Philippe Vasset, à propos de London Orbital

Dans le cadre du LABO UTILE LITTÉRATURE,
CYCLE CITÉS ET FRONTIÈRES, PARCS ET PAYSAGES

Une série de rencontres littéraires au Lieu Unique (Nantes, en janvier et février 2012)

Entretien avec Guénaël Boutouillet à propos de London Orbital (Iain Sinclair, éditions Inculte, 2012).



London Orbital, énorme et magnifique livre de Iain Sinclair paru aux éditions Inculte en 2011, est postfacé par Philippe Vasset : correspondance des plus logiques, quand on se souvient du Livre blanc de ce dernier, ballade dans les espaces vides des cartes IGN (dont Dominiq Jenvrey parle dans cet article), mais aussi de son deuxième roman, "Carte muette", court texte imaginant une cartographie impossible de l’Internet.
En effet, le livre de Iain Sinclair narre une exploration urbaine périphérique, méta-narration d’un itinéraire très concret, celui qui fait le tour de Londres, dans la lisière de l’immense autoroute orbitale, la M25 : la carte géographique constitue littéralement le prétexte (le décor, autant que le sujet) de l’objet littéraire. Objet littéraire étonnant, format dérives, hyper politisé (la M25 est une relique monumentale des années Thatcher), volontiers paranoïaque : "Toutes les balades contredisent le mensonge du terrain : elles sont orbitales."
Extrêmement littéraire (et artistique), aussi : on y croise H.G.Wells ou Bram Stoker, et tout ce que le Grande Bretagne compte de mythologies périphériques, d’"au-delà" du visible : comme si la contrainte de trajet (dessiner un cercle), extrêmement concrète et copieuse (dessiner un large cercle) délivrait une forme de permis de rêverie paysagère. Féconde.
Philippe Vasset, dans sa postface :

"Iain Sinclair sait déplier le paysage à coup d’analogies et de métaphores jusqu’à ce que, sans qu’aucun déplacement n’ait été perceptible, la ville ait changé autour de vous. Il connaît les formules qui déploient l’espace ramassé dans les interstices, mais sait aussi chiffonner l’étendue pour en faire une boule, un lieu démesurément lourd et signifiant. C’est un thaumaturge, un manipulateur. Ses textes agissent sur le territoire, le travaillent, le façonnent. Les correspondances qu’il établit entre les lieux creusent l’espace et modifient l’équilibre des villes. Les cercles qu’il décrit autour de Londres ne semblent parfois avoir d’autre but que d’envoûter le Dôme du Millénaire, monument haï de l’ère blairiste, afin qu’il s’écroule."

21 mars 2012
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