Royet-Journoud | Un métier d’ignorance

Cinq textes, pour un total de 40 pages, chez Eric Pesty éditeur, àMarseille, et retrouver le nom et la voix de Claude Royet-Journoud :

Une note de l’éditeur : Ouvrage composé sous forme de notes, « La Poésie entière est préposition » reunit en substance la totalité de deux carnets, tenus par Claude Royet-Journoud en contrepoint de son travail d’écriture...

Et une épigraphe : Ma science ne peut être qu’une science de pointillés. Je n’ai ni le temps ni les moyens de tracer une ligne continue, signée Marcel Jousse.

Et si une phrase comme : Je donne àlire quelque chose qui est àpeine visible : c’est làque s’exerce la menace, que quelque chose de violent peut naître suffisait àla récompense, àrendre nécessaire le fin matériau de pages ?

Ou de la prose, en amont du point d’arrivée ci-dessus : J’écris d’abord de la prose sans aucun intérêt littéraire. Le poème ne vient pas de la prose, mais il n’arrive pas non plus àson terme sans elle [...] La prose, c’est l’enfance. Elle sert d’éveil. Elle sert àsortir de l’aveuglement. [...] C’est aussi un travail de suppression. Ce qui ne veut pas dire qu’il y aurait sous le texte un autre texte qui viendrait àmanquer...

Ou du corps : Faire surgir la partie du corps qui écrit (la rendre visible, lisibleà : bras, poignet, main, doigt, bouche... L’inscrire dans la fable, en faire un personnage de l’intrigue.

Qu’on nous permette ci-dessous un extrait du point d’arrivée du livre, le 5ème texte (Becquet). On peut ensuite aller relire La notion d’obstacle (1978) ou Le renversement (1972) : auteur rare.

Quant aux prépositions : lire chez POL Théorie des prépositions. D’ailleurs, c’est sorti en novembre, toute la presse en est remplie...

 dédié par remue.net, rédaction àClaude Favre, poète en caravane
 photographie : Claude Royet-Journoud de dos, © Litote en tête, sept 2007.

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Claude Royet-Journoud | La poésie entière est préposition

un court extrait

 

Une part aveugle nécessaire, féconde.

« C’est par l’interposition du poétique que se révèle la brute séparation du langage et de l’être. Le langage, même creusé, ne fait voir que lui-même : un mur. » (Daniel Oster.)

Ça commence par les mains...

Un mot privé qui n’est fait que pour l’oeil. (Un baisser de rideau en quelque sorte.) Il n’a pas àêtre lu. On l’entend mentalement. C’est tout.

J’aime cette résistance (au sens).

« Comme on plonge son doigt dans la terre pour reconnaître le pays où l’on est, de même j’enfonce mon doigt dans la vie : elle n’a odeur de rien. » (Kierkegaard.)

« Le temps tout entier forme un jour unique dans l’économie de Dieu. » (Hamann.)

Verticalité inouïe de la phrase de Roger Lewinter.

Le sommeil, la division.

« La chose est un lieu, mais la perception n’est nulle part... » (Merleau-Ponty.)

La mise en place des charnières. La préposition permet l’étendue.

[...]

« Parce qu’ils sçavent, tous les mots, ils croyent sçavoir toutes les vérités. » (Joseph Joubert.)

Moi aussi, souvent, je reste au-dehors.

Les livres n’existent pas.

Le texte a une peau, un épiderme. La moindre variation typographique (romain, italique, tiret, etc.) y joue un rôle non secondaire.

Le livre n’a pas besoin d’une voix.
Lire àhaute voix, c’est un peu comme regarder un texte autographe. Il y manque la neutralité de l’impression. C’est d’elle que surgit l’élan du sens.

« â€¦ the page must first be seen in order to be made invisible... » (Michael Davidson)

28 décembre 2007
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