi, Bruno de la Salle, André Markowicz, Eric Prémel...
La lecture est répartie sur trois jours :
– le samedi 5 mars de 14h à 24h, amphi Richelieu (chants 1-10) ;
– le dimanche 6 mars de 11h à 23h, salle Louis Liard (chant 11 à 21) ;
– et le lundi 7 mars de 20h à 23h, amphi Richelieu (chants 22-24).
L’entrée (gratuite) est au 17, rue de la Sorbonne. M° Cluny.
La traduction de Philippe Brunet est claire, sensible ; on se rend compte à la lecture qu’elle se prête à la scansion ; elle fait sentir le caractère archaïque et en même temps l’extraordinaire intelligence et mobilité du récit. Le chant de guerre se transforme à tout moment en chant de paix.
Philippe Brunet anime le théâtre Démodocos.
(Extrait du chant 22 de l’Iliade, traduction Philippe Brunet.)
(Achille surgit pour provoquer Hector au combat ; Hector s’enfuit...)
Dès qu’il le vit, un frisson le saisit ; il n’eut plus le courage
de l’attendre, il quitta la porte, plongea dans la fuite.
Le Péléide jaillit, confiant dans ses pieds agiles.
Comme le plus léger des oiseaux, le faucon de montagne,
facilement s’élance sur la frissonnante colombe,
elle fuit en avant, et lui, en criant, se rapproche,
se précipite par bonds, son cœur le pousse à la prendre,
ainsi l’un vole tout droit, ardent ; et l’autre frissonne,
fuit près du mur troyen, guidant ses genoux rapides.
Arrivés à la guette, au figuier frémissant sous la brise,
et s’écartant toujours plus du rempart, ils empruntent la route,
vont à la double fontaine aux eaux claires, là où jaillissent
les deux sources du Scamandre qui tourbillonne :
l’une s’écoule en onde chaude ; il s’en élève
une fumée qui paraît sortir du feu qui s’embrase ;
l’autre, en plein été, s’écoule semblable à la grêle,
à la neige froide, à l’eau qui se fige en glace.
Là, de larges lavoirs avoisinent la double fontaine,
beaux lavoirs de pierre, où jadis les épouses, les jeunes
filles jolies des Troyens lavaient le linge splendide,
pendant la paix, avant que les fils d’Achaïe ne vinssent.
Ils la longent ; l’un fuit, et l’autre poursuit par derrière ;
brave qui fuit par-devant ; plus brave qui le pourchasse
rapidement ; l’enjeu n’est pas la peau d’une vache,
ni l’animal sacrifié, offerts comme prix de la course,
non : l’enjeu est la vie d’Hector dompteur de cavales.
Tels, à la borne, vainqueurs, des chevaux aux sabots solides
courent à toute vitesse : la récompense est grande,
un trépied, une femme, aux funérailles d’un homme,
ainsi trois fois ils font le tour de la ville troyenne,
de leurs pieds rapides : et tous les dieux les regardent ;
et le père des dieux et des hommes prend la parole :
(...)