lire en janvier
l'édition marche à dates fixes, mais le rendez-vous de janvier permet la rencontre d'ouvrages formellement plus en recherche – parmi les sorties annoncées, nous retenons ceux-ci - avec quelques liens ou bonnes feuilles...

Echenoz
sur site des éditions de Minuit les premières pages du nouveau livre de Jean Echenoz : "Au piano"
http://www.leseditionsdeminuit.fr/titres/2003/au_piano.htm
"Je ne peux pas envisager un roman sans mouvement. C'est peut-être encore lié à ma grande sensibilité à l'ennui. Si ça ne bouge pas, d'une manière ou d'une autre, ça me fige de façon insupportable. Je ne sais pas pourquoi mais je ne peux pas concevoir un roman sans ce mouvement, sans qu'il passe par des lieux qui, s'ils n'ont pas l'air d'être fascinants pour le personnage qui les traverse, le sont pour moi. Soit parce que je les ai vus, soit parce que je les ai reconstitués. Il faut que ces lieux possèdent, encore une fois, une pertinence romanesque. Cette pertinence-là, on ne la trouve pas partout. Et je ne sais pas toujours au juste pourquoi. Ça peut être le Pavillon des abats, par exemple, au Marché d'intérêt national de Rungis. J'y arrive une nuit, au hasard d'un repérage, et je me dis aussitôt : voilà, c'est ça. Nous y voilà. Ça peut être une ville du Nord-Est du Pérou - j'ai un peu voyagé au Pérou - où je me suis dit : voilà l'endroit. Voilà un endroit générateur. Qui n'a pas seulement une existence réelle, mais qui a aussi et surtout - pour moi - une existence romanesque évidente. Je vais alors essayer de reconstituer cette fascination-là. Ce qui n'a évidemment rien à voir avec des critères esthétiques."
Jean Echenoz, entretien avec Matthieu Remy dans la revue Z00EY, novembre
2002 - et toujours : le dossier Echenoz de remue.net

Delaume
"La Vanité des Somnambules", de Chloé Delaume, chez Farrago
http://www.leoscheer.com/rub/catalogue/auteur.asp?id=38
(Chloé Delaume annonce construction d'un site cheloedelaume.com)

Kaplan
"Les Outils", de Leslie Kaplan, chez POL - en ligne les premières pages :
http://www.pol-editeur.fr/catalogue/fichelivre.asp?Clef=5704
ce livre reprend plusieurs textes de Leslie Kaplan, sur le lien social, sur la fiction, sur les ateliers d'écriture, que nous avions déjà fait circuler via Internet, ainsi que ses textes parus en revue sur Blanchot, Duras, Daney...

Vasset / ScriptGenerator©®Tm
"Exemplaire de démonstration", de Philippe Vasset, chez Fayard
une fiction plutôt hallucinante qui enquête sur un logiciel fantasmé, "Sriptgenerator, système mécanisé de production de livres, de films, de jeux vidéos etx..."
auteur inconnu sur site éditeur, on compense par un extrait
http://www.remue.net/revue/TXT0301Vasset.html

Darley
"Un des malheurs", d'Emmanuel Darley, chez Verdier
http://www.editions-verdier.fr/index_nouveautes.html
à lire aussi : Emmanuel Darley sur remue.net, plusieurs inédits
http://www.remue.net/theatre/darley01.html
Verdier annonce aussi un texte de Juan Jose Saer sur le Quichotte

Claro
"Chair électrique", de Christophe Claro, chez Verticales - un livre qui sera très contesté, mais certainement le plus troublant, réflexion dans
l'intérieur de la peine de mort - en voici la présentation par l'éditeur:
"Né en 1962, Claro est l’auteur de Ezzelina (Arléa, 1986) et deux romans aux éditions Verticales (Livre XIX, 1997 et Enfilades, 1998). Il est également traducteur de l’américain (William T. Vollmann, Thomas Pynchon, Salman Rushdie, John Barth, Mark Z. Danielewski, James Flint…)"
voir entretien récent dans le Nouvel Obs
http://www.nouvelobs.com/articles/p1979/a26429.html

"Howard Hordinary — le bien nommé bourreau ordinaire — gagne sa vie en exécutant des condamnés à mort sur la chaise électrique, mais l’État – la Pennsylvanie – pour lequel il œuvre vient, à son tour d’opter pour l’injection létale. Chômage technique donc.
Persuadé d’être le petit fils, certes illégitime, du grand magicien Harry Houdini, Howard a installé dans sa cave la Chaise Fondatrice, la toute première, celle-là même qui avait rôti l’assassin William Kemmler au petit matin du 6 août 1890.
Reprenant à son compte l’obsession de son aïeul putatif (dont il partage les initiales : H.H.), Howard s’installe désormais tous les soirs sur la fameuse chaise et branche le courant — continu — en quête d’une improbable jouissance, d’une obsédante évasion. Ce faisant, il revit toutes les souffrances des Grands Toastés de l’Histoire Pan-Electrique. Remontant ainsi la généalogie des électrisés, il passe en revue les premiers cobayes, qui, bien avant les criminels, prirent place sur la chaise expérimentale : nos animaux les bêtes, babouins massacrés à la chaîne, chiens, chats, poules, un mulet, un morse, puis un agneau qui provoqua un court-circuit et fut transféré aux cuisines jusqu’à un éléphanteau qui, lui, à la surprise générale, éjacula.
La mort accidentelle par électrocution de George L. Smith, un docker alcoolique, et la lecture du rapport d’autopsie (fait rarissime, la cervelle était cuite (…) il n’y a apparemment pas eu " douleur ") fait franchir une nouvelle étape. Ainsi naît la Death Commission dont le cahier des charges, comme l’appel d’offres, est " d’étudier et de porter à la connaissance du public la méthode la plus humaine et la plus efficace qui soit pour mener à bien l’exécution de la sentence de mort ". Une démarche humanitaire pour une mise à mort indolore – plus moderne, moins médiévale que la pendaison ou la décapitation – dans le but inavoué de clouer le bec aux abolitionnistes. Et c’est le prototype de Thomas Alva Edison — fiat lux — qui emportera l’enthousiasme et le marché ..../... Dès lors, le bourreau ne quittera plus la Chaise : il y dort, y couche, y repose beuglant le nom de Szuszu, jusqu’au jour où plaisir et douleur vont se confondre en lui. Alors s’achève l’étrange quête sado-masochiste d’un électron enfin libre d’exécuter son œuvre.
À moins que cette histoire ne soit aussi celle de notre XXe siècle lui-même, incarné dans sa figure la plus extrême, ce bourreau auto-victimisé, réunissant à ses dépens les pulsions de mort du châtiment de masse et les principes utopiques d’une jouissance sans fin.