Duras | Duras et la divorcée Brabant, par Caroline Sagot Duvauroux/1

Marguerite Duras n’a pas besoin de moi. Son œuvre contient tous les outils qui permettent d’y voir en toute lumière les indiens les marées les suppliques dans les lits des fleuves et des hommes : la vie forte. Mais je veux répondre à l’invitation amicale d’y mettre mon grain de sel. Je relis un article paru en 1964 dans L’Express. Marguerite Duras y parle avec ferveur et radicalité de Hélène Bessette. Je comprends que l’invitation à écrire devient, au chaudron de Duras, une exhortation à lire. À lire ce qui est neuf, ou très anciennement perdu. Écritures d’esclaves, d’indiens, de femmes, d’handicapés, etc. C’est alors que je découvre, absolument oubliées dans les combles de Neauphle, cent notes en vue d’un scénario improbable car c’est à nous, lecteurs improbables, d’en achever l’exécution. CDS.


1. Elle dit : beaucoup de choses, quand on lui demande : qu’avez-vous fait ?
L’écrivain s’est effacé. C’est une fiction. L’insuccès et l’insolite.
Plus un rire muet, du fou dans tout ça.

2. Lili pleure.

3. Le cas Brabant. Un livre ? un film ? une pièce en un acte ? Une fin noyée dans un commencement. Un avortement.

4. ( pour l’histoire, si)
Hélène, divorcée Brabant, serait écrivain et femme bien sûr.
Quatorze livres auraient été publiés chez un grand éditeur (jamais réédités), dont un retiré des ventes suite à un procès pour diffamation et outrage aux bonnes mœurs. Il aurait été réécrit sous un autre titre, enfin presque autre. Recopié pourrait-on dire avec des majuscules en plus, et un signe de dénégation devant les numéros impairs d’une rue incriminée par le procès.

5. De l’insolence à chaque pas du drame.

Voix off : L’insuccès, à mon avis, n’existe pas. Je veux dire, l’insuccès immérité, n’existe pas. Le succès peut être tardif, mais il doit arriver, tôt ou tard. Je ne pense pas que ce soit la critique qui soit responsable, en premier lieu, de ce que j’appelle l’insuccès momentané d’une œuvre. Je crois que l’insuccès d’une œuvre découle de l’œuvre elle-même, enfin, c’est une qualité intrinsèque de l’œuvre. Quand une œuvre est seule à être elle-même, quand une œuvre est insolite, il est normal qu’elle ne frappe que certains initiés, tout d’abord. Un livre ne paraît jamais seul, il est toujours accompagné d’autres livres, il est toujours dans un contexte donné. Il se peut très bien qu’un livre très singulier, très insolite, soit contrecarré par d’autres livres.

6. (pour l’histoire, si)
Après vingt ans de soutien, l’éditeur interrompt tout. L’auteur est vivante. On est vingt ans après la dernière publication.
Aucune raison propre. Des concours de circonstances. De l’indémêlable. Écrivain non lue, pas sympathique. Des adversaires dont le tempérament. De grands soutiens.

7. Reconnue mais inconnue voilà l’affaire.
(Pourquoi elle pourquoi pas moi ?)
Elle aurait refusé la grâce. Divorce d’avec la grâce. Grinçant. Pas sympathique. Irrécupérable. Pas beau. Vrai.

8. Si c’est un roman, l’écriture est protagoniste. Non pas laboratoire, surgissement de percussions encéphaliques et cardiaques de la réalité en plein déroulement syntaxique. Implosion catastrophique puis effeuillage d’une lenteur.
Incantations lapides, pas de verbes, pas de liens, de l’isolement (l’écriture va raconter le destin) (rencontrer le destin : tomber).
L’Héroïne absente, l’œuvre s’absente. L’œuvre est l’héroïne, s’engloutit dans le silence. Tragédie humaine mais non universelle il y a d’autres livres. Tragédie idiote.
A rose is a rose is a rose. Penser à G. Stein.
Roman de la mort du roman pris au mot. Une existence se répète qu’elle ne va pas mourir, en vain bien sûr. Une écriture qui se répète... Il ne fallait pas le dire. Le piège se referme. Le roman dévore les conquêtes de la poésie. C’est pas le moment tant pis.

