(2024) Archives & Cie
Explorer des archives, travailler à partir de documents – autrement dit, lire l’Histoire au présent, mais aussi trouver ce qu’on ne cherchait pas...
Chez les écrivains, la recherche documentaire s’est généralisée au cours des dernières décennies, avec l’accès facilité aux diverses traces grâce au numérique et internet.
L’auteur acquiert une méthode proche de celle du chercheur, et les mois de résidence sont une chance pour une telle traversée dans les éléments du passé. D’autant plus que, selon le lieu et les personnes qui l’accueillent, selon les rencontres au fil du temps, il peut accéder à des ressources insoupçonnées.
Des années plus tard, les œuvres produites deviendront elles-mêmes des documents pour d’autres chercheurs, échos de leur époque, inscriptions dans l’histoire littéraire – et la boucle est bouclée.
Ce dossier présente les témoignages de quatre autrices et auteurs particulièrement investis dans cette pratique.
Emmanuelle Favier est en résidence au Pays de Nemours qui accueille le musée de Préhistoire d’Île-de-France. Elle considère les documents à la fois comme une source d’inspiration et un socle, déclencheur et support de l’imaginaire. « Tout l’enjeu réside dans l’endroit où l’on place le curseur entre la fiction et le document. » Ici, elle s’inspire surtout des terrains physiques et des gens croisés.
Joachim Séné a travaillé depuis les Archives publiques de Noisy-le-Grand à partir d’un épisode local de la Résistance : le piratage par le réseau Robert Keller des lignes téléphoniques des Allemands. Il a récolté et partagé de nombreux éléments liés à cette période de l’Occupation, et a vécu cet accès privilégié comme une légitimation de sa démarche d’écrivain.
Le projet de Benoît Toqué prend sa source dans des anecdotes tirées de la vie du banquier d’affaires américain John Pierpont Morgan, propriétaire du Titanic, réunissant des éléments textuels, vidéo et iconographiques, dans un esprit tentaculaire entre réel et fiction, pour lequel il a dû se forger une méthode de travail inédite dans son activité littéraire.
Fabienne Yvert s’est installée au CNES / Observatoire de l’Espace pour un travail sur les non-humains machiniques, en vue de l’écriture d’un livre poétique à mi-chemin entre science et fiction. Cette expérience lui permet « d’aller voir ailleurs » dans tous les sens du terme, un déplacement à plusieurs niveaux.« Être dans un fonds important et spécifique est un grand luxe, guidée en plus... »
À lire en prolongement :
Revue Littérature n° 166
Usages du document en littérature, Production - Appropriation - Interprétation,
éd. Armand-Colin, 2012.