déployer la grande voile

Fronton disait qu’il fallait travailler la langue pour être capable d’affronter audacieusement (audaciter) les périls des pensées les plus difficiles à admettre, les aphasies que provoquent les expériences les plus douloureuses ou qui sont le plus indomesticables. Il faut suivre sa route avec les rames et les petites voiles (sipharis et remis tenuisse iter), mais quand la nécessité imprévue survient, être capable de déployer la grande voile du langage et laisser brusquement derrière soi les chaloupes (lembos), les barques des pêcheurs (celocas), la philosophie, l’histoire, les lois, les proverbes, les décrets, le baratin, les coutumes.

Pascal Quignard, Rhétorique spéculative, Paris, Calmann-Lévy, 1995, 217 p. ; Paris, Gallimard (Folio, n° 3007), 1997.

28 octobre 2009
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