9. Un anachronisme implose, pas de vagues.

10. Hybride littéraire. Jusqu’au phonétisme. Pas le moment ensuite ce sera trop tard.

11. Interrompre épouvanter tout détruire tout recommencer. ASSEZ s’écrit en capitales au milieu de la page. Une sorte de Mallarmé hystérique.
Personnage au rebut de la lettre.

12. (pour l’histoire, si)
Trente déménagements en vingt ans. Angleterre, Pays-Bas, Suisse... Exils, rebuts en chaîne comme les genres se rebuteraient dans la même phrase.
À l’heure de la cantine (elle serait institutrice par exemple) l’écriture. Sa vie d’ici France. Ne tiendrait pas dans Paris, récuserait Paris.
L’étrange croît : les mots l’emportent, vont servir le cri (folie consciente, rehaussée) défiant le littéraire.

Ici on déménage
C’est une belle journée pour promener du mobilier

On ne vit que deux fois, dirait-elle. Mégalomane et de portée minime j’écris un petit livre... je vais faire du dédoublement de la personnalité, soit psycho, soit schizo, soit parano, au choix, à la merci des idéologies freudiennes et apparentées.

13. Ça commencerait par La voix de la France dans le Pacifique. Désespoir sans fond. 1948. L’écrivain. S’il crie ce n’est pas qu’il soit plus sensible ou plus visionnaire que les autres, c’est simplement qu’il a le talent de crier et son cri est exactement le cri de la détresse environnante.

14. La divorcée Brabant. ( la seule anecdote est dans le titre).

15. Des histoires débutent avec des fins rebutées, précipitées sur les débuts. Par exemple Une pleure. Lili. Trente ans, vieille, (l’amour c’était avant le roman) se marie avec un homme qu’elle n’aime pas, ni sa mère. L’homme est déporté par les nazis puis revient. Lili de retour chez sa mère est amoureuse d’un berger plus jeune qu’elle, puis seule dans la torpeur des jours, il ne se passe rien, pas sûr que les personnages aient un nom. La mère la fille l’homme. Vingt ans, trente ans quarante ans. Le mari crie « elles doivent coucher ensemble » ( la mère et la fille).
Mots usés, phrases sans timbre mais drame renoué. Sans secret, contrôlée, la fille ne peut nouer le drame. Au chevet de Lili, Princesse et prostituée, un autre roman. Le roman choisit pour les personnages et prévient : il va y avoir un crime.
Rien ne s’est passé personne n’est mort. Je voulais faire semblant c’est tout. Ils m’ont cru capable de tuer mais je suis tout juste capable d’écouter aux portes. Ce genre.

16. La romancière n’aime pas ses créatures les tient loin dans une dureté, dans un mépris.

17.
Ici, devant, derrière, par là, des personnages, la charrette lente et chargée, le paysage dévissé, le soleil fixe, et le chemin parcouru.
Vous traînez, crie Lili.

Pas de décor. Des mots.
La route bordée de platanes est la route bordée de platanes. Répétition butée pour épithase.

18.
Ce n’est pas une voix de héros de roman / N’est pas à vous / Pas même ce clou.

19. (pour l’histoire, si)
Il y aurait des prix et de l’argent. Cazes par exemple de la brasserie Lipp, 80 000 francs par exemple. Des journaux, Combat, Parisien libéré, des voix au Goncourt par exemple.

Voix off : La RTF a demandé ces temps derniers à des auteurs (dans la rubrique intitulée « littérature insolite ») quels étaient à leur avis, depuis une vingtaine d’années, les chefs-d’œuvre trop méconnus. J’ai personnellement cité « Lili pleure » de Hélène Bessette.

20. Puis l’écriture s’exige peinture. En mots. C’est idiot mais vrai.
La tour.
C’est une histoire de bougies.
L’héroïne est tout simplement une bougie.
C’est un roman qui se lit et s’écrit à la bougie.
C’est pourquoi personne n’y comprend rien.

