Luis Sepúlveda, Le Monde du bout du monde

Lire Le Monde du bout du monde (trad. François Maspero, Métailié 2005) de Luis Sepúlveda pour dériver sur une immensité plane cerclée par l’horizon, une étendue infinie de terre, de ciel et de mer, jusqu’à l’accès austral de la solitude.

Rouler comme une bille sur un grand miroir, en suivant la baleine, tandis que le récit se creuse et s’incline sur sa pente, une longue pente au bout de laquelle attendent l’écume, les harpons des usines flottantes, et le souffle vertical d’un géant qui danse dans l’éclair.

Le navire sur lequel se trouvait l’écrivain avait failli heurter une épave qui flottait au gré des courants et, agrippé à elle, un Indien yagan était passé tout près, frôlant presque le pont, le bras tendu comme s’il voulait indiquer la route des catastrophes.

[...]

C’était un Yagan chasseur de phoques. Un jour qu’il suivait la piste d’un animal qui avait une belle fourrure, il s’était aventuré sur la banquise et c’est alors que, soit à cause d’une chute dans l’eau, soit à cause du crachin ou de sa propre sueur, la basse température avait congelé son corps en l’arrêtant en pleine course. Plus tard, le printemps avait disloqué la glace et l’avait condamné à être un navigateur fantôme.

20 juillet 2005
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