21. Puis le livre chasse tour à tour ses titres. Ses langues divorcent.

22. Puis on frôle le roman noir.

Je lirai la Bible ensuite. (après cette indispensable préparation)

Un garçon de quinze ans a tiré sur son père, il faut élucider des circonstances. Il n’a jamais tué son père. L’affaire n’est pas terminée (une putain, une brute, un miyonnaire sur le bord de la folie), l’enquête bute sur le désordre de vingt minutes passées sous silence. Jusqu’au deuxième silence de l’histoire : 11520 minutes avant aveu. Extrêmement, inutilement précis avant prochain glissement de genre.
L’enfant a tué, l’enfant est tué, question d’auxiliaires, or l’enfant n’en a pas.
Une équation à une inconnue. Les personnages de cette histoire ne sont pas solides, ils s’effondrent. Pourquoi ?
autre chose = x/chagrin + x = effondre / et lui, l’enfant, connaît : x, s’affiche en gros sur la page ou l’écran.

23. Problème : que voit exactement la foule ramassée sur le trottoir ?

24. RIEN

25. L’angoisse s’épelle, s’étire, remonte l’enfance littéralement. L’a aine jé oi deuzaisse eu. J’ai tué j’ai menti je me taisais pour supprimer l’angoisse.

Mon père possédait quelque chose en trop une bougie. Trop riche d’une bougie. Ce n’est pas le père que j’ai tué c’est le propriétaire.

Les personnages s’effondrent. La phrase est personnage, s’effondre, interroge la page et dedans la page

à cause de cela j’ai eu peur

Tout ça est insensé.
La mère : d’abord je ne suis pas très sûre qu’il soit de moi.

26. Aucun roman ne peut rompre le silence qui entoure le nom et l’œuvre. Aucune raison. Incompréhension. Ni les admirateurs célèbres ni les détracteurs célèbres n’y peuvent rien.

Voix off : Quand rendra-t-on enfin justice à Hélène Bessette ?

Elle se rend justice. Elle rompt.
Devient analphabète. Presque. Bien en deçà du lettrisme romanesque. Oui. Borborygmes, onomatopées. Elle ose. Logorrhée semée d’images, comme dépourvue de pensée. Comme. Pas.
Des listes ! oui peut-être.

Triage de haricots au tapis
Institut Maintenon
La famille garance
Le fidèle avocat
Et
Le ministre possible
Chère madame
Madame, Monsieur, ma chère enfant

Eh oui ! Trop tôt, ensuite ce sera trop tard. On constatera que c’est mieux fait quand on verra que ce fut fait.

Finie HB pas la bonne place et voilà l’ouvrage.

27. (pour l’histoire, si)
11 livres en 13 ans ou 20’ de silence.
Elle invective violemment l’édition pourtant fidèle (parce que fidèle ?)
Mais sur la porte de son meublé elle inscrit : HB de chez (Gallimard par exemple)
Du beau monde cependant l’encourage voilà l’affaire.
Ce projet de fiction est absurde mais il me hante.

Voix off :« N’avez-vous pas froid ? », j’aurais presque pu le citer aussi si ce n’était pas trop tôt encore. C’est le huitième roman de Hélène Bessette. Si je me permets d’en parler, c’est pour essayer de faire que la critique lise et parle davantage de cet écrivain exceptionnel.

28. HB a-t-elle une vie privée ? non, un trajet. Comme une phrase. L’Orne, le Nord et l’Eure-et-Loir. Peut-être adolescente dans l’entre deux guerres (ascension d’Hitler et Front Populaire). Jeune épouse de pasteur / mission d’évangélisation en Nouvelle Calédonie / DIVORCE / retour en France en 49 par exemple.
(pas un personnage pour moi mais il arrive comme ça) (l’anecdote n’est pas une anecdote, c’est une syntaxe. Une trajectoire.)

29. Née obscurément (parce que ce terme me plait et que les détails, (mère parfumeuse-père chauffeur de taxi, on s’en fout dirait-elle).
Puis.
L’évangile parce qu’à ceux qui chantent faux comme aux autres / Parce que sauve de nos qualités comme de nos défauts.
Puis l’effroi, le silence du dieu. Comme tout le monde.
Ce qui donne : « n’avez-vous pas froid ? ». Des mots comme ça. Des titres qui chassent des titres, qui défilent comme des lieux-dits.
Marie Désoublie chasse Non que chasse Le bal qui chasse Dans la rue que chasse Ciel froid et mers chaudes... Jusqu’à Lili pleure

30. Des listes chassent la phrase que le manifeste assassine. Dès le début. John Cage. Il faudrait nommer ça d’un autre nom qu’écrire mais c’est écrire.

Lisez répondez écrivez suggérez proposez contestez attaquez soutenez défendez propagez répandez demandez aimez réprouvez relisez...
Oui, quelque chose comme ça, dès le départ : journalisme, une distraction avec un but : féliciter l’infidèle, morigéner le croyant. C’est 48, communisme religion moderne, martyrs et messianisme, communisme exemplaire pour le chrétien, conquête et risque, bonheur fou. Libre.

31. Mais ce n’est pas pour ça. Plus anachronique.
On attend la grâce furieusement, méchamment. Refus d’une philosophie morale en guise d’attente de la grâce, refus d’une classe bourgeoise capitaliste fût-elle honnête en guise de communauté fraternelle en Christ.
Christianisme rachitique. Seule position envisageable : à genoux, prie et pense.
Écrasée / libre.

32. Libre serait dire insolente de transparence.

33. Surgit MaternA, un livre-titre. Majuscule en fin de mot. Presque suffisant. A d’enfance, du féminin, de l’inachevé puisque toutes les lettres se précipitent à sa suite).

Roman sans paysage. / Pas de décor./ Pas le temps de décorer./ Sans décoration./ Siècle de la vitesse./ Le lecteur est pressé./ La romancière est pressée.
LES PERSONNAGES SONT PRESSÉS. VITE. ALLONS. DÉPÊCHEZ-VOUS. VITE.

Ce genre.
Pour que le contrôle soit perdu et que le roman s’échappe. Dans la fin qui est début de tout : A. Donc tout s’efface, seule une voix résiste, enfin, c’était une voix, dans l’étroit Larousse du vocabulaire quotidien. Personne n’entend.

34. Veut crier son nom (l’auteur ou le lecteur ou un autre personnage) crie Tarzan par exemple. Oui.
Oser. Tenter. L’inconvenant.

35. Le roman convole en noces. Erreur de raisonnement. Divorce. Fiction & réalité, son & lettre ou polylinguisme. L’angoisse outrage la syntaxe.
Dans le lieu commun d’une langue morte, instruite et apprise, on ne sort plus du langage insipide des conversations molles. Miettes nulles que le roman invective. Le roman devient l’amant après meurtre du roman légitime.

36.
C’est un Roman imbuvable, aux mille petites actions rétrécies, entrecroisées enchevêtrées sans aboutissement... perdues.
Affreusement opaque.
On ne savait pas qu’il y aurait un roman.

Un temps dur de points partout. Mettre en scène des points ?

Mais le roman défait le couple pour qu’il y ait drame.

37. Les personnages se retournent, voient que c’est un roman, qu’il n’y aura plus rien, que c’est la fin puisqu’un roman finit. Et voilà le drame renoué.
Car ces minuscules passions mortes et lamentations étouffées lancent l’alarme d’autres passions, gigantesques, secrètes. Intuition dans les trous de la syntaxe.

38. Des femmes / important.
Des mots communs et roturiers, ménagers et culinaires mesurent de grandes passions.
Phrases de pauvres, défaut de présentation voilà tout. MaternA. Foutoir.
Le A s’allume dans une grande maison-carcérale-éditoriale. Verbe tout-puissant qui attire les ad-jointes-jectifs qui se déclinent / s’inclinent. Tous les temps, tous les fronts, mais le verbe organise hiérarchiquement la rumeur. Les bruits courent, les phrases courtes s’enchaînent. Avec un hiatus par exemple (ou une faute d’orthographe), une erreur rebelle. Une IolA qu’on matera . Le(a) N la chasse du roman MaternA. Tyrannie de femme. Materna en guise d’utopia...

39. Confusion des genres des temps des sexes. On se détourne, comme on se bouche les oreilles pour ne pas entendre un cri. Contre-nature. Oui, poésie.
Poésie du A. Noir bien sûr.

(Pubis anus prépuce coccyx
Visages fautifs...
Les plus calmes jouent à se prendre la température avec un bâton.)

Poètes de sept ans.

40. Le roman paresse aux articulations.
Pas de vie privée. La lascivité se confie au roman.
La romancière-personnage est un désastre dans la littérature, comme l’institutrice est incompétente et négligente dans l’histoire.

41. Ne se plaint pas. S’en va.
Choisit l’erreur qu’elle préfère : vit.

42. Pendant que.
(pour l’histoire, si) L’argent l’argent l’argent. Solde de son compte d’auteur largement débiteur car pas même haïe par ses éditeurs, loin de là. C’est l’œuvre qui ne se peut. Qui ne se peut (veut) aboutie. Sans mensonge, comédie, jeu, ne le peut. Donc, Mère seule, chargée de famille, aux fins de mois difficiles, une bibliothèque en deux malles, pain et yaourts...
Mais choisit l’erreur qui lui chante : vit.

J’ai décidé de ne pas rejoindre ce seul poste de Saint-Georges-sur-Eure qu’on me permet, que je n’ai pas sollicité et qui ne me convient moralement ni matériellement.

Voilà comment HB femme de lettres devient femme de ménage.

43. Œuvre autiste et mauvais personnage.

Romancière femme de ménage est un rôle usé absurde grotesque, que je me refuse à jouer, dirait-elle. Assiéger la NRF ? Prendre l’attitude révolutionnaire et aller occuper le canapé..., dirait-elle.

44. Elle s’adresse toujours. À qui ?

45. Reconnue mais Inconnue

Voix off. Nous sommes quelques-uns, dont Raymond Queneau et Nathalie Sarraute, à l’admirer beaucoup et à regretter profondément le silence qui entoure la publication de ses romans. Même si ceux-ci sont d’inégale valeur (lesquels dans l’œuvre d’un auteur ne le sont-ils pas ?, il nous semble que l’œuvre elle-même devrait frapper très profondément, ne serait-ce que par la rareté extrême du talent dont elle témoigne. La nature faite littérature, la littérature vivante. Pour moi, pour le moment, c’est Hélène Bessette, personne d’autre en France.

46. Une fois qu’on a compris qu’on n’est rien, le but de tous les efforts est de devenir rien. Le désespoir n’est qu’une maladie mortelle.
N’avez-vous pas froid ?
Mariée à un pasteur, un temps de la vie du roman. Liée au couple (fiction réalité ?), non, au couple. À la maladie mortelle. Rien.

Ta vie Dora est une très vieille histoire. Fastidieuse. Ennuyeuse au possible. Pâle et déconcertante. Monotone et morose. Comme la mienne. Comme toute les vies.
Dieu !
Dieu est sinistre. L’église chrétienne est humaine par excellence, misérablement humaine savamment humaine sa fortune est dans son humanité. Elle a misé sur le misérabilisme total.

Contre un passé d’adoration !

47. Redevient sexuelle abrutie animale, scandée par des points. Redevient séquence lexicale. En un bref instant deux mille ans d’architecture géniale sont à terre. C’est un gain. Elle choisit d’être le personnage inexistant donc libre d’un roman.

Le temps n’est plus aux phrases / ceci n’est pas une phrase / demain sera sans Phrase
Découpe ces mots / Mélange / Lance / Vois comme ils retombent.

Du son, un champ lexical de cri, de culpabilité, d’égarement, d’offense pour dire : rien

48. Il faudrait récupérer une grâce dans la disgrâce. Une syntaxe qui emporte. Une route ?

49. ( Pas un livre. Et moins qu’un film. Une affiche-scénario peut-être, un manifeste. Mais sans grand espoir. Je ne sais pas encore.)

GRP
Gang du roman poétique
Guerre du style
Halte-là. Murs enfoncés. Portes ouvertes
Les libraires ne sont pas les plus forts
Sans compte en banque
Sans famille. Sans amis alliés et sans connaissances.
Sans politiques. Sans souvenirs de guerre
Ni amour. Ni argent.
En marge du temps.
GRP
        Quand même


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Note du traducteur. Les textes en italiques sont extraits d’un article de Marguerite Duras paru dans L’Express, le 21 janvier 1964. Les textes en corps 10 sont extraits de romans d’Hélène Bessette.

17 mars 2006